COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mercredi 21 décembre 2016
La séance est ouverte à neuf heures quarante.
(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)
La commission des Affaires culturelles et de l'Éducation procède à l'audition sur le programme de recherche « 13 novembre » de :
– M. Denis Peschanski, historien, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique, coresponsable scientifique du programme ;
– M. Francis Eustache, neuropsychiatre, directeur d'études à l'École pratique des hautes études et à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, coresponsable scientifique du programme ;
– Mme Carine Klein, ingénieure de recherche au Centre national de la recherche scientifique, secrétaire générale du programme.
Madame, Messieurs, je suis heureux de vous accueillir, au nom de notre commission, pour cette présentation du programme de recherche « 13 novembre ».
Ce programme transdisciplinaire, conduit principalement par le CNRS et l'INSERM mais impliquant aussi d'autres partenaires, s'intéresse avant tout à la construction de la mémoire. Prévu sur douze ans, il est destiné à recueillir et analyser les témoignages de 1 000 personnes touchées par les attentats du 13 novembre 2015. Il vise à étudier la construction mémorielle, l'articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective, ainsi que l'évolution des souvenirs traumatiques.
Ce programme a retenu toute mon attention en tant que député et ancien maire du 11e arrondissement de Paris, mais m'a également interpellé en tant que président de notre commission, dont le domaine de compétence comprend le vaste domaine de la recherche. Il m'a donc semblé opportun et utile de vous convier ce matin devant notre commission, madame, messieurs, avec l'accord unanime et le soutien de son bureau, afin que vous nous présentiez ce programme et ses enjeux mémoriels, scientifiques et citoyens. Votre présence à l'Assemblée nationale n'est pas un hasard : le programme que vous dirigez et animez est innovant à tous égards, inédit dans sa forme comme dans sa dimension temporelle. Il est, oserais-je dire, historique.
Je remercie votre commission pour son accueil. C'est pour nous un très grand honneur de pouvoir vous présenter ce programme, qui est effectivement, sans que nous l'ayons vraiment cherché, une première mondiale par sa diversité et son ampleur.
Cette recherche trouve sa source dans une réflexion que nous avions lancée aux États-Unis en 2008-2009 sur la mémoire de la Deuxième Guerre mondiale et des attentats du 11 septembre 2001. Notre postulat était très simple : il était impossible de comprendre ce qui se passait dans la mémoire collective – laquelle relève de mon domaine d'étude – sans s'interroger sur les dynamiques cérébrales de la mémoire ; inversement, il était impossible de comprendre pleinement ce qui se passait dans le cerveau – l'imagerie par résonance magnétique (IRM) a constitué une révolution à cet égard – sans prendre en compte l'impact du social.
Nous avons monté un premier programme franco-américain de trois ans avec le soutien du Partner University Fund, géré par l'ambassade de France aux États-Unis et la Fondation French-American Cultural Exchange. Puis, nous avons été retenus dans le cadre du grand emprunt pour un programme de dix ans, l'équipement d'excellence (Equipex) Matrice. Enfin, il nous est apparu évident et nécessaire de lancer ce programme « 13 novembre » très peu de temps après les attentats, en réponse à un appel du président du CNRS, M. Alain Fuchs.
Le programme « 13 novembre » s'étendra sur douze ans. Son caractère transdisciplinaire est essentiel. Il est assez rare qu'un historien et un neuropsychologue copilotent un programme de recherche : en général, la pluridisciplinarité consiste à faire travailler ensemble un historien et un sociologue, ce qui n'est d'ailleurs pas toujours simple. En l'espèce, il s'agit moins de mobiliser différentes disciplines pour traiter des questions posées dans une discipline donnée que de travailler en commun à la définition même de l'objet d'étude. Cet objet est non pas l'événement lui-même, les attentats du 13 novembre, mais la mémoire de cet événement traumatique et la construction de cette mémoire, année après année. Notre travail est fondé sur le recueil et l'analyse de témoignages, l'objectif étant de comprendre l'articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective, de même que dans les deux programmes précédents.
J'évoquerai quelques aspects organisationnels et budgétaires du programme.
Comme pour tous les projets présentés dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA), nous avons soumis au Commissariat général à l'investissement (CGI), le 10 mars 2016, un document scientifique et un document financier, résultat du travail intensif réalisé au cours des quatre mois précédents par les chercheurs des différentes disciplines et l'équipe administrative.
Dans le document scientifique, nous avons décrit toutes les étapes du programme « 13 novembre » de 2016 à 2028, donc non seulement la phase initiale de collecte des données, d'entretiens audiovisuels et d'études biomédicales en 2016 et 2017, mais aussi les étapes suivantes en 2018, en 2021 et en 2026. Dans le document budgétaire, nous avons prévu un budget en coût complet de 20 millions d'euros, dont 10 millions demandés au CGI, 4 millions provenant de subventions et 6 millions apportés par différents partenaires.
Le 8 avril 2016, nous avons eu communication de la décision du Premier ministre de doter la phase initiale du programme de 2 millions d'euros. La convention attributive d'aide nous a été notifiée par l'Agence nationale de la recherche (ANR) le 15 avril. Nous savions dès lors que nous pourrions mettre en oeuvre le programme établi par les chercheurs.
Les bénéficiaires des fonds sont les cinq partenaires les plus impliqués dans la phase de collecte des données : le CNRS, l'INSERM, l'Institut national de l'audiovisuel (INA), l'Établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense (ECPAD) et l'agence nationale Santé publique France (SPF). Le CGI transfère les fonds à l'ANR, qui les transfère à son tour à la communauté d'universités et d'établissements Hautes écoles Sorbonne Arts et métiers (HESAM), située à Paris – le circuit financier est le même que pour l'Equipex Matrice. Nous avons déposé toutes les annexes financières requises à l'ANR le 10 juin 2016.
Nous avons lancé quatre protocoles de recherche pour 2016 et 2017 : l' « étude 1 000 », l'étude « Remember » – que Francis Eustache va vous présenter –, l'enquête de santé publique post-attentats du 13 novembre (ESPA 13 novembre) – sur laquelle je reviendrai ultérieurement – et une enquête sur échantillon représentatif en lien avec la Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC).
L'« étude 1 000 » consiste, comme son nom l'indique, à recueillir et analyser le témoignage de 1 000 personnes qui ont été touchées de près ou de loin par les attentats. Notre objectif est de comprendre comment la mémoire de cet événement traumatique se construit chez les Français. Ces 1 000 personnes se répartissent en quatre cercles. Le cercle 1 comprend des personnes directement exposées aux attentats, qu'il s'agisse des survivants, des familles endeuillées, des témoins ou des intervenants extérieurs, notamment des agents des services de santé, des policiers, des hommes politiques et des magistrats. Il était essentiel de se concentrer sur ce premier groupe, mais nous ne pouvions pas nous y limiter. Le cercle 2 rassemble des habitants des quartiers où se sont déroulés les attentats ; ils n'y ont pas été directement exposés, mais sont confrontés constamment à cette histoire et à sa mémorialisation. Le cercle 3 regroupe des habitants du reste de la métropole parisienne, et le cercle 4 des habitants de trois villes de province, Caen, Metz et Montpellier.
