Intervention de Isabelle Le Callennec

Séance en hémicycle du 1er décembre 2016 à 9h30
Extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Le Callennec :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, nous examinons en séance une proposition de loi visant à créer un délit d’entrave numérique à l’interruption volontaire de grossesse. Près de 200 000 IVG sont pratiquées chaque année dans notre pays, à rapprocher des quelque 810 000 naissances. Plus de 10 000 mineures y ont recours. Les chiffres sont stables, malgré les actions de prévention et la promotion de la contraception : cela doit nous interroger.

C’est la loi Veil du 17 janvier 1975 qui a dépénalisé l’avortement en France. Pour décider d’une IVG, la femme enceinte devait se trouver en situation de détresse ; l’intervention devait être réalisée avant la dixième semaine de grossesse ; l’acte devait être réalisé par un médecin dans un établissement de santé ; les médecins disposaient d’une clause de conscience ; deux consultations médicales et une consultation psychosociale étaient obligatoires avant l’intervention.

En 1993 a été créé le délit d’entrave à l’IVG, pour lutter contre les commandos qui tentaient, dans les années quatre-vingt-dix, de dissuader les femmes aux abords des établissements de santé pratiquant les IVG. Il s’agit de la loi Neiertz, qui punissait de deux mois à deux ans d’emprisonnement et de 2 000 à 30 000 francs d’amende le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher une IVG.

En 2001, la loi Veil est réformée : le délai de recours est porté à douze semaines de grossesse ; la pratique de l’IVG est rendue possible en médecine de ville ; les mineures peuvent y avoir recours sans l’autorisation parentale, sous certaines conditions ; la consultation psychosociale n’est plus obligatoire pour les femmes majeures mais seulement proposée et reste obligatoire pour les mineures, ainsi que vous l’avez rappelé, madame la rapporteure.

En 2014, deux amendements introduits dans la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes font évoluer la législation. Le premier amendement supprime la mention « situation de détresse » et prévoit que, désormais, peut demander une IVG une femme qui ne veut pas poursuivre sa grossesse. J’ai personnellement voté contre. J’estimais inopportun de toucher à la loi Veil à la faveur d’un amendement dans une loi qui traitait d’égalité professionnelle, de lutte contre la précarité, d’accès aux responsabilités professionnelles et sportives.

1 commentaire :

Le 02/12/2016 à 10:10, Laïc1 a dit :

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"prévoit que, désormais, peut demander une IVG une femme qui ne veut pas poursuivre sa grossesse."

Tout le problème vient de ce "veut", car comme la situation de détresse n'existe plus, tout comme le délai de réflexion, la femme qui est menacée pour qu'elle avorte pourra faire trop facilement passer le "je veux que tu avortes" de l'autre qui fait pression, contre son "je ne veux pas avorter", et elle dira "je veux avorter", alors que tel n'est pas son désir.

La loi ne fait plus rien pour aider la femme qui hésite, et cela n'est tout simplement pas acceptable, c'est cautionner la violence faite aux femmes, ce n'est pas ça l'idéal de la République.

Ce qu'il faut, c'est ne pas imposer la situation de détresse comme condition obligatoire de l'avortement, (comme le faisait la loi Veil) mais comme condition facultative qui permet à la loi de savoir si oui ou non la femme subit des pressions pour recourir à l'IVG.

Par exemple, on aurait faire une loi du genre " Toute femme peut recourir librement à l'IVG. Toutefois, toute situation de détresse sera recherchée par un examen pré-IVG afin de savoir si l'Etat peut y remédier."

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