Mais cette évolution révèle aussi la nécessité de recentrer l’état d’urgence sur son objectif initial de protection de la population face à la menace terroriste.
Nous le voyons, les prorogations successives de l’état d’urgence questionnent la nature même de ce dispositif juridique. Elles nous conduisent à nous interroger sur les conséquences de sa pérennisation comme sur son encadrement dans le temps. La question d’un meilleur encadrement de ce régime ne doit pas être éludée.
La succession des prorogations de l’état d’urgence peut conduire à des durées d’assignation à résidence excessives au regard du respect de la liberté d’aller et de venir. L’article 2 du projet de loi initial fixait à quinze mois la durée maximale de l’assignation à résidence d’une même personne. La commission des lois a suivi les préconisations du Conseil d’État en ramenant cette durée à douze mois, ce qui garantit un meilleur encadrement des assignations à résidence.
Enfin et surtout, la prorogation de l’état d’urgence ne peut se faire sans envisager ni préparer sa nécessaire fin. Nous devons à nos concitoyens un discours de vérité : non, l’état d’urgence ne permet pas d’éviter les attentats, ces derniers mois en ont malheureusement fait la terrible démonstration. Non, l’état d’urgence ne suffit pas à lui seul à faire face à cette menace sans précédent.
Lutter contre le terrorisme ne se fera pas en prorogeant indéfiniment un régime dérogatoire au droit commun qui ne constitue en définitive qu’une part de la réponse. La voie judiciaire est l’outil prééminent de la lutte antiterroriste : c’est dans le cadre d’un système permanent que notre pays doit inscrire cette lutte et s’adapter à la menace.