L'idée – c'est un défi supplémentaire – est d'organiser quatre campagnes d'entretiens avec les mêmes 1 000 personnes, cette année, dans deux ans, dans cinq ans et dans dix ans, afin d'étudier la manière dont la mémoire se consolide et se reconsolide au fur et à mesure, ou se construit et se reconstruit, pour reprendre le vocabulaire propre à chacune de nos disciplines.
Ainsi que je l'ai indiqué précédemment, notre approche est résolument transdisciplinaire : elle associe la sociologie, l'histoire – je suis historien du temps présent, mais il s'agit d'un temps présent en train de se construire, ce qui constitue un défi épistémologique assez original –, la textométrie – à savoir l'analyse statistique du vocabulaire –, l'informatique et les mathématiques – les équipes de l'INA, notamment, ont lancé un travail très innovant pour analyser les tweets et les échanges sur les réseaux sociaux –, le droit – une thèse sur l'indemnisation des victimes est en cours –, les neurosciences – Francis Eustache y reviendra –, l'éthique – à laquelle nous sommes particulièrement attachés – et les questions de santé publique – il était indispensable de mener une étude épidémiologique sur le syndrome post-traumatique.
Les entretiens individuels sont, pour l'essentiel, des entretiens filmés, réalisés par l'INA et l'ECPAD avec un très grand professionnalisme. Ils durent en moyenne trois heures pour les personnes du cercle 1, deux heures pour les autres, et fournissent une matière d'une richesse absolument exceptionnelle – j'ai moi-même recueilli une trentaine de témoignages, certains collègues en ont recueilli cinquante ou soixante. Le dispositif est complété par des entretiens hors caméra. Les fichiers audiovisuels sont archivés par l'INA et mis à la disposition des chercheurs dans des conditions très sécurisées.
Le bilan chiffré que nous avons établi montre que le défi a été relevé : à ce jour, nous avons recueilli 924 témoignages sur les 1 000 prévus ; il nous en reste donc un certain nombre à recevoir, notamment ceux de députés – la balle est dans votre camp. Ces 924 entretiens ont été réalisés entre le 9 mai et le 8 décembre 2016 à Paris et en Île-de-France, à Caen, à Metz et à Montpellier. Dans la mesure où nous ne partions d'aucune liste, le travail de repérage a été considérable. Tous les participants sont volontaires. Une véritable confiance s'est installée avec eux.
Deuxième bonne surprise : nous nous demandions si nous serions capables de convaincre les personnes du cercle 1, notamment celles qui souffrent d'un syndrome post-traumatique ou de pathologies de la mémoire, de nous apporter leur témoignage ; or elles ont été plus nombreuses à franchir le pas que nous ne pouvions l'imaginer. Ainsi, nous avons mené des entretiens filmés avec 365 personnes du cercle 1, dont plus d'une centaine de survivants des attentats du Bataclan, des survivants des attentats commis sur les terrasses et à Saint-Denis, des policiers – nous avons bénéficié du soutien de la préfecture de police de Paris et 80 d'entre eux ont accepté de nous donner leur témoignage –, des pompiers et des agents des services de santé. Il s'agit d'un résultat très important pour nous, notamment pour Francis Eustache et ses collègues qui travaillent sur le syndrome post-traumatique et la résilience.
De manière classique, les participants sont davantage des femmes que des hommes. Néanmoins, la proportion d'hommes est supérieure à celle que nous constatons habituellement dans les travaux de recherche de cette nature.
À côté de cette étude consistant à recueillir et analyser le témoignage de 1 000 personnes volontaires, nous avons voulu avoir une idée de l'évolution de l'opinion publique et des comportements. D'où l'enquête sur échantillon représentatif menée avec le CREDOC : nous avons obtenu l'insertion de onze questions spécifiques sur la mémorisation et la perception des attentats du 13 novembre dans l'édition de juin et juillet 2016 du questionnaire semestriel du CREDOC. Ce travail a donné lieu à un document passionnant de 120 pages qui sera publié prochainement.
Je remercie à mon tour votre commission de nous accueillir. C'est un grand honneur pour nous.
Quelques mots, d'abord, sur le contexte général : cela fait une dizaine d'années que Denis Peschanski, Carine Klein, moi-même et un certain nombre de collègues, notamment américains, travaillons ensemble sur la mémoire des attentats du 11 septembre 2001 et de la Deuxième Guerre mondiale, en particulier au Mémorial de Caen, où est installée une partie de l'Equipex Matrice. Cela nous a permis de mettre au point des concepts et des méthodologies. Si nous n'avions pas eu cette habitude de travail commun, nous n'aurions pas pu mettre en place ce programme aussi rapidement après le 13 novembre.
Ainsi que Denis Peschanski l'a évoqué, notre objectif était de construire un programme coordonné s'appuyant sur plusieurs études. Nous voulions qu'il y ait notamment une étude biomédicale, au sens strict du terme, dédiée au trouble de stress post-traumatique. Forts du soutien des deux grandes institutions de recherche directement concernées, le CNRS et l'INSERM – après avoir rencontré M. Alain Fuchs, président du CNRS, nous avons été reçus dans les jours suivants par M. Yves Lévy, président-directeur général de l'INSERM, qui nous a immédiatement assurés de son appui –, nous avons pu lancer le programme très vite, dès le début de l'année 2016. Ensuite, nous avons adressé notre demande au CGI, ainsi que l'a rappelé Carine Klein, et obtenu d'autres soutiens.
L'étude « Remember » est une étude ancillaire de l' « étude 1 000 ». Elle est menée à Caen, dans mon laboratoire, qui dépend de l'INSERM, de l'EPHE et de l'université de Caen-Normandie, et dans le Centre d'imagerie et de recherches en neurosciences CYCERON, que je dirige. Il s'agit d'un des grands centres de recherche français en imagerie cérébrale, créé il y a près de trente-cinq ans, lorsqu'a été lancée la médecine nucléaire, notamment la tomographie par émission de positons.
L'étude portera sur environ 200 personnes volontaires, 120 personnes issues du cercle 1, qui ont été exposées aux attentats commis au Bataclan ou sur les terrasses, et 76 personnes issues du cercle 4, venant de Caen, qui constituent le groupe contrôle. Les 120 sujets du cercle 1 se répartissent en deux sous-groupes, que nous faisons en sorte d'apparier : celles qui sont toujours en état de stress post-traumatique et présentent des troubles psychiques sévères ; celles qui, après avoir subi ce stress aigu, ont développé des mécanismes de résilience et vont désormais mieux. Nous avons recruté les trois quarts des sujets de l'étude ; nous aurons terminé le recrutement à la fin du mois de février 2017. Précisons que le chiffre de 200 est théorique : nous pensons qu'il y aura in fine environ 180 sujets pour lesquels les données seront exploitables du point de vue scientifique, car il faut notamment qu'il n'y ait pas de « bougés » sur les images obtenues par IRM.
Nos objectifs sont, d'une part, d'identifier le retentissement du TSPT au niveau du fonctionnement cérébral, en mesurant l'activité du cerveau chez ces personnes, et, d'autre part, d'identifier des marqueurs prédictifs de l'évolution du TSPT.
