Intervention de Olivier Dussopt

Séance en hémicycle du 14 décembre 2016 à 15h00
Statut de paris et aménagement métropolitain — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Dussopt :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, chers collègues, notre Assemblée entame aujourd’hui l’examen du projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain. Son intitulé résume les deux enjeux de ce texte. Premièrement, réformer l’architecture institutionnelle de Paris, ville-monde, métropole européenne et capitale d’un État au passé très centralisé. Son statut particulier est l’héritage d’une histoire mouvementée. Il s’agit ici de le moderniser. Le second enjeu vise à soutenir les politiques d’aménagement du territoire notamment à l’échelle de la métropole du Grand Paris et à créer de nouvelles métropoles pour mieux mailler le territoire.

Ce projet de loi poursuit donc la démarche de rationalisation de notre

organisation territoriale engagée depuis 2012, avec la loi MAPTAM ainsi qu’avec la loi NOTRe, en s’appuyant sur trois principes : inscrire les territoires dans une perspective commune de développement ; rénover la carte territoriale sans imposer d’uniformité institutionnelle sur tous les territoires et, surtout, faire confiance aux élus locaux.

Comme je le disais, le texte a pour principal objet une réforme du statut de Paris qui se décline autour de quatre axes.

Le premier axe constitue à moderniser le statut de Paris en fusionnant la commune de Paris et le département de Paris pour former, au 1er janvier 2019, une collectivité unique à statut particulier dénommée « Ville de Paris ». La fin de la dualité institutionnelle liée au maintien de l’échelon départemental sur le périmètre de la commune présente trois intérêts : accélérer la mise en place de guichets uniques et simplifier ainsi les démarches administratives ; faciliter la gestion municipale, avec l’instauration d’un budget unique ; rendre plus efficace et lisible la gouvernance de ce territoire.

Le deuxième axe vise à renforcer les missions des maires et des conseils d’arrondissement de Paris. Suivant la volonté des deux rapporteurs, et avec le soutien des députés de la majorité, ces dispositions ont été élargies aux communes de Marseille et de Lyon du fait de l’organisation administrative similaire des mairies d’arrondissement de ces trois villes. Ainsi, les conseils d’arrondissement pourront désormais approuver les contrats d’occupation du domaine public portant sur les équipements de proximité, même si nous avons exclu les équipements scolaires du champ des équipements de proximité.

L’article 16 donne la possibilité au maire d’arrondissement de donner son avis sur toute autorisation d’étalage ou de terrasse délivrée par le maire de Paris et concernant l’arrondissement. À l’initiative des députés de la majorité, en particulier de Sandrine Mazetier très impliquée sur ce texte, les espaces verts de proximité sont explicitement mentionnés comme équipements de proximité gérés par les mairies d’arrondissement ; ces dernières pourront également financer, via leur dotation d’investissement, des dépenses de petits équipements pour améliorer leur autonomie.

Enfin, la commission des lois a supprimé huit articles additionnels insérés au Sénat qui avaient pour vocation de dénaturer l’esprit de la loi PML en mettant à mal l’unité de la ville de Paris et en remettant en question les pouvoirs du maire de Paris. Je pense notamment à l’article 16bis B qui prévoyait la délégation par le maire de Paris au maire d’arrondissement de l’attribution des logements sociaux situés dans l’arrondissement – ce qui aurait empêché Paris de mener une politique de cohésion sociale et du logement à l’échelon de son territoire – ou à l’article 16 bis D qui donne la possibilité pour le maire d’arrondissement de conclure, à sa demande, une convention, au nom de la commune, avec une ou plusieurs communes limitrophes sur des sujets assez mal identifiés.

Le troisième axe vise à fusionner les quatre arrondissements centraux de Paris, à savoir les 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements. Les arrondissements ont été créés il y a maintenant plus d’un siècle et demi. Les écarts de population au sein des vingt arrondissements parisiens se sont accrus et ont désormais des conséquences majeures sur la représentation de leurs habitants au conseil de Paris. Rappelons les chiffres.

L’écart de population entre l’arrondissement le moins peuplé et celui le plus peuplé est passé de 3,9 en 1872, à 6,8 en 1954 et 13,9 en 2015. Le 1er arrondissement compte aujourd’hui 17 268 habitants contre 240 723 pour le 15e arrondissement. À titre de comparaison, l’écart de population entre l’arrondissement le moins peuplé et le plus peuplé est de seulement 2,8 à Lyon et de 3,3 à Marseille.

Si le niveau de représentation moyen s’élève à 13 679 habitants par conseiller de Paris pour l’ensemble du territoire, celui-ci varie de 10 871 habitants par conseiller dans le 2e arrondissement à 17 022 habitants par conseiller dans le 1er arrondissement, soit un écart par rapport au niveau moyen de représentation de plus 24 % pour le 1er arrondissement et de moins 21 % pour le 2e arrondissement.

La reconfiguration de la carte des arrondissements parisiens permet donc de respecter la jurisprudence constitutionnelle qui fixe à 20 % l’écart maximum à la moyenne de représentation constatée sur un territoire donné. L’article 17 permet en effet de réduire l’écart de population entre l’arrondissement le moins peuplé et celui le plus peuplé à 6,1 et de réduire également l’écart de représentativité entre moins 6 % et plus 9 %.

