Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 21 décembre 2016 à 8h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente :

Je remercie M. Michel Theys d'être venu de Bruxelles pour cette audition sur l'avenir de l'Europe, de sorte que nous prenions du recul, dans une période très difficile, pour formuler des pistes de relance de la volonté européenne.

Vous êtes, monsieur Theys, un observateur de l'Union européenne depuis trente ans. Dans les éditoriaux très engagés que vous écrivez pour l'Agence Europe, vous inscrivez l'actualité européenne dans une perspective historique. Après l'événement historique, précisément, que fut le Brexit, que pensez-vous de la suite de la construction européenne ? Pouvons-nous la poursuivre autour d'un noyau dur souhaitant aller plus loin – une sorte d'Europe des avant-gardes qu'incarnerait la zone euro – ou faut-il accorder la priorité au maintien de l'Union des Vingt-Sept, comme le demandent ses membres les plus récents ? Ne court-on pas, dès lors, le risque de créer une Europe à deux vitesses, ce qui nuirait à sa lisibilité pour le citoyen ?

Vous proposez des analyses très lucides des freins que les États membres ont mis au partage de la souveraineté, pourtant nécessaire à l'efficacité de l'action publique, parce qu'il aurait entamé les prérogatives des États dans des domaines sensibles, notamment en matière sociale, fiscale, budgétaire, mais aussi de transition énergétique ou de politique étrangère. Hier, Jean Arthuis nous a présenté un jugement très sévère sur les États. Que pensez-vous de ces blocages ?

Enfin, les crises actuelles pourraient-elles susciter un sursaut, un renouveau de l'action commune ? À Bratislava, les Vingt-Sept ont réaffirmé leur volonté de travailler ensemble, par exemple dans le cadre du plan Juncker et du déploiement des gardes-frontières européens. De nombreuses difficultés persistent cependant, en particulier concernant la lutte contre le dumping fiscal et social, et le détachement des travailleurs ou encore l'opposition à l'harmonisation de l'impôt sur les sociétés. Pensez-vous qu'il soit possible et souhaitable de procéder à de nouvelles réformes institutionnelles à moyen terme ?

Quel est votre point de vue sur la multiplication des référendums, dont le Brexit est l'archétype ? Il semble de plus en plus que les référendums sont proposés à la carte, tel ou tel État s'emparant d'une question relative à la construction européenne, comme l'ont récemment fait les Pays-Bas au sujet de l'accord d'adhésion avec l'Ukraine, par exemple.

Quel regard portez-vous sur la démocratie européenne et l'espace public européen ? Quel rôle pourraient jouer les représentants des citoyens que sont les parlements – le Parlement européen et les parlements nationaux ?

Que pensez-vous du traitement de l'information sur l'Union européenne qui est fait à Bruxelles et dans les États membres par les journalistes eux-mêmes ? Si l'on estime souvent que les responsables politiques sont ambigus sur les questions européennes, n'en va-t-il pas de même des journalistes ? Vous avez constaté certaines dérives dans votre bulletin quotidien : la montée des nationalismes et des populismes de part et d'autre de l'Atlantique ; l'incapacité à faire avancer la construction européenne depuis vingt ans ; l'incapacité à faire rêver les jeunes ; le divorce croissant entre les « élites » et les « peuples ». Je vous pose à mon tour cette question, dont vous estimez qu'elle pourrait tout sauver : où avons-nous failli ? J'espère que l'examen lucide de nos erreurs nous aidera à repartir de l'avant et à replacer la construction de l'Union européenne au service d'une perspective politique et d'un espoir partagé, et au service de tous dans une mondialisation où l'Europe, si elle est unie, garde tout son rôle.

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