Monsieur le président, madame la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, monsieur le secrétaire d’État à l’industrie, mes chers collègues, tout d’abord, je me réjouis que l’adaptation du code minier au droit de l’environnement vienne en débat dans notre assemblée, même si c’est à la fin de la législature.
Notre code minier souffre en effet de nombreuses insuffisances. Il est plus que temps de le moderniser afin de prendre en compte les principes constitutionnels de la Charte de l’environnement, même si, dans ce domaine, des avancées ont déjà été réalisées ces dernières années, notamment en ce qui concerne le renforcement des modalités de participation du public ou la responsabilité en matière minière et la prévention des risques miniers après la fin de l’exploitation.
Toutefois, les exigences de la Charte de l’environnement et les engagements internationaux de la France imposent à l’autorité publique de faire en sorte que les citoyens prennent part aux décisions qui les concernent. Or les carences de notre législation en la matière ont été mises en lumière par la problématique des pétroles et gaz de schiste et par les interrogations relatives à l’activité minière aurifère et pétrolière en Guyane.
Face à ces enjeux, notre commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a joué, je le crois, un rôle déterminant. Un premier rapport d’information sur les gaz de schiste a été remis, le 8 juin 2011, par M. Philippe Martin et M. François-Michel Gonnot. Le rapport conjoint de M. Michel Havard et moi-même a contribué à l’adoption de la loi du 13 juillet 2011 visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique. La loi du 27 décembre 2012 a renforcé la participation du public dans la procédure d’octroi des titres miniers.
Tout au long de ces quatre dernières années, notre commission a organisé des réunions et des tables rondes ; elle a créé un groupe de travail dont les membres ont mené un large programme d’auditions et rencontré l’ensemble des parties prenantes du secteur : élus locaux, services ministériels, associations de protection de l’environnement, associations ou fédérations professionnelles, instituts de recherche ou encore personnalités qualifiées.
La réforme du code minier a été annoncée par le Gouvernement il y a cinq ans, sous la précédente législature. Dès le 22 avril 2011, la ministre de l’écologie, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, commandait à l’avocat Arnaud Gossement un rapport sur la réforme du droit minier, qui a été remis dès le 12 octobre de la même année. Le 14 février 2013, M. Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, confiait à M. Thierry Tuot, conseiller d’État, la mission de réformer le code minier : le groupe de travail constitué sous son égide a remis, le 9 décembre 2013, un rapport dont les conclusions ont amené le Gouvernement à annoncer à plusieurs reprises son intention de déposer un projet de loi : d’abord, par la voix de M. Philippe Martin et de M. Arnaud Montebourg, puis il y a un an, par celle de M. Emmanuel Macron.
À l’approche de la clôture de la législature, j’ai estimé qu’il serait regrettable que tout le travail effectué n’aboutît pas : c’est pourquoi il a été décidé de déposer cette proposition de loi, qui reprend une partie du dispositif issu des travaux menés par le Gouvernement. Les travaux en commission, qui ont duré plus de huit heures, ont modifié et enrichi profondément le texte que nous avions déposé.
Tout d’abord, j’indique que cette proposition de loi a pour objectif préalable la ratification d’une ordonnance. Je rappelle en effet que le Gouvernement avait demandé au Parlement, par la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allégement des procédures, l’autorisation de créer, par voie d’ordonnance, la partie législative du code minier. Cela fut fait par l’ordonnance du 20 janvier 2011, qui prévoit la recodification à droit constant de l’ancien code et de textes épars.
Le projet de loi de ratification déposé par le Gouvernement n’ayant pas été examiné à ce jour, il nous a paru opportun, dès l’article 1er de cette proposition de loi, de procéder à la ratification de cette ordonnance pour donner aux dispositions qu’elle contient une valeur législative. Les autres dispositions de ce texte visent à les compléter.
Notre commission est consciente que cette codification devra être accompagnée d’un nettoyage du code minier, afin non seulement de rectifier des erreurs matérielles, mais aussi afin de modifier des intitulés pour tenir compte des nouveaux articles que nous allons adopter.
En préambule, nous avons tenu à rappeler que les substances du sous-sol appartiennent à l’État et que les activités minières doivent prendre en compte l’intérêt des populations et être exercées dans le respect des grands principes du droit de l’environnement.
Les articles 2 à 6 du texte abordent cinq thèmes : la procédure de délivrance des titres miniers et l’évaluation environnementale des demandes ; l’information et la participation du public ; la création d’un espace de débat national ; la sécurisation des procédures ; et la rénovation des dispositifs relatifs à l’après-mine.
