Intervention de Georges Fenech

Réunion du 14 décembre 2016 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech, rapporteur :

Une nouvelle fois ce matin, je ne peux que me féliciter d'un travail qui a donné satisfaction à l'ensemble des acteurs de la justice. Les magistrats composant la cour de révision, que nous avons auditionnés, se sont ainsi dits très satisfaits de l'apport que constituait le regard croisé des différentes chambres de la Cour de cassation par rapport à la seule et unique vision de sa chambre criminelle. C'est, en effet, l'une des spécificités du dispositif que d'intégrer dans la cour de révision des magistrats autres que les pénalistes de la chambre criminelle.

Le deuxième point fort de cette réforme est la faculté accordée au parquet de faire droit aux demandes d'actes d'investigations complémentaires adressées par les condamnés définitifs et susceptibles de justifier la saisine de la cour de révision. C'est sans doute la plus grande avancée de ce texte. Elle a, en effet, permis d'ordonner de nouvelles expertises dans l'affaire « Omar Raddad » et de découvrir sur les scellés des traces d'un ADN qui n'était pas celui du condamné.

La loi du 20 juin 2014 est toutefois nécessairement imparfaite, comme tous les textes qu'adopte le législateur. Après avoir reçu et entendu ceux qui la mettent aujourd'hui en application, nous formulons cinq propositions.

La première, à laquelle nous tenons beaucoup, vise à compléter l'article 624-7 du code de procédure pénale afin de prévoir que les décisions de la cour de révision et de réexamen sont motivées. Nous avons renoncé à faire des propositions sur ce sujet s'agissant des cours d'assises, car nous n'avons pas suffisamment de recul par rapport à la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, qui traite de ce sujet.

Une deuxième proposition consiste à prévoir que l'irrégularité substantielle affectant la validité d'une preuve constitue un nouveau cas de recours en révision. Lors de son audition, Me Jean-Pierre Mignard a évoqué devant nous l'affaire « Mis et Thiennot », dans laquelle des informations postérieures au procès montraient que des aveux avaient été obtenus sous la contrainte et sous l'effet de coups. Cette proposition méritera d'être consacrée par le législateur.

La troisième proposition suggère que le procureur de la République se prononce sur la demande d'actes d'investigation dans un délai de deux mois renouvelable une fois, que ces actes doivent être réalisés dans un délai raisonnable à compter de l'acceptation de la demande, et que le procureur informe par écrit le requérant des actes réalisés.

Le condamné – c'est la quatrième proposition – pourrait déposer sa demande d'acte auprès du parquet de son choix dans le ressort de la cour d'appel dans lequel se trouve le parquet du lieu de condamnation. Nous avons été convaincus par l'argument selon lequel il peut être difficile pour le même parquet de se déjuger et d'être suffisamment motivé pour effectuer les actes nécessaires.

Cinquième et dernière proposition, l'avis de destruction des scellés devrait être envoyé au condamné et à son conseil afin qu'ils puissent émettre d'éventuelles objections.

Nous continuons d'espérer que l'évolution de la loi permettra de rectifier les erreurs judiciaires toujours possibles. Le nombre de décisions rendues en ce sens depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale est insuffisant. La procédure voulue par le législateur permet de donner davantage de place au contradictoire et à l'avocat, en garantissant un meilleur examen avec des regards croisés sur le dossier. Elle s'ouvre à de nouveaux requérants – enfants, petits-enfants, partenaires de pacs… – pour que la cour ne puisse pas être saisie uniquement par le garde de sceaux ou le condamné.

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