Madame la députée, vous abordez un sujet absolument crucial puisque, derrière le décrochage, ce n’est pas seulement le sort d’un individu – en l’occurrence d’un jeune qui sort sans qualification du système scolaire – qui est en jeu, c’est aussi le sort d’une nation, car une économie confrontée à autant de jeunes sans formation qui, par définition, ne trouvent pas d’emploi, est une économie contrainte. Et c’est aussi le sort de notre système scolaire qui est en question. Nous avions à rougir de compter chaque année, comme c’était le cas par le passé, plus de 100 000 jeunes sortant du système scolaire sans qualification. Cela signifiait, reconnaissons-le, que nous n’arrivions pas à avoir des pratiques pédagogiques adaptées à l’ensemble des élèves. Le résultat auquel nous sommes parvenus – passer sous le seuil de 100 000 décrocheurs annuels, avec une baisse de 40 000 depuis le début du quinquennat – constitue un très beau résultat, qui démontre que notre système est capable d’évoluer.
C’est le cas tout d’abord sur le plan de la remédiation, qui consiste à aller chercher des élèves qui ont décroché, de les convaincre de revenir et de les réinstaller dans un parcours de formation, ce qui n’a rien d’évident. Cette remédiation a été améliorée par le nouveau droit au retour en formation, que nous avons adopté en 2014 et qui porte maintenant ses fruits, ainsi que par notre choix de développer des structures de retour en formation, telles que les microlycées, qui rencontrent un grand succès.
Outre la remédiation, nous avons aussi amélioré la prévention du décrochage, grâce aux pratiques pédagogiques employées, dès le plus jeune âge, dans tous nos établissements scolaires ; nos enseignants sont désormais en mesure de détecter, grâce à une formation plus importante, les signaux précurseurs du décrochage, et nos chefs d’établissement ou directeurs peuvent travailler davantage avec les familles. De fait, le décrochage est souvent multifactoriel, et la persévérance dans le domaine scolaire nécessite bien sûr l’implication des parents. Désormais, les établissements, notamment ceux du second degré, abritent systématiquement des référents décrochage. Cela n’a l’air de rien, mais c’est très important : cela signifie que le décrochage n’est plus un sujet périphérique, mais un problème placé au coeur de l’école, que l’on s’efforce de prévenir et face auquel on ne lâche rien.
J’évoquerai une mesure qui me tient tout particulièrement à coeur, qui a été expérimentée l’année dernière et qui est entrée en application partout cette année : le parcours aménagé de formation initiale – PAFI – offre la possibilité à des élèves de plus de quinze ans, qui sont engagés dans un processus de décrochage, de sortir quelques semaines, quelques mois, de l’environnement scolaire, pour effectuer un stage en entreprise ou en association, tout en restant sous statut scolaire et en demeurant tutoré par un membre de l’établissement, et de revenir une fois qu’ils ont retrouvé la motivation dans ce cadre extérieur. Cela me paraît très important. En effet, par le passé, on était nombreux à se demander pourquoi l’école devait ressembler à la même chose pour chacun ; on pensait que certains élèves qui ne trouvaient plus de motivation devaient pouvoir la chercher ailleurs. Cela existe à présent grâce au PAFI, dispositif très satisfaisant qui bénéficie aux élèves de plus de quinze ans et qui contribue à expliquer pourquoi nous améliorons nos résultats.
En faisant monter en charge tous ces dispositifs, nous sommes capables de passer en 2017 sous le seuil des 80 000 décrocheurs annuels. Quand ce résultat sera obtenu, cela signifiera que l’on verra le bout du tunnel, que l’on sera capable, dans quelques années, de ne plus avoir de décrocheurs, si tant est qu’on ne les reproduise pas.