Intervention de Francis Eustache

Réunion du 14 décembre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Francis Eustache, neuropsychiatre, directeur d'études à l'école pratique des hautes études et à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, coresponsable scientifique du programme « 13 novembre » :

Il s'agit du trouble de stress post-traumatique. Plusieurs acronymes sont utilisés. Dans la littérature, on trouve très fréquemment PTSD pour post-traumatic stress disorder, qui a été traduit en français par syndrome de stress post-traumatique. Désormais, on parle de TSPT, trouble de stress post-traumatique, expression employée dans la classification admise, qui vient de la classification américaine des maladies psychiatriques, le DSM-5 – cinquième édition du Diagnostic and statistical manual of mental disorders.

Nous allons suivre ces personnes pendant six ans. À chaque temps de l'étude, elles viennent à Caen pour une visite de deux jours, au cours de laquelle elles subissent une série d'examens : le premier jour, après une visite médicale d'inclusion avec un médecin psychiatre, des examens psychopathologiques très approfondis, puis des examens neuropsychologiques qui portent sur les mécanismes de contrôle mnésique et de contrôle attentionnel ; le deuxième jour, des examens du cerveau par IRM, notamment des examens très précis par IRM anatomique qui permettent de mesurer la connectivité fonctionnelle du cerveau, ainsi que des examens qui permettent, grâce à un paradigme que nous avons élaboré, de mesurer les substrats cérébraux des intrusions mnésiques.

Car le coeur du syndrome, c'est la difficulté qu'ont les personnes à refréner des images intrusives. Il s'agit de certains éléments de la scène traumatique, extrêmement émotionnels, qualifiés de vivaces – vivid –, qui s'imposent à la personne, la harcèlent en quelque sorte. À la différence des souvenirs, le sujet a l'impression de les vivre au présent. Il va développer des stratégies pour essayer de mettre ces images à l'écart, ce qui est, bien sûr, difficile. Grâce à notre paradigme, nous mesurons, en quelque sorte, le rapport de forces entre ces intrusions qui s'imposent à la personne et la capacité qu'elle a à les refréner.

Nous nous efforçons de rendre le séjour de deux jours à Caen le plus agréable possible pour ces personnes. Nous bénéficions à cette fin du soutien de la région Normandie et de la mairie de Caen, qui met à disposition des voitures avec chauffeur. Tout cela a l'air simple, mais, pour ces personnes il est souvent difficile d'aller dans les studios de l'INA pour témoigner, puis de venir à Caen pendant deux jours : il faut s'organiser, quitter le domicile familial, emprunter les transports, dormir à l'hôtel… Dans le même temps, cette démarche est très importante : elle contribue dans une certaine mesure à leur reconstruction.

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