Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, nous aurions aimé nous inscrire dans la continuité des discours de la ministre, de la rapporteure et du président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, mais pour nous, il y a un écueil, et il est de taille.
Vous avez dit tout à l’heure, monsieur le président de la commission, que le texte avait été « opportunément enrichi ». C’est là que nous ne pouvons plus vous suivre. Dans la parfaite logique du système LMD, cette proposition de loi prévoyait d’autoriser la mise en place d’une sélection des étudiants à l’entrée en M1. Lors de son examen au Sénat, elle a été modifiée par un amendement du groupe socialiste pour intégrer l’accord négocié entre le Gouvernement, la CPU et les syndicats étudiants, et donc le droit à la poursuite d’études en master.
Le texte initial comportait bien une réforme attendue, qui exigeait un certain courage politique. Vous avez eu ce courage, monsieur le secrétaire d’État : « Pour moi, avez-vous dit, la sélection n’est pas un gros mot. » Vous ajoutiez : « La loi doit rendre possible une sélection en master 1. » Vous avez immédiatement été recadré par Mme la ministre, qui a préféré le mot « recrutement » au mot « sélection ». Ce n’est pas une question de sémantique : il s’agit de donner aux étudiants toutes les chances de réussir leur insertion professionnelle. Nous sommes aujourd’hui dans le contexte d’une concurrence internationale acharnée ; la spécialisation et la professionnalisation feront du master l’un des diplômes les plus efficaces pour intégrer le marché du travail.
Dans cette « sélection-orientation » évoquée par Emeric Bréhier et Yves Durand, il y aura des masters prisés et recherchés et des masters au rabais ; ou alors nous aurons dans un même master des étudiants qui ont été sélectionnés et des étudiants qui se retrouvent là sur proposition du rectorat, dans le cadre des trois propositions que celui-ci devra faire à tous les recalés. Où est l’égalité là-dedans ? Nous estimons que ce que propose aujourd’hui ce texte est la porte ouverte à d’incroyables complexités ; nous déplorons la place d’une véritable usine à gaz. C’est pourquoi nous défendrons un certain nombre d’amendements sur ce texte qui arrive en urgence, en fin de quinquennat et à la veille de Noël.