Il s'agit du trouble de stress post-traumatique. Plusieurs acronymes sont utilisés. Dans la littérature, on trouve très fréquemment PTSD pour post-traumatic stress disorder, qui a été traduit en français par syndrome de stress post-traumatique. Désormais, on parle de TSPT, trouble de stress post-traumatique, expression employée dans la classification admise, qui vient de la classification américaine des maladies psychiatriques, le DSM-5 – cinquième édition du Diagnostic and statistical manual of mental disorders.
Nous allons suivre ces personnes pendant six ans. À chaque temps de l'étude, elles viennent à Caen pour une visite de deux jours, au cours de laquelle elles subissent une série d'examens : le premier jour, après une visite médicale d'inclusion avec un médecin psychiatre, des examens psychopathologiques très approfondis, puis des examens neuropsychologiques qui portent sur les mécanismes de contrôle mnésique et de contrôle attentionnel ; le deuxième jour, des examens du cerveau par IRM, notamment des examens très précis par IRM anatomique qui permettent de mesurer la connectivité fonctionnelle du cerveau, ainsi que des examens qui permettent, grâce à un paradigme que nous avons élaboré, de mesurer les substrats cérébraux des intrusions mnésiques.
Car le coeur du syndrome, c'est la difficulté qu'ont les personnes à refréner des images intrusives. Il s'agit de certains éléments de la scène traumatique, extrêmement émotionnels, qualifiés de vivaces – vivid –, qui s'imposent à la personne, la harcèlent en quelque sorte. À la différence des souvenirs, le sujet a l'impression de les vivre au présent. Il va développer des stratégies pour essayer de mettre ces images à l'écart, ce qui est, bien sûr, difficile. Grâce à notre paradigme, nous mesurons, en quelque sorte, le rapport de forces entre ces intrusions qui s'imposent à la personne et la capacité qu'elle a à les refréner.
Nous nous efforçons de rendre le séjour de deux jours à Caen le plus agréable possible pour ces personnes. Nous bénéficions à cette fin du soutien de la région Normandie et de la mairie de Caen, qui met à disposition des voitures avec chauffeur. Tout cela a l'air simple, mais, pour ces personnes il est souvent difficile d'aller dans les studios de l'INA pour témoigner, puis de venir à Caen pendant deux jours : il faut s'organiser, quitter le domicile familial, emprunter les transports, dormir à l'hôtel… Dans le même temps, cette démarche est très importante : elle contribue dans une certaine mesure à leur reconstruction.
L'ESPA « 13 novembre » est une étude épidémiologique de santé publique par « web questionnaire », prise en charge principalement par Santé publique France. Au total, 1 412 personnes ont répondu à l'appel et rempli ce web questionnaire. Une première étude analogue avait été faite après les attentats de janvier 2015. Nous disposerons bientôt des résultats de cette deuxième étude. Il n'y avait pas de dimension relative à la santé publique dans nos programmes précédents, même si nous abordions déjà la question du syndrome post-traumatique et de la résilience. Il nous a paru absolument essentiel d'avoir cette approche complémentaire dans le programme « 13 novembre ».
D'une manière générale, le coeur de notre questionnement de recherche porte sur l'articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective lorsque les personnes sont confrontées à des événements traumatiques. C'est précisément sur cette articulation que nous nous posons tous des questions, en tant qu'historiens, neuroscientifiques, juristes ou sociologues.
Conformément au souhait de MM. Fuchs et Lévy, le CNRS et l'INSERM sont les porteurs scientifiques du programme, l'HESAM en étant le porteur administratif. D'autres partenaires apportent une contribution importante soit au programme « 13 novembre », soit à l'Equipex Matrice, soit aux deux.
À ce stade, huit laboratoires de recherche sont associés au programme, ce qui illustre la diversité des disciplines concernées. Deux autres laboratoires pourraient nous rejoindre à l'avenir.
Nous bénéficions d'un soutien exceptionnel de la part des ministères, de la préfecture de police de Paris, de la région Normandie et des mairies, notamment celle de Caen. La présente audition est un témoignage supplémentaire de cet intérêt des pouvoirs publics. Nous sommes aussi particulièrement touchés du soutien que nous manifestent les associations de victimes. Les victimes qui ont témoigné dans le cadre du programme sont, je tiens à le dire, de belles personnes.
Notre démarche revêt une dimension citoyenne : ainsi que le CNRS l'a souhaité, nous répondons aux attentats avec nos armes, celles de la connaissance et de la recherche. Le programme « 13 novembre » a été retenu dans le cadre de l'appel à propositions « CNRS attentats-recherche ». D'autre part, nous avons été très honorés de recevoir, il y a quelques jours, le prix Pierre-Simon « Éthique et société ». Les chercheurs ont aussi une mission sociale et citoyenne. Pour Francis Eustache et moi, qui avons déjà une certaine expérience de la recherche, il était fondamental de comprendre comment la mémoire se construit ou se reconstruit, comment le processus de résilience pouvait se faire après les attentats du 13 novembre.
Merci, madame, messieurs, pour vos explications claires et synthétiques, qui nous permettent d'appréhender l'ampleur de ce programme de recherche, inédit notamment par sa durée et par le nombre de personnes suivies. Vous me l'aviez présenté il y a quelques mois, monsieur Peschanski ; il était de ma responsabilité de le faire connaître davantage. La question de l'articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective, en particulier, interpelle tous les membres de notre commission.
Nous nous rappelons tous où nous étions le 7 janvier 2015 au matin lorsque, aux alentours de midi, nous avons appris que la rédaction de Charlie Hebdo avait été attaquée. Nous nous souvenons tous des jours qui ont suivi, de l'attaque de Montrouge et de l'Hyper Cacher, jusqu'au dénouement à Dammartin-en-Goële. Les mêmes souvenirs nous suivent pour ce soir de fête nationale à Nice. Nous n'oublions pas non plus les actes barbares de Saint-Quentin-Fallavier, Magnanville et Saint-Étienne-du-Rouvray, ni ceux perpétrés chez nos voisins.
Votre programme de mémoire s'intéresse tout particulièrement à un soir d'attentat. Nous nous rappelons tous, sans doute plus qu'aucun autre événement, où nous étions et ce que nous faisions le soir du 13 novembre et dans la nuit qui a suivi lorsque nous avons appris l'ampleur du drame qui avait eu lieu à Paris et à Saint-Denis, ne trouvant pas les mots pour traduire notre effroi devant l'ignominie de tels attentats. Cette mémoire vive est due à de multiples facteurs dont, sans doute, la violence, la méthode utilisée, le symbole d'une jeunesse libre arrachée à son destin, ou encore la durée de l'attaque, qui a généré de nombreuses images.
Le terrorisme que nous connaissons impacte la société dans sa dimension collective, mais également chaque individu qui la compose. Le programme « 13 novembre » est hors du commun, et je veux saluer l'initiative conjointe du CNRS et de l'INSERM, suite à l'appel d'Alain Fuchs au recueil des témoignages et à l'étude de la mémoire individuelle et collective après les attentats. Vous évoquez ces attaques comme des actes traumatisants au-delà de l'imaginable, et la construction de la mémoire est à analyser.
