Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du 19 décembre 2016 à 16h00
Adaptation du deuxième cycle de l'enseignement supérieur français au système licence-master-doctorat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, madame la rapporteure, chers collègues, nous nous apprêtons aujourd’hui à inscrire dans la loi une disposition attendue depuis près de dix ans puisque le système licence-master-doctorat, introduit en France en 2002 conformément aux conclusions du processus de Bologne, n’a en réalité jamais été définitivement instauré.

Jusqu’à cette date, la sélection s’effectuait à bac + 4, après l’obtention de la maîtrise et avant un éventuel passage en DEA ou en DESS. Or cette scission entre les deux années de master n’a jamais cessé d’exister et les cursus de formation à l’université prévoient encore aujourd’hui une sélection entre le master 1 et le master 2.

Soucieux d’harmoniser l’offre de formation dans l’enseignement supérieur, nous soutenons depuis son lancement le modèle européen dit « LMD » et, par souci de cohérence, nous prônons un master articulé autour de quatre semestres.

Du fait de la multiplication des recours devant les tribunaux administratifs et les nombreux recours gracieux auxquels les universités répondent favorablement, la situation devenait intenable. Le récent décret adopté à la hâte par le Gouvernement n’a rien changé et nous courrions le risque de déstabiliser l’ensemble de l’offre de formation délivrée par les universités.

Mes chers collègues, depuis de trop nombreuses années, l’absence de volonté politique face à cette situation déplorable cache en réalité un tabou : celui de la sélection dans l’enseignement supérieur. Alors que les négociations étaient au point mort, nous devons beaucoup à l’initiative de notre collègue Jean-Léonce Dupont, qui a enfin pris ce problème à bras-le-corps, ce qui a sans aucun doute encouragé le Gouvernement à accélérer la concertation.

La proposition de loi déposée initialement au Sénat prévoyait ainsi une sélection à l’entrée du deuxième cycle, c’est-à-dire du master 1, laissant aux universités le soin de définir les capacités d’accueil en première année.

Mue par la volonté d’intégrer la « position commune » entre les syndicats étudiants et les universités, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat a ensuite sensiblement modifié le texte.

Si la procédure de sélection à l’entrée en master 1 reste proche de la première version, le Sénat a malheureusement introduit, de manière insidieuse, un « droit à la poursuite d’études ». Il faut en avoir conscience. En effet, la proposition de loi prévoit désormais que s’ils en font la demande, les titulaires d’une licence non admis en master 1 se verront proposer une inscription dans une formation du deuxième cycle en tenant compte de leur projet professionnel et de l’établissement dans lequel ils ont obtenu leur licence.

Nous craignons que ce nouveau droit conduise à l’engorgement des rectorats. Jusqu’à présent, il revenait aux étudiants de mener les démarches pour trouver un master correspondant à leur projet et à leurs aptitudes. Or demain, n’importe quel étudiant n’aura plus qu’à déposer un dossier dans un master et attendre une décision de refus. Le rectorat fera ensuite les démarches nécessaires pour lui trouver une formation, même plusieurs, qu’il sera obligé d’accepter.

Compte tenu de ce qu’a de précaire et de potentiellement hasardeux le fait d’inscrire dans la loi un tel droit, nous souscrivons à la volonté du rapporteur du Sénat d’y adjoindre un dispositif d’évaluation. En effet, seule la pratique nous éclairera sur la portée de ce dispositif.

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