Intervention de Pierre Morel

Réunion du 23 janvier 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Pierre Morel, ancien ambassadeur de France en Russie :

Il convient d'ajouter que l'Église orthodoxe, attachée à la protection de la nature et au respect de la Création, fait partie des forces qui militent en faveur de l'écologie et a joué un rôle précurseur en la matière dans les milieux religieux.

Du point de vue politique, s'il est vrai que le régime vieillit, je note toutefois la manière dont, après la manifestation du 10 décembre 2011, Poutine s'est félicité de la capacité de son régime à produire et à contrôler une forme de puissance tribunicienne, ainsi que son insistance nouvelle, dans son discours du 12 décembre dernier, sur la lutte contre la corruption.

L'affaire ABM continue de poser problème à la Russie. Du point de vue stratégique, l'on craint une dérive vers une autre conception du rôle des armes nucléaires. La France a connu les mêmes difficultés au sein de l'OTAN. Ensuite, la crédibilité de l'offre de l'OTAN est jugée insuffisante. Sur ce point, j'avoue ne pas savoir exactement où en est le comité. Enfin, même si le sud est bien la direction visée, la capacité d'observation de l'horizon et la puissance du système donnent à l'OTAN et, en son sein, aux États-Unis une allonge supplémentaire, porteuse d'un déséquilibre qui paraît contraire à la conception russe très classique de l'équilibre en matière nucléaire.

Parmi les événements sportifs que vous avez cités, madame la députée, nous devons être particulièrement attentifs aux Jeux de Sotchi, dont l'approche a fait resurgir ici ou là l'idée de boycott, qui avait circulé à l'époque soviétique, et pouvait également réveiller le souvenir de l'affaire tcherkesse, drame occulté qui a conduit, entre 1870 et 1880, à de très importants déplacements de population, dont le Nord-Caucase est sorti transformé. Le risque de déstabilisation de la région est une cause de crispation. Ainsi cet événement sportif international, qui suscite des investissements considérables, se prépare dans un contexte politique et sécuritaire qui reste complexe.

S'agissant enfin de la Syrie, les Russes nous accusent de tous les maux, nous reprochant d'y alimenter le désordre comme par un mauvais réflexe acquis en Libye, alors que l'on pourrait tout aussi bien soutenir que c'est à cause du blocage russe qu'aucune solution n'a pu être trouvée. Je l'ai dit au printemps dernier à des parlementaires russes, ajoutant que nous aurions pu travailler ensemble en novembre 2011, lorsque la situation était certes difficile, mais pas dramatique. Au lieu de quoi la Russie s'est raidie et a fait de son intransigeance un thème de campagne. Il me semble qu'une occasion a été manquée alors. Sans doute la dégradation dramatique de la situation en Syrie nous en fournira-t-elle une autre. Or, dans le contexte d'instabilité internationale que nous connaissons, nous devons veiller, des deux côtés, à saisir les occasions qui se présentent.

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