Des centaines de personnes sont interrogées dans le cadre de votre programme d'une ampleur exceptionnelle, nécessaire pour prendre la mesure des nuances. Le panel est imposant, mais aussi la durée de l'étude puisqu'elle durera douze ans.
Vous avez constitué quatre cercles de proximité par rapport à ces attentats, afin d'appréhender la mémoire en fonction du degré de vécu dans les attaques.
Le programme fait appel à de nombreuses disciplines, que vous avez évoquées. Dès le départ, l'État s'est engagé à vos côtés pour accompagner le programme, et 2 millions d'euros ont été débloqués via le programme d'investissements d'avenir (PIA) pour vous permettre d'amorcer vos travaux.
Ma première question porte sur la place du témoin. Lorsque vous avez évoqué les cercles de témoignages, cela m'a fait penser aux travaux issus de la Première Guerre mondiale, dans lesquels des cercles de deuil avaient permis de décrire la façon dont le phénomène de « brutalisation » avait affecté l'ensemble de la société.
La manière d'appréhender le témoin a changé. Les témoignages sur la Première et la Deuxième Guerre mondiale n'ont pas été recueillis de la même façon. Vous avez adjoint les neurosciences à votre programme, vous avez parlé d'images de l'INA, étudié l'effet des réseaux sociaux. Comment, en tant que scientifique, appréhendez-vous cette mutation ?
Ma deuxième question concerne la place de la recherche française. Dans cette commission, nous sommes attentifs à la place de la recherche française dans le monde. Vous avez fait allusion à la recherche menée sur les attentats du 11 septembre 2001. Je viens d'évoquer moi-même la recherche que vous avez faite, monsieur Peschanski, sur les deux guerres mondiales. Pensez-vous que vos travaux sur les attentats du 13 novembre peuvent offrir à la France la possibilité de drainer un réseau de chercheurs sur ces sujets ?
Ma troisième question porte sur la place du politique. Vous parlez de mémoire individuelle et collective face à ces événements traumatisants. Aujourd'hui, nous avons peu de recul par rapport au 13 novembre. Mais comment, selon vous, la mémoire officielle, portée par le politique au sens large, va-t-elle s'immiscer entre mémoire individuelle et mémoire collective ?
Ma dernière question concerne la place du citoyen. Vous avez terminé votre propos en évoquant les armes de la connaissance et de la recherche. Nous avons ressenti beaucoup d'émotion dans votre propos. Comment avez-vous, en tant que chercheur citoyen, appréhendé ce sujet ?
Enfin, pour aborder le sujet plus trivial du financement, il faudra peut-être rechercher dans le PIA 3 les armes financières qui vous permettront de poursuivre ce travail passionnant.
Les attentats de 2015 et 2016 ont laissé dans la mémoire collective des images terribles et indélébiles.
Si j'ai bien compris, les questions auxquelles le programme « 13 novembre » veut répondre sont les suivantes : comment le souvenir traumatique des attentats du 13 novembre 2015 évolue-t-il dans les mémoires individuelles et collectives ? Comment les mémoires individuelles et collectives interagissent-elles dans leur construction et leur reconstruction ?
Dans cette commission, nous nous préoccupons également de tout ce qu'il se passe dans les médias. Votre étude prévoit-elle de compléter les entretiens par une analyse du traitement des événements par les médias, qui a probablement un rôle significatif dans la construction de la mémoire collective ?
Quels sont les survivants ou témoins qui développeront un état de stress post-traumatique durable, et quels sont ceux qui élaboreront des mécanismes de résilience ?
La singularité du projet proposé tient à la diversité des enjeux à relever et à leur imbrication : enjeux épistémologiques, méthodologiques et patrimoniaux.
Vous avez affirmé la transdisciplinarité de vos travaux et mentionné le programme franco-allemand pour comprendre la mémoire collective, en prenant en compte les dynamiques cérébrales de la mémoire.
Vous voulez promouvoir une démarche scientifique dans la contemporanéité de l'événement. Vous avez évoqué votre méthode consistant à procéder par cercles pour les témoins confrontés de près ou de loin à ces événements dramatiques : policiers, témoins directs et indirects. D'où ma deuxième question. Suite aux attentats, les personnes des deux premiers cercles – victimes et habitants de la zone concernée – ont été très sollicitées par les médias, les associations etc. Comment votre étude scientifique a-t-elle été reçue par les personnes ciblées ?
On peut comprendre les conséquences médicales pour les personnes directement confrontées à l'horreur d'un attentat, de même qu'on peut comprendre le stress post-traumatique à des degrés différents. Vous avez évoqué des troubles psychiques sévères pour tous les individus ayant été exposés à des situations traumatisantes. L'étude prévoit-elle de comparer la résilience des personnes suivies par rapport à leur entourage ? Autrement dit, y a-t-il un environnement favorable, ou défavorable, à la résilience ?
Le groupe Les Républicains apprécie cette mise en oeuvre longitudinale sur dix ans de votre programme de recherche. Suite aux événements, notamment de Paris et de Nice, nous avons bien noté la mobilisation du CNRS sur ce sujet.
Je remercie le président Bloche de nous avoir proposé la présentation de cette étude. J'espère, monsieur Peschanski, que vous pourrez apporter des réponses aux questions posées à nos sociétés par cette série d'attentats meurtriers.
Nous sommes à la fois heureux et curieux de découvrir votre ambitieux programme, dont l'objet et l'ampleur inédits sont véritablement fascinants : 1 000 personnes interrogées, quatre fois chacune en douze ans. Le chantier est immense, alors que plus de 2 000 heures de vidéos ont déjà été collectées.
Comme vous le donnez à entendre, il n'y a pas un Bataclan, mais cent Bataclans, décrits par les 100 personnes interviewées : la mémoire n'est pas la même en fonction des personnes et le champ des memory studies qui s'ouvre à nous donne le tournis. Le choix de mettre l'humain au centre est très novateur en allant chercher l'information au coeur des émotions, des souvenirs intenses et des cauchemars. Comment transformer ces témoignages en données, qui pourront ensuite être analysées par la communauté scientifique ? En d'autres termes, comment passer de l'émotion à la donnée ?
J'ai lu que vous aviez déjà travaillé, il y a une dizaine d'années, dans le cadre d'un programme franco-américain, sur l'importance de tenir compte de l'évolution de la mémoire. Nous pouvons imaginer que c'était dans le cadre du 11 septembre, acte traumatique à l'effet de sidération maximal, qui fait que chacun de nous se rappelle précisément où il était ce jour-là. Quelles seront, selon vous, les différences entre le peuple français et le peuple américain dans leur appréhension de ces événements traumatiques et leur capacité à se construire une mémoire collective qui, comme vous ne cessez de le rappeler, évolue continuellement ?
Vous travaillez à partir de l'émotion, du sentiment, tout en installant votre réflexion dans un temps suffisamment long qui permet d'avoir le recul nécessaire à une analyse apaisée et source de véritables enseignements. Ne croyez-vous pas que les méthodes aujourd'hui pratiquées par certains médias, notamment les chaînes d'information en continu, où l'information circule beaucoup plus vite qu'avant et qui présentent certaines personnes comme des experts, parfois à la va-vite, peuvent être dangereuses ?
