Intervention de Pierre Morel-A-L'Huissier

Séance en hémicycle du 8 décembre 2016 à 9h30
Prise en charge de l'autisme — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morel-A-L'Huissier :

C’est cette lecture erronée de la maladie qui prévaut aujourd’hui, lorsqu’un enfant autiste est pris en charge en hôpital de jour, en institut médico-éducatif ou en centre médico-psychologique. Cette mauvaise prise en charge aboutit à un terrible constat d’échec : 80 % des enfants atteints de TSA sont exclus de l’école en milieu ordinaire.

Alors qu’une prise en charge précoce et adaptée permettrait de réduire considérablement le coût économique et social de l’autisme, comme cela a été démontré dans le rapport d’un comité sénatorial québécois dès 2007, qui préconisait un accompagnement précoce, avec des méthodes éducatives et comportementales, la France s’obstine à allouer la majeure partie des moyens financiers destinés à l’autisme aux pratiques psychanalytiques.

Déjà en 2012, Daniel Fasquelle déposait une proposition de loi visant à l’arrêt des pratiques psychanalytiques dans l’accompagnement des personnes autistes, et mettait en place un groupe d’études sur l’autisme. Il est urgent aujourd’hui d’avancer sur ce sujet pour enfin utiliser à bon escient les ressources allouées à l’autisme, lesquelles sont largement insuffisantes.

La prise en charge de l’autisme en France accuse quarante ans de retard : 44 % des personnes autistes sont encore victimes soit de mauvais traitements, soit de carences en matière de soins. La maltraitance reste donc la norme, comme l’a tristement rappelé le Comité des droits de l’enfant de l’ONU en février dernier. Les gouvernements successifs ont accumulé les « plans autisme ». Nous en sommes aujourd’hui au troisième. Mais quelles sont les avancées concrètes ?

Nous devons réallouer les moyens dévolus et les augmenter, afin de financer sur fonds publics des éducateurs spécialisés, pour permettre aux 80 000 enfants atteints d’autisme d’aller à l’école ou, à défaut, de recevoir une éducation adaptée. Nous devons stopper l’hémorragie des familles d’enfants autistes vers la Belgique, bien mieux dotée que la France en structures adaptées à la prise en charge de l’autisme. Nous devons dépister plus tôt, car plus la prise en charge est précoce, plus l’espoir d’une vie adulte normale ou quasi normale est grand.

Nous devons lutter contre les discriminations dont sont victimes les personnes autistes. Nous devons mettre en place un service d’informations national sur l’autisme. Nous devons développer les places en accueil temporaire pour les familles qui y ont recours lorsqu’elles sont au bord de l’épuisement ou pendant les fermetures des structures.

À cet égard, la Lozère, département emblématique pour la prise en charge des personnes en situation de handicap depuis plus de cinquante ans, grâce à l’action conjuguée de l’abbé Oziol et du docteur Jacques Blanc, ancien parlementaire, rapporteur de la loi de 1975, qui a pour la première fois reconnu la dignité de la personne handicapée, est disposée à développer de nouvelles réponses à l’autisme.

Ce département dispose de toutes les réponses de type ESAT – établissement et service d’aide par le travail –, MAS – maison d’accueil spécialisée –, foyer de vie, foyer-logement, et déjà de structures adaptées à l’autisme, notamment l’IME – institut médico-éducatif – Les Sapins, la MAS Les Bancels, le FAM – foyer d’accueil médicalisé – de Grandrieu et l’EEAP – établissement pour enfants et adolescents polyhandicapés – Les Genêts. Nombre d’expérimentations sont portées grâce aux actions conjuguées de Mmes Catherine Blond de l’ADAPEI – Association départementale de parents et d’amis des personnes handicapées mentales –, Josette Boissier, la maman de Jérôme que je connais bien, et Sylvie Breuil, directrice de structure, et des deux grandes associations que sont Le Clos du Nid et l’association de lutte contre les fléaux sociaux.

Je sais que cette proposition de résolution suscite des passions, voire des réactions très contradictoires. Elle a cependant le mérite de mettre en lumière un vrai problème que la France n’a pas totalement pris en considération : celui du monde de l’autisme, ce monde incompréhensible et imprévisible, où les bruits, la lumière, le toucher peuvent devenir des agressions.

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