Les pistes d'action sont donc connues. C'est sur l'architecture de l'Union que je m'interroge. À mon sens, l'une de ses faiblesses tient au trop grand nombre de dérogations et d'exceptions consenties ; elles ont rendu la construction européenne incompréhensible. Je suis un farouche partisan de l'intégration différenciée, mais elle doit être organisée en deux cercles cohérents, trois au plus. C'est pourquoi je juge intéressante la proposition de M. Pisani-Ferry, même si elle est venue trop tôt : elle reprend l'idée chère à François Mitterrand d'une confédération autour d'un noyau d'États fédérés, avec la perspective d'organiser un cercle extérieur au nôtre.
Une autre Europe pourrait être ainsi construite, composée de la zone euro, d'une Union européenne conçue comme un sas vers une union économique et monétaire véritablement intégrée, d'un cercle plus lâche de pays avec lesquels des accords commerciaux clairs pourraient être conclus. Ce cercle irait-il jusqu'à inclure la Turquie ? En tout cas, cette architecture serait plus claire et mieux compréhensible par les citoyens.
La nécessaire fermeté des Vingt-Sept à l'égard du Royaume-Uni doit persister : sinon, les populistes en tireront argument pour avancer que le choix du peuple n'est pas respecté ; mais, au Royaume-Uni, les partisans du maintien dans l'Union pensent encore que l'on pourra revenir sur cette décision. La fermeté est-elle unanimement partagée en Europe ? Elle me semble avoir quelques failles dans certains pays, où l'on attend les élections à venir en France et en Allemagne pour assouplir la position. Ce serait très dangereux pour notre crédibilité.