Selon vous, les recommandations du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) relatives à la couverture audiovisuelle d'actes terroristes, rendues publiques fin octobre, seront-elles utiles ? Plus largement, quelles règles pourrions-nous imposer aux médias pour parer à ces dérives, et notamment au phénomène de ressassement dont vous dites qu'il peut entretenir la pathologie du syndrome post-traumatique, et donc causer une véritable « maladie de la mémoire » ?
Je retiens enfin de votre intervention et des informations que j'ai pu rassembler des éléments porteurs d'espoir : un an après les attentats du 13 novembre, on note le « nouveau contrat » passé avec les policiers, la solidarité, le fait que la société tient le coup, avec même une baisse des actes antisémites et antimusulmans. Ce qui se joue, c'est la défense de nos valeurs partagées avec, au premier rang, celles de la République, qu'une organisation comme l'État islamique veut nous faire abandonner. Un programme comme celui que vous menez est une forme d'engagement des scientifiques pour défendre ces valeurs citoyennes, et le politique doit également y prendre sa part.
Il y a deux types d'entretiens, selon un protocole précis : une forme libre, plutôt basée sur le récit, et une forme encadrée, avec des questions fermées ou semi-fermées. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce protocole et sur les personnes qui interrogent les témoins ? Pouvez-vous nous donner des exemples des questions qui sont posées ?
Vous avez défini quatre cercles pour le choix des personnes interrogées, où figurent survivants, familles des victimes, forces de l'ordre, habitants des quartiers touchés, du Grand Paris et de trois villes françaises plus éloignées, à savoir Caen, Metz et Montpellier. Les zones rurales semblent totalement exclues. Il aurait sans doute été intéressant d'avoir des témoignages de personnes beaucoup plus éloignées. Se sont-elles senties totalement protégées ?
Vous menez un travail transdisciplinaire, avec de nombreux sujets d'étude. Les disciplines d'étude sont-elles exhaustives ? Voit-on émerger d'autres sujets d'étude, que l'on n'entrevoyait pas à l'origine ?
Les partenaires associés à ce programme sont nombreux et importants : le CNRS, l'Inserm, des universités, des collectivités. Mais, à l'exception du journal Le Parisien, on voit peu de partenaires privés.
Enfin, a-t-on estimé le nombre de chercheurs qui vont travailler sur ce programme ?
Vous avez insisté sur la mission sociale du chercheur, dont vous vous sentez investi.
Vous avez évoqué l'aspect transdisciplinaire des recherches. J'aimerais savoir s'il est prévu d'associer à vos travaux des psychanalystes qui pourraient être témoins de la présence ou de l'irruption de ce traumatisme dans les symptômes et les paroles des personnes analysées ?
Je voudrais savoir si des études de ce type ont déjà été conduites dans d'autres pays sur des événements de même nature, s'agissant notamment de l'attentat contre les Twin Towers de New York en 2001. Avez-vous pris connaissance des conclusions, s'il y en a eu, de ce type d'études ?
En ce qui concerne les témoignages, j'aimerais savoir si les urgentistes figurent dans votre panel. Ceux-ci ont l'habitude, dans l'exercice de leur profession, d'être confrontés à des situations d'urgence où le pronostic vital est engagé, mais ils se sont trouvés là dans une situation tout à fait particulière. Il me semble intéressant de recueillir leur témoignage, parce qu'ils sont une population spécifique par rapport à ce qu'il s'est passé.
Je me pose la même question pour les journalistes, dont c'est le métier de couvrir des événements parfois dramatiques, mais qui se sont trouvés, eux aussi, dans une situation particulière à Paris. Il y avait même, au Bataclan, un journaliste d'Europe 1 présent dans la salle. Quel traitement accordez-vous à ces deux catégories particulières de témoins ?
Avez-vous l'intention d'étendre ce recueil de témoignages aux événements qui se sont passés à Nice le 14 juillet dernier ?
Enfin, à ce stade, pensez-vous qu'il existe des conditions particulières pour la résilience ? Je pense que ce champ serait intéressant à explorer.
J'aimerais moi aussi que vous nous donniez quelques informations sur le protocole des entretiens, c'est-à-dire le type de questions que vous posez et le type de personnes qui recueillent les témoignages.
Je vous remercie pour la présentation de ce projet très ambitieux autour des memory studies. L'écrivain Jorge Semprun a dit que nous devions être l'avenir d'un traumatisme collectif alors qu'il venait d'assister, au camp de Buchenwald, à la mort de Maurice Halbwachs, l'auteur des Cadres sociaux de la mémoire. Votre étude, dont nous nous félicitons qu'elle soit un programme de recherche public, porte sur tous les débats qui ont lieu autour de ce que Johann Michel appelait la gouvernance mémorielle. Quel regard portez-vous, à partir de votre projet, sur cette gouvernance mémorielle ?
Ma deuxième question porte sur les différentes catégories d'acteurs, que l'on appelle en anglais les bystanders. Arrivez-vous à établir une classification plus fine de ces différents types d'acteurs, qui sont touchés de manière très différente par ces événements ?
Ma troisième question s'appuie davantage sur les pays de ma circonscription, en Europe du Nord, où l'on tente aussi de construire des instituts de la mémoire vivante. Je pense notamment à ce qui se fait en Suède, avec le Forum pour l'histoire vivante, créé dans les années 2000 par le Premier ministre de l'époque, Göran Persson. Pensez-vous qu'il soit possible, suite à votre projet, d'institutionnaliser ces cultures mémorielles ?
Je tiens à vous remercier, monsieur le président, de l'initiative que vous avez prise. C'est pour nous l'occasion de mettre en valeur ce que fait la recherche dans notre pays. Nous avons rarement l'occasion, dans cette commission, d'être aussi concrets et de poser autant de questions sur les sujets de recherche. Beaucoup de questions, en effet, vous ont été posées sur les travaux que vous menez, madame, messieurs, ce qui prouve l'intérêt de cette audition, un intérêt d'autant plus grand pour nous que celle-ci est à la croisée des chemins des sujets qui nous intéressent ici : recherche, éducation, devoir de mémoire sont des sujets que nous traitons dans cette commission et dans le cadre des échanges que nous avons avec nos concitoyens.
Peut-être pourriez-vous nous apporter une précision, monsieur Peschanski, sur la composition du groupe de volontaires, en particulier sur celle du cercle 1 ? Vous avez parlé des associations qui se sont créées après les attentats. J'aimerais savoir si des membres de ces associations font véritablement partie du cercle 1. Sont-ils, dans votre étude, fléchés comme étant membres de ces associations ? Cela peut avoir un effet, dans un sens ou dans un autre, sur le travail de résilience.
J'aimerais savoir si des outils spécifiques ont été développés à l'égard des jeunes et des enfants. Ont-ils fait partie des cercles les plus éloignés ? Les jeunes et les enfants ont-ils été auditionnés ou vont-ils l'être ? Dans quelle mesure pourriez-vous associer l'éducation nationale à cette expérimentation ? Ce sont ces enfants qui, dans cinq ou dix ans, pourraient apporter leur témoignage, s'ils ont été eux-mêmes témoins ou s'ils ont été simplement mis au courant de ces événements. Il serait intéressant de connaître leur réaction, dix ans plus tard.
