Cette dette atteint désormais 98,4 % du PIB, contre 97,5 % à la fin du premier trimestre de l’année. Madame la rapporteure générale, vous évoquiez une réduction du déficit. Les chiffres que je viens de citer, notamment celui du niveau de la dette, ne témoignent d’aucune amélioration.
Quant aux hypothèses de croissance, le Gouvernement les a revues à la baisse : elles plafonnent à 1,4 % du PIB en 2016, contre 1,3 % constaté l’année dernière. Les perspectives pour 2017 semblent plus qu’incertaines, car l’OCDE, tout comme le FMI, table en effet sur une hausse de 1,3 % seulement, un taux inférieur de 0,2 point à celui prévu par le Gouvernement. En commission, notre rapporteure générale a évoqué une baisse de 2,6 milliards des recettes fiscales nettes, dont 2,4 milliards au titre de l’impôt sur les sociétés, du fait des résultats des entreprises à un niveau inférieur aux anticipations, entraînant de ce fait une potentielle dégradation du solde budgétaire de 4 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale.
En 2015, les recettes se sont élevées à 33,5 milliards d’euros. Avec la baisse enregistrée cette année de 3,1 milliards par rapport à l’exécution de 2015, les recettes sont inférieures de près de 10 % à vos prévisions pour 2016. Cela témoigne immanquablement d’un affaissement des résultats des entreprises, qui résulte de la dégradation de leurs marges. J’y vois le résultat de la politique économique conduite par le Gouvernement. L’écart est énorme et préoccupant.
Le président de la commission des finances, Gilles Carrez, s’est inquiété fort légitimement de la situation des recettes fiscales : à la baisse des rentrées fiscales de l’impôt sur les sociétés, il faut ajouter celles de l’impôt sur le revenu, qui sont en diminution de 600 millions, sans oublier celles de la TVA. Comme l’a démontré pertinemment le rapport de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, le schéma budgétaire proposé pour 2016 est source d’interrogations et « paraît éloigné d’un simple ajustement de fin d’exercice. »
Le Haut conseil des finances publiques a d’ailleurs estimé, dans son avis du 14 novembre dernier, que « la tenue des objectifs d’exécution du budget 2016 est rendue difficile par les nombreuses mesures nouvelles annoncées au cours de l’année et par l’ampleur des sous-budgétisations de la loi de finances initiale, qui ont atteint en 2016 un niveau sans précédent » – cela vient d’être rappelé à l’instant. Il convient également de noter que la plupart des dépenses qui justifient l’ouverture de crédits en cours d’exercice ne sont nullement imprévisibles et relèvent d’une sous-budgétisation en loi de finances initiale. Il s’agit en particulier des ouvertures liées au financement des contrats aidés, de l’hébergement d’urgence et des opérations extérieures et intérieures de la mission « Défense ».
Notre groupe a déposé des amendements visant à supprimer la nouvelle ponction des ressources et fonds de roulement d’organismes chargés de missions de service public. Nous avons également déposé un amendement visant à supprimer l’article 35, qui prévoit la création d’une taxe assise sur le chiffre d’affaires de certains professionnels du droit, afin d’alimenter le fonds pour l’accès au droit et à la justice, cette disposition de la loi Macron ayant déjà fait l’objet d’une censure par le Conseil constitutionnel.
Je terminerai en évoquant le sujet du compte entrepreneur-investisseur. La compétitivité, tant recherchée par vos gouvernements successifs, mais hélas jamais pleinement retrouvée, a parfois donné naissance à des dispositifs intéressants, mais souvent incomplets. J’en veux pour preuve la création, en mars dernier, de ce compte entrepreneur-investisseur, dispositif ambitieux qui visait à sécuriser fiscalement l’investissement et le réinvestissement. Mais, avec sa transformation en compte PME innovation, l’ambition de ce nouvel outil a été fortement restreinte.
Ainsi, le volet relatif à la fiscalité du patrimoine n’a jamais fait l’objet d’une priorisation. En durcissant et complexifiant à outrance les conditions de réinvestissement, le Gouvernement risque de créer un énième dispositif fiscal inopérant, complexe et très peu incitatif pour les investisseurs, donc fatalement inefficace pour relancer l’investissement. En tout état de cause, ce PLFR pour 2016, quelque peu testamentaire, n’est finalement qu’un catalogue de mesures éphémères, dépourvu de cohérence et aucunement pérenne. À l’heure des bilans, nous sommes bien forcés de constater et de regretter votre absence de volonté réformatrice, monsieur le secrétaire d’État, que vos successeurs devront pallier.