L’article 2 vise essentiellement à prendre en compte les enjeux environnementaux dans la délivrance des titres miniers afin de rappeler les principes qui régissent les activités minières ; à désigner les autorités administratives compétentes ; à réaffirmer que les demandeurs de titres doivent posséder les capacités techniques et financières ; à prévoir qu’un cahier des charges puisse limiter l’emploi de certaines techniques ou l’exploitation de certaines formations géologiques ; à rendre plus explicite l’enchaînement des procédures, depuis la mise en concurrence, la première sélection des dossiers, la consultation des collectivités territoriales ; à introduire une véritable évaluation environnementale dès l’octroi d’un titre minier ; et à prévoir la faculté de refuser un titre si les conditions ne sont pas remplies, en particulier si les objectifs de protection de l’environnement le justifient.
L’article 3 comporte l’une des principales innovations du texte. Nous partageons tous le sentiment que nos concitoyens doivent être davantage associés à la prise de décision des autorités publiques. C’est pourquoi cet article prévoit la possibilité de constituer un groupement participatif d’information et de concertation qui, dans certains cas, organisera la consultation du public, pourra recourir à des expertises et formulera un avis sur la demande de titre. La commission a précisé les cas dans lesquels ce groupement serait mis en place, et a apporté des précisions sur les différentes étapes de la procédure et sur la composition du groupement.
Parce que les activités minières ne doivent pas se faire de manière désordonnée, il est impératif que l’État en détermine les grandes orientations. C’est l’objectif de l’article 4 de cette proposition de loi, qui institue trois instruments : un Haut conseil des mines, qui deviendra un lieu de débat national et dont la commission a renforcé les missions ; une politique nationale des ressources et des usages miniers, qui identifiera les substances, décrira les techniques et déterminera de grandes orientations en cohérence avec les stratégies de transition énergétique et écologique ; enfin, un registre national des décisions administratives qui accroîtra l’information du public et renforcera la transparence.
Pour favoriser le renouveau minier, il convient de mettre en place une législation stable qui permette de sécuriser les investissements et les entreprises. C’est pourquoi l’article 5 de la proposition de loi prévoit la création d’un recours en validation de procédure qui pourra, par exemple, être actionné par le bénéficiaire d’un titre minier. Ce recours, présenté devant la cour administrative d’appel, sera l’occasion pour le juge d’examiner la régularité de la procédure suivie par l’administration et, le cas échéant, de prescrire des mesures qui permettront de purger la procédure de ses vices.
Nos débats ont soulevé quelques interrogations sur cette procédure ; nous aurons l’occasion de la revoir lors de l’examen des amendements. D’ores et déjà, la commission a enrichi le dispositif en prévoyant les recours des collectivités territoriales et des associations agréées.
Enfin, l’article 6 aborde la question des responsabilités et des réparations de l’après-mine. Je souligne à cet égard que l’État doit prendre toutes ses responsabilités dans la gestion de l’après-mine, qui est une mission de solidarité nationale. L’article 6 prévoit d’avancer dans cette voie, en définissant pour la première fois ce qu’il faut entendre par dommage minier, en renforçant la responsabilité des acteurs, et en créant une mission d’indemnisation en cas de défaillance ou de disparition desdits acteurs. Le Fonds de garantiedes assurances obligatoires de dommages – FGAO – sera l’un des pivots de cette mission. Ses missions ont été élargies, notamment en ce qui concerne la nature des dommages, puisque la commission a approuvé l’inclusion des dommages environnementaux et sanitaires dans le préfinancement des indemnisations – j’y reviendrai à l’occasion de la discussion des amendements déposés à ce sujet.
Les travaux en commission ont permis d’ajouter de nombreuses autres dispositions, dont certaines figuraient déjà dans la première version de la proposition de loi : certaines concernant les travaux miniers, la constitution de garanties financières et la prise en compte de l’intérêt des populations ; d’autres relatives aux territoires ultramarins, compte tenu de leurs potentiels et des enjeux miniers ; enfin, ce texte vise à inscrire dans la loi l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, sujet sur lequel nous reviendrons au cours de nos débats, j’en suis persuadé.
La réforme du code minier est réclamée de longue date par l’ensemble des acteurs, institutionnels, environnementaux et économiques. Nous avons l’occasion, avec cette proposition de loi, de répondre à cette demande. C’est pourquoi, en tant que rapporteur du texte, mais également que président de la commission compétente au fond, j’invite tous nos collègues à adopter le texte issu de la commission et qui sera modifié en séance.