Monsieur Peschanski, vous avez fait référence à deux associations que nous connaissons bien, « Life for Paris » et « 13Onze15 Fraternité et Vérité ». En tant qu'ancien maire du 11e arrondissement, je rends hommage aux bénévoles qui animent la vie associative dans notre pays, ces femmes et ces hommes qui accompagnent les victimes et leurs familles. Comme vous, j'ai rencontré de « belles personnes ». Nous pouvons témoigner de ce que nous avons vécu avec elles et grâce à elles, il y a un peu plus d'un mois, le 13 novembre 2016, quand nous avons effectué une nécessaire démarche de mémoire.
La représentation nationale vous a témoigné, à travers ses interventions, son intérêt pour ce programme de recherche dont nous mesurons l'enjeu. Je vous laisse maintenant le soin de répondre aux questions qui vous ont été posées.
Le soutien des associations a été décisif pour obtenir les témoignages des personnes du cercle 1, c'est-à-dire des personnes directement concernées, s'agissant notamment des survivants.
Le soutien se gagne par la confiance. Si les associations nous ont apporté leur soutien, comme celles créées pour l'occasion et que vous avez citées, c'est que nos travaux participaient d'une démarche scientifique transdisciplinaire, que nous garantissions la confidentialité, qu'il y avait un suivi sur dix ans et que nous avions pour partenaires de grandes institutions. Ce soutien nous a permis d'avoir beaucoup de retours de ce secteur, qui étaient essentiels pour nous, mais aussi pour l'étude biomédicale « Remember », puisque nous nous intéressons particulièrement à la question du syndrome post-traumatique.
Puis, il y a eu l'effet du bouche-à-oreille. Derrière tout cela, il y avait des médiateurs, c'est-à-dire des personnes qui étaient là pour prendre contact, téléphoner, aller voir les gens, être sur le terrain, préparant ainsi le travail des enquêteurs qui menaient les entretiens, ces derniers étant, pour beaucoup, des sociologues, des anthropologues, des historiens ou des psychologues.
Cela n'a pas été simple. Carine Klein a procédé à de nombreuses auditions. Il a fallu très rapidement recruter beaucoup de monde et nous avons essayé de trouver des personnes ayant travaillé sur des terrains difficiles.
Je vous donne un exemple. L'un de nos collègues, marié à une Rwandaise, finissait sa thèse sur le Rwanda. Je vous laisse imaginer les horreurs qu'il a pu entendre. Lorsqu'il a parlé de notre projet avec sa femme, elle lui a répondu que, pour ce qui la concernait, elle et ses amis, les événements qu'ils avaient vécus avaient eu lieu il y a vingt ans, mais qu'il allait entendre le témoignage de personnes parlant six mois seulement après les attentats, et que ce n'était pas la même chose.
Nous avons été extrêmement vigilants, tant en ce qui concerne les personnes que nous interviewions que celles qui les interviewaient.
Quant à la place du témoin, madame Doucet, elle a effectivement changé. Il y a eu une mutation fondamentale. La question de la mémoire est devenue centrale depuis trente ans et le témoin est devenu aujourd'hui une figure structurante du vivre ensemble, de l'articulation entre le passé et aujourd'hui. Il y a un changement de statut et un changement de la place de la victime, qui est devenue centrale.
Dans ma spécialité d'historien, la Deuxième Guerre mondiale, la victime juive est devenue, en France, une figure structurante de la mémoire collective au milieu des années 1980. La question globale de la victime a été au coeur même du dispositif avec ce que l'on appelle l'invention sociale du syndrome post-traumatique. On définit maintenant le syndrome post-traumatique avec des critères très précis. La maladie de la mémoire existait avant, mais n'était pas diagnostiquée en tant que telle. Aujourd'hui, elle est presque entrée dans la mémoire collective : tout le monde parle de syndrome post-traumatique et de cellules d'urgence.
Lors de l'attentat de la rue Copernic, en 1980, on n'avait pas pris en charge le choc subi par les survivants. Aujourd'hui, en revanche, dès qu'il y a un problème, par exemple un grave accident de la route, une cellule d'urgence médico-psychologique est mise en place – à juste titre. On constate un bouleversement complet dans le rapport aux maladies de la mémoire, à la question de la victime, qui est centrale, et à celle du témoignage. Pour reprendre l'expression d'une collègue, nous sommes dans l'« ère du témoin », qui caractérise ces dernières décennies.
J'en viens aux questions sur la place de la recherche française dans le monde, et plus précisément à celle sur le 11 septembre 2001.
Il y a deux jours, j'ai déjeuné avec William Hirst, qui nous a beaucoup inspirés, car nous avons travaillé avec lui. C'est un grand professeur de psychologie à la New School for Social Research de New York, spécialiste de la mémoire du 11 septembre. Il avait, lui aussi, construit un protocole de suivi sur dix ans, mais ce protocole a surtout été développé par des psychologues. En outre, il n'a pas bénéficié de l'apport de l'audiovisuel, ce qui change tout. Les réponses écrites d'un témoin à un questionnaire tiennent en deux ou trois paragraphes. Lorsque nous posons une question, la réponse dure une demi-heure derrière dès lors qu'il s'agit d'une question lourde.
J'ai le souvenir du témoignage d'un survivant du Bataclan. Je pose une première question : « racontez-moi le 13 novembre ». Il me répond qu'il a une excellente mémoire. La première relance, c'est-à-dire lorsqu'on essaie d'avoir des précisions sur un point, est intervenue au bout d'une heure dix… Voilà pour ce qui est de l'apport de l'audiovisuel par rapport à l'étude que William Hirst a pu mener sur le 11 septembre.
Par ailleurs, il n'avait pas, d'emblée, lancé l'idée de suivre les mêmes personnes sur dix ans. Sur 3 000 questionnaires, 800 correspondent à quatre fois quatre entretiens avec les 200 mêmes personnes. De fait, ces personnes ont été suivies, mais ce n'était pas son objectif à l'origine. Pour notre part, notre objectif est d'interroger les mêmes personnes, sachant, bien sûr, que certaines personnes ne reviendront pas.
Ces différences – transdisciplinarité, enregistrements audiovisuels, suivi des mêmes personnes pendant dix ans – expliquent la singularité de notre enquête. C'est une première mondiale.
Nous sommes appelés à développer des coopérations internationales sur les questions de mémoire, avec l'Europe du Nord, monsieur Premat, mais au premier chef avec les États-Unis. En septembre ou octobre 2017, sera organisé à New York un colloque dont l'objet est la comparaison entre les premiers résultats de notre enquête au bout de six à huit mois et ceux auxquels William Hirst était parvenu à ce même stade pour les attentats du 11 septembre.
