Intervention de Catherine Coutelle

Séance en hémicycle du 26 janvier 2017 à 9h30
Extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, rapporteure de la commission des affaires sociales :

Pour trois raisons essentielles.

Premièrement, parce que l’objet initial de la proposition de loi était de permettre que le délit d’entrave s’applique aux nouveaux outils numériques qui se sont développés au cours des vingt dernières années, et non de créer un nouveau délit d’entrave, comme le prétendent ses détracteurs. Pour cela, il est indispensable que le texte mentionne expressément ces outils, ce qui n’est pas le cas dans la rédaction proposée par le Sénat. Le texte adopté par la commission reprend donc bien la notion d’entrave « par tout moyen, y compris par voie électronique ou en ligne ».

Deuxièmement, ces nouveaux outils ne consistent pas seulement à exercer des « pressions morales et psychologiques » – expression qui figure dans la loi depuis 1993, et à laquelle personne n’avait trouvé à redire jusqu’à présent. En effet, en diffusant des informations, en particulier de fausses adresses, ils perturbent directement l’accès aux établissements pratiquant l’IVG. Le texte doit donc couvrir l’ensemble de l’article de loi, et pas seulement son dernier alinéa, qui concerne les « pressions morales et psychologiques ». C’est pour cette raison que nous modifions aussi le « chapeau ».

Enfin, et c’est sans doute la raison essentielle de l’absence d’accord sur le texte, le Sénat avait supprimé la référence à la nature des informations mises en cause par le délit d’entrave numérique. Or ces éléments avaient été introduits par l’Assemblée afin de protéger le dispositif contre le supposé risque juridique d’atteinte à la liberté d’expression et à la liberté d’opinion, qui a tant nourri nos débats en première lecture. En effet, ce que le juge pourra demain décider de sanctionner, c’est la diffusion d’informations contre l’IVG si et seulement si elle est de nature intentionnellement dissuasive et destinée à induire la personne en erreur.

Voilà, sur le fond, les explications qui rendent compte de la rédaction proposée aujourd’hui.

Avant d’en venir au texte proprement dit, je souhaiterais rappeler quelques éléments fondamentaux.

Je n’ai cessé de le répéter et je continuerai à le faire tant que ce sera nécessaire : la présente proposition de loi ne servira ni à faire fermer des sites internet, ni à pénaliser les opinions contre l’avortement. Elle ne crée pas un nouveau délit d’entrave, elle se greffe sur le délit qui existe depuis plus de vingt ans, sans que personne n’ait jamais estimé qu’il était contraire à la liberté d’expression. Je rappelle qu’aux termes de l’article 5 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas » – dit autrement : personne n’a le droit de s’ériger en censeur des autres au nom de ses convictions personnelles, aussi respectables soient-elles.

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