Intervention de Julien Dive

Séance en hémicycle du 13 décembre 2016 à 21h30
Prorogation de l'état d'urgence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dive :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la représentation nationale discute une fois de plus une prorogation de l’état d’urgence – la cinquième en treize mois. Nous faisons encore le constat amer et réaliste que la France ne peut pas baisser la garde face aux menaces d’attaques terroristes. Personne ne peut s’habituer à la peur. Personne ne peut s’habituer à voir des militaires déployés dans les rues, dans les transports en commun. Personne ne peut s’habituer à voir son sac fouillé à l’entrée des lieux ouverts au public. Et pourtant, depuis des mois, les Français font preuve d’un courage qui force l’admiration. Ils se sont montrés à la hauteur des exigences d’aujourd’hui, à la hauteur des événements. Mais la réponse politique, elle, a-t-elle été à la hauteur ?

L’état d’urgence était la réponse adéquate aux attentats du 13 novembre 2015 et du 14 juillet 2016. Chacun a compris que le danger pouvait venir de n’importe où, à n’importe quel moment. Mais si l’état d’urgence a permis d’agir vite après l’horreur, il ne saurait s’inscrire dans la durée. Nous allons de nouveau voter pour, mais cette fois, plus que jamais, en ayant conscience que l’état d’urgence permanent ne serait ni souhaitable ni même efficace sur le long terme. Proroger l’état d’urgence sans préparer sa fin implique de laisser les élus locaux toujours livrés à eux-mêmes pour assurer la sécurité de leurs administrés. Car c’est vrai, l’État ne peut pas tout. Des élus doivent parfois prendre des décisions à contrecoeur, aller à l’encontre de l’avis de la population, abandonner certaines traditions. Je pense à ces maires qui ont pris la décision d’annuler les feux d’artifice du 14 juillet, certaines fêtes populaires, ou encore la braderie de Lille – pour la première fois depuis soixante-dix ans ! Mais avec les fêtes de Noël qui arrivent, et les marchés traditionnels qui ont déjà ouvert depuis le début du mois, sommes-nous certains que l’état d’urgence renforce effectivement la sécurité de tous ?

Proroger l’état d’urgence sans imaginer y mettre fin suppose d’aggraver encore les conditions de travail des forces de l’ordre. Policiers et gendarmes, à qui je souhaite rendre hommage, sont surmenés, surmobilisés et épuisés par l’année qui vient de s’écouler : risques quotidiens d’attentat, crise migratoire, maintien de la sécurité lors de manifestations sociales ou sportives, et maintenant les fêtes de fin d’année. Sans oublier, car nous n’oublierons jamais, les attaques contre les dépositaires de l’ordre public, dans l’exercice de leurs fonctions, et même à leur domicile ! Dans ce contexte, le ministre de l’intérieur a pour seule proposition devant les caméras d’inviter chacun à adresser un sourire aux forces de l’ordre… Mais en écoutant cela, monsieur le ministre, je n’ai pas le coeur à vous sourire. Le Gouvernement devrait plutôt sérieusement songer à aider les forces de l’ordre en leur permettant notamment de prendre les temps de récupération auxquels ils ont droit ou de renouveler les équipements des commissariats de province.

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