Parmi les pistes qu'il a explorées figure la différenciation entre la flashbulb memory, la mémoire « flash » émotionnelle, et la mémoire de l'événement lui-même. Si je vous demande dans quelles circonstances vous avez appris les attentats du 11 septembre, vous aurez tous, j'en suis certain, des souvenirs très précis à ce sujet. Si ensuite, je vous demande de me raconter le déroulement des événements, il en ira autrement. Les Français évoqueront à coup sûr les Twin Towers, l'attaque du Pentagone passera déjà à l'arrière-plan, et le crash du vol 93 en Pennsylvanie sera quasiment oublié. L'attaque des Twin Towers est pour nous le symbole de ces attentats. Les Américains, quant à eux, évoqueront tous le crash de l'avion, car l'action menée par les passagers contre les terroristes pour empêcher que l'avion ne s'écrase sur le Capitole est le symbole de la résistance d'un peuple contre le terrorisme. C'est ce genre de processus que nous voulons mettre au jour.
Que va-t-on retenir du 13 novembre ? Quelle place sera laissée à Saint-Denis, aux fusillades sur les terrasses ? Le Bataclan sera-t-il appelé à occuper une place centrale comme symbole non seulement des attentats de la journée du 13 novembre mais aussi de la chaîne d'attentats de l'année 2015 ?
Le rôle des politiques dans la construction de la mémoire collective nous intéresse bien évidemment. Nous analysons la mise en scène publique de la mémoire, la mémorialisation, dont les différents entrepreneurs de la mémoire qu'évoquait M. Premat sont les acteurs. L'une des pistes que nous explorons est l'articulation entre le « je » et le « nous », entre l'individuel et le collectif. Après les attentats du 11 septembre, Jean-Marie Colombani a intitulé son éditorial : « Nous sommes tous Américains ». Après les attentats de janvier, après les attentats de novembre, on a vu émerger « Je suis Charlie » et « Je suis Paris », signe d'une individualisation de la mémoire. Chacun apporte sa bougie, son petit mot, sa fleur. L'individu vient témoigner de son empathie personnelle avec les victimes au lieu de l'exprimer dans un collectif.
L'analyse des médias est tout aussi cruciale. En matière de déontologie, tous les médias s'accorderont pour dire qu'ils éviteront à l'avenir de commettre les erreurs manifestes qui ont pu se produire dans la couverture des attentats. Il vaut mieux, en effet, qu'un journaliste n'indique pas la localisation des policiers ou des otages qui ont réussi à fuir et à se cacher alors que le terroriste est encore en action. Il n'est pas indispensable non plus de mettre un micro sous le nez d'un homme qui vient de perdre sa femme et l'un de ses enfants sur la Promenade des Anglais.
Le problème principal, c'est le mode de fonctionnement des chaînes d'information en continu : le ressassement, qui est l'une des caractéristiques du syndrome de stress post-traumatique. Elles diffusent en boucle toujours les mêmes images, commentées par des experts ou des pseudo-experts qui, en l'absence de nouvelles informations, tentent de meubler et avancent toutes sortes d'hypothèses. Au bout de dix à quinze minutes, elles diffusent de nouvelles images qui vont se raccrocher aux précédentes, et tous les téléspectateurs attendent devant leur poste encore dix ou quinze minutes que le cycle recommence. Comment lier devoir d'information et protection des téléspectateurs contre les pathologies de la mémoire ? Voilà l'enjeu.
Ce qui nous a frappés, c'est la diffusion de ces pathologies largement au-delà des premiers cercles, même loin du théâtre des attentats du 13 novembre, en province. L'une des conclusions de l'étude que nous avons menée avec le CREDOC est que la peur est d'autant plus grande que la personne est éloignée du coeur des attentats. Quand une personne est fragile et a déjà subi un syndrome post-traumatique, la façon dont les médias traitent l'événement a une répercussion directe sur elle.
S'agissant des questionnaires, nous ne pouvons pas vous transmettre le détail de leur contenu pour des raisons évidentes mais nous pouvons vous donner quelques exemples. Nous posons trois grandes questions ouvertes, qui amènent souvent des réponses longues : comment la personne a-t-elle vécu son 13 novembre ? Comment peut-elle reconstituer le déroulement des événements ? Quelles sont, d'après elle, les causes et les conséquences ? Il y a ensuite des questions de mémoire émotionnelle pour lesquels le support de la vidéo est décisif.
Les psychanalystes, madame Martinel, se penchent déjà sur le sujet et il est indispensable de les associer à nos travaux.
S'agissant des partenaires privés, nous avons déjà noué des liens avec Le Parisien et l'Observatoire B2V des mémoires, issu d'un groupe paritaire de protection sociale à but non lucratif. Pour soutenir notre projet, le mécénat est indispensable. Il peut prendre des formes scientifiques : c'est ainsi que Ouest-France s'est engagé à soutenir deux bourses doctorales reposant sur le dispositif des conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) ayant pour objet l'analyse des médias.
Quant aux urgentistes, nous travaillerons avec eux pour analyser les réponses. Et une vingtaine de journalistes sont venus participer au programme, ce qui leur a permis de connaître le protocole de l'intérieur. Je dois dire que nous avons été stupéfaits par le retentissement qu'a rencontré notre travail dans les médias, alors même que nous n'avons pas encore de résultats et que nous avons interdit toute utilisation des images issues de nos entretiens : 220 articles et interviews ont déjà été consacrés au programme.
Pour finir, je précise que notre tâche la plus difficile n'a pas été de convaincre les personnes appartenant au cercle 1 de témoigner, mais celles appartenant au cercle 2, c'est-à-dire les personnes des arrondissements concernés qui considéraient qu'elles n'avaient rien à dire car elles étaient seulement témoins et non pas victimes. J'ajoute que de nombreuses personnes appartenant au monde rural ont été interviewées dans le cadre des enquêtes menées à Caen, Montpellier et Metz.
Je confirme que des personnes des départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne sont venues dans les studios aménagés au sein du laboratoire CYCERON à Caen.
Je relierai les deux questions de Mme Doucet : la place de la recherche française dans cette thématique et la dimension citoyenne du programme. Dans le discours de remise du prix Pierre-Simon « Éthique et société », que nous avons été extrêmement touchés de recevoir, il a beaucoup été question de l'engagement des personnels, qu'il s'agisse des personnels statutaires ou des personnels recrutés sur contrat à durée déterminée (CDD). C'est à eux, en effet, que nous devons une grande part des premiers succès de notre programme. À cela s'ajoute le rôle des institutions : elles ont bien fonctionné, nous apportant rapidement leur soutien. Aucun grain de sable n'est venu perturber le démarrage du programme. Nous avons pu commencer à la mi-mai les premiers entretiens, en ayant toutes les autorisations éthiques et administratives requises.
Les équipes parisiennes ont joué un rôle déterminant : les participants ont vite manifesté leur confiance envers les chercheurs, qui leur ont paru incarner la connaissance face à la barbarie. Entre les entretiens, menés dans un cadre très professionnel, les relations entre enquêteurs et témoins se sont approfondies : en off, ce sont des jeunes qui parlent à d'autres jeunes. Les chercheurs, affectés comme tout le monde par les attentats, ont éprouvé le besoin de mettre leur énergie dans ce projet et les participants le ressentent également. Cette dynamique est importante : il faut que les participants aient envie de revenir sinon tout un pan du programme, fondé sur une étude longitudinale, ne pourra être mené à bien.