En commission des lois, les articles 17 à 20 ont été rétablis suite à leur suppression par les sénateurs. Ils entreront en vigueur à compter du prochain renouvellement des conseillers municipaux en 2020.

Le quatrième et dernier axe vise à renforcer les prérogatives du maire de Paris. Sur ce sujet, je tiens à préciser que si les rapporteurs et les députés de la majorité se félicitent du rééquilibrage opéré entre les compétences du préfet de police et celles du maire de Paris, ils ont rétabli la logique actuelle du partage de compétences, renversée au Sénat, en confiant au préfet de police une compétence générale de police et au maire de Paris des compétences d’attribution.

L’article 21 transfère ainsi, sauf exceptions, la police de la circulation et du stationnement au maire de Paris, mais également la majeure partie de la police de salubrité des bâtiments, la police des funérailles et des lieux de sépulture et la police des baignades. À l’initiative de nos deux rapporteurs, et toujours avec le soutien de la majorité, la disposition donnant au président du conseil régional la possibilité de déterminer les règles de circulation et de stationnement sur certains itinéraires, comme les voies sur berge, a été supprimée, et nous avions même dû réprimer un sourire à cette évocation.

La gestion des demandes et de la délivrance des cartes nationales d’identité et des passeports est transférée à la mairie de Paris, ainsi que le service public des fourrières.

Le titre II du projet de loi relatif à l’aménagement du territoire a été considérablement renforcé en commission. Ses articles ont notamment vocation à améliorer et développer les outils pour accélérer la réalisation des opérations d’aménagement.

L’article 34, par exemple, vise à simplifier les conditions dans lesquelles les établissements publics de l’État compétents en matière d’aménagement et de foncier peuvent créer des filiales, prendre ou céder des participations ; quant à l’article 35, il vise à encourager la mutualisation entre plusieurs établissements publics fonciers ou d’aménagement.

L’article 36 créé une nouvelle catégorie d’entreprises publiques locales dédiée à l’aménagement : les sociétés publiques locales d’aménagement d’intérêt national. En commission, nous sommes revenus au texte du projet de loi initial, ne partageant pas les craintes des sénateurs quant à une immixtion de l’État dans les opérations locales d’aménagement.

Certains articles portent sur des projets en particulier. L’article 35bis, inséré au Sénat à l’initiative du Gouvernement, vise à donner un statut pérenne à l’établissement public de coopération scientifique Condorcet ; l’article 37 modifie la composition du conseil d’administration de Grand Paris Aménagement, et l’article 38 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour créer un établissement public local chargé de l’aménagement, de la gestion et de la promotion du quartier d’affaires de La Défense.

À l’initiative des rapporteurs, six articles additionnels ont été adoptés en commission afin de faciliter l’achèvement des travaux du Grand Paris Express, notamment en élargissant les missions de la Société du Grand Paris à l’aménagement des abords de gare.

D’autres articles additionnels ont été votés pour corriger certaines lacunes de notre droit en matière de décentralisation ou pour tenir compte de certaines réalités locales.

Nous avons ainsi permis aux communes membres d’une communauté urbaine ou d’une métropole, ne disposant que d’un seul conseiller communautaire, de désigner un conseiller communautaire suppléant. L’article 44, voté en commission des lois, assouplit les conditions dans lesquelles peut être conclu un accord local pour fixer la composition de l’assemblée délibérante d’un EPCI en cas d’extension du périmètre de celui-ci ou de fusion de plusieurs EPCI. Une série d’articles concernant plus spécifiquement la métropole d’Aix-Marseille-Provence, permet de reporter à 2021 le transfert obligatoire de la compétence voirie à la métropole ou à 2018, le transfert de la compétence tourisme.

Je terminerai en évoquant l’article 41 du projet de loi. Il prévoyait initialement de créer quatre nouvelles métropoles autour de Saint-Étienne, Toulon, Dijon et Orléans. Cet article a été supprimé au Sénat et nous l’avons rétabli en commission en ajoutant trois nouvelles métropoles : Tours, Clermont-Ferrand et Metz. Notre pays devrait ainsi compter vingt-deux métropoles, contre quinze aujourd’hui.

Ce mouvement est positif, dans le sens où il est le signe d’une volonté d’approfondir l’intégration communautaire dans les grandes agglomérations de notre pays et il pose à terme la question de l’avenir et du rôle du département dans ces territoires. Toutefois, l’appellation « métropole » de cette catégorie d’EPCI ne doit pas nous leurrer : seule une poignée d’agglomérations de notre pays exerce aujourd’hui des fonctions métropolitaines au sens européen du terme. L’aménagement du territoire doit primer et c’est pourquoi nous sommes heureux de permettre à cette nouvelle agglomération d’accéder au statut de métropole et, ainsi, de participer à un meilleur maillage du territoire.

En conclusion et en résumé, ce projet de loi est porteur de modernité, d’innovation et de développement pour Paris et nombre de nos territoires. Le groupe socialiste le votera avec conviction.

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