Nous nous devons d'être ambitieux. Le syndrome de stress post-traumatique est appelé à toucher de plus en plus de personnes. Des chercheurs d'autres disciplines nous contactent. Il est encore prématuré de vous en dire plus mais j'espère que nous pourrons développer des protocoles thérapeutiques, y compris médicamenteux. Il est très important que nous nous orientions vers ce type de recherches, notamment pour traiter les formes graves de syndrome de stress post-traumatique.
Autre chantier d'importance : l'évaluation des cellules psychologiques, dispositif critiqué, notamment à l'étranger.
Les questions sur l'attentat de Nice rejoignent celles posées sur la prise en compte des enfants. Dès le 15 juillet, les responsables du programme se sont contactés : il est évident que cet événement a eu une répercussion sur les entretiens que nous menons. Et je suis rapidement entré en relation avec mes collègues psychiatres, notamment la pédopsychiatre Florence Askenazy, qui est devenue la personne référente. Comme elle le souligne, ce qui était visé dans cet attentat, c'était la figure de la mère, avec tout ce qu'elle représente dans la culture méditerranéenne. J'espère que nous pourrons développer un programme ambitieux avec ces professionnels. Différent de l'étude « Remember », il sera mené en coordination avec nos équipes. C'est une dimension importante : nous devons montrer aux participants, aux élus et aux décideurs politiques que nous coordonnons nos efforts pour le bien public.
La résilience, sur laquelle ont porté plusieurs questions, est au coeur de l'étude « Remember ». Chaque participant passe deux journées dans nos laboratoires à Caen, pendant lesquelles nous procédons à la fois à un examen psychopathologique pour discerner les symptômes, à un examen neurologique pour mettre au jour les mécanismes cognitifs à l'oeuvre, enfin à une investigation sur le fonctionnement même du cerveau pour déceler le rapport de forces entre les intrusions et les mécanismes permettant de contrecarrer leurs effets. Nous effectuons, en outre, des mesures portant sur l'environnement social, familial, amical de la personne. Nous prenons également en compte la façon dont elle ressent l'effort de l'État et des collectivités à son égard en tant que victime et nous analysons la construction de la mémoire sociale. L'originalité du programme « 13 novembre » est de faire interagir plusieurs strates de la construction de la mémoire afin de comprendre différents phénomènes.
Nous ne savons pas encore combien de chercheurs se consacreront à ce programme car nous devons trouver les moyens de financer leur travail, qu'il s'agisse de l'analyse des données dont nous disposons déjà ou du recueil des données à venir. Nous avons bénéficié d'une première tranche de financement avec les 2 millions d'euros octroyés par le Commissariat général à l'investissement (CGI) et le soutien de plusieurs partenaires nous a permis de recruter des post-doctorants, de commencer à analyser les données et de préparer le recueil de témoignages pour 2018. Mais je vais laisser à Carine Klein le soin de vous en dire plus.
Il me semble important d'insister sur le processus concret de montage du projet pour vous permettre d'évaluer toutes ses dimensions. Denis Peschanski et Francis Eustache ont rassemblé de nombreux chercheurs et des personnels administratifs. Je salue Florence Fraisse et Carine Malle, de l'INSERM, qui ont été les toutes premières à constituer le noyau du projet. Une fois les financements reçus, il a fallu passer à la phase de mise en oeuvre. Des discussions entre partenaires ont eu lieu sur les priorités d'affectation de la somme, énorme, de 2 millions d'euros que nous avons reçue.
Ensuite ont commencé les recrutements des premières personnes qui allaient entrer en contact avec les témoins. Ces recrutements étaient décisifs car il s'agissait de dissiper tous les doutes des participants à propos du programme, l'une de nos grandes interrogations étant de savoir comment les victimes allaient recevoir nos demandes. Les intermédiaires recrutés ont contacté de possibles participants par téléphone, par courriel, se sont rendus sur le terrain, dans les casernes, dans les commissariats, dans les hôpitaux, ont tenu des permanences dans des bureaux mis à disposition par la mairie du 11e arrondissement et par l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation (INAVEM). Un travail approfondi a été mené sur les réponses à apporter à telle ou telle question d'une victime ou d'une famille endeuillée et à la manière de leur présenter de manière positive le programme, afin de les convaincre de nous accompagner.
Puis, nous avons recruté douze enquêteurs afin de former une équipe stable destinée à mener les entretiens. Avec Denis Peschanski et Francis Eustache, nous nous étions dit dès le début que si nous réussissions à obtenir des financements, nous recruterions en priorité des jeunes, doctorants et post-doctorants, comme une sorte de revanche contre le fait que les terroristes avaient voulu casser la jeunesse et briser les valeurs républicaines. Avec l'équipe du projet, composée de Daniel Da Rocha, Manon Lamoureux et Annabelle Réaubourg, nous nous sommes rendu compte qu'il fallait mixer les profils et nous avons également recruté des chefs d'entreprise et des personnes plus âgées. Ces personnes m'ont souvent dit que ce n'était pas un contrat de travail que nous leur avions proposé, mais une vraie mission, et je suis d'accord avec elles.
Je voudrais également saluer les techniciens spécialisés dans l'image et le son qui se sont mobilisés à l'INA pendant trois mois, les chauffeurs qui ont effectué les navettes pour emmener les participants de la mairie du 11e arrondissement vers l'INA et Bry-sur-Marne, les personnels de l'ECPAD, en particulier Florence Duhot et Patrick Sèbe.
Nous avons été extrêmement sensibles à l'unanimité qui s'est exprimée à travers vos interventions. Je dois dire qu'il est extrêmement émouvant pour nous d'avoir eu ces retours de votre part et ces échanges de qualité. Chacun de vous mesure l'ampleur du défi auquel nous faisons face. Notre chantier est titanesque et les journées n'ont que quarante-huit heures ! Vous connaissez les contraintes qui pèsent sur les personnels statutaires. Nous devons procéder à d'autres recrutements et obtenir des soutiens financiers. Sans le soutien de la représentation nationale dans sa diversité, nous irons à l'échec.
La décision du Premier ministre a permis l'amorçage du projet, mais vaut également engagement pour la suite. Un conseil scientifique veille au bon déroulement de nos travaux. Sur la base du rapport qu'il rendra au début de l'automne prochain, il sera décidé si le programme sera ou non poursuivi.
Sans mobilisation des autorités de l'État et de la représentation nationale, il est évident que nous ne pourrons pas continuer. C'est la raison pour laquelle je me tourne vers vous.
Merci, monsieur le président, d'avoir pris cette initiative.
Je préside cette commission depuis quatre ans et demi et si votre programme de recherche est inédit, une telle audition est aussi inédite. Je suis très sensible à l'implication de tous nos collègues, dans leur diversité territoriale et politique.
C'était un moment important pour nous aussi. Avec le bureau de la commission, nous souhaitions vous témoigner non seulement notre intérêt mais aussi notre soutien. Sachez que vous avez la représentation nationale avec vous pour que ce programme aille à son terme, même si beaucoup d'entre nous ne seront plus députés quand il sera achevé dans dix ans.
La séance est levée à onze heures vingt-cinq.