Intervention de Jean-Marie Tetart

Réunion du 25 janvier 2017 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Tetart, rapporteur :

Je consacrerai mon propos à la régulation et à la réforme des métiers des professionnels de l'immobilier puis à la rénovation du fonctionnement des copropriétés.

J'aimerais tout d'abord souligner la création du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières (CNTGI), mis en place dès l'été 2014. Son but est d'associer l'ensemble des professionnels de l'immobilier à l'élaboration des nombreux décrets d'application de la loi ALUR. Il a travaillé très activement en donnant des avis sur pas moins de 17 décrets. Toutefois, l'absence de personnalité morale et de ressources financières propres a limité sa capacité de travail et son autonomie.

Certaines des organisations que nous avons auditionnées ont exprimé leur déception quant au fait que les propositions du conseil n'ont pas été suivies par le Gouvernement – c'est le cas notamment pour le contrat type de syndic. Certes, le CNTGI a été conçu comme une instance consultative et non décisionnaire mais il serait bon que les services de l'État motivent de manière plus explicite les raisons pour lesquelles telle ou telle proposition n'est pas retenue. Nous militons avec M. Daniel Goldberg pour un meilleur dialogue. Nous considérons également que les copropriétaires devraient aussi être représentés au sein de cette instance.

Reprenant une proposition émise dès 2011 dans le Livre blanc des états généraux des professions immobilières, l'article 24 de la loi ALUR a confié le soin au CNTGI de proposer au Gouvernement un code de déontologie applicable à tous les professionnels de l'immobilier. C'est sur la base de ses travaux qu'un décret fixant les règles constituant ledit code a été publié le 28 août 2015. Il a été unanimement salué. Depuis le 1er avril 2016, les professionnels de l'immobilier sont également soumis à une obligation de formation continue. Les différentes réformes ne seront pleinement effectives qu'en 2017, grâce à l'application de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, laquelle a joué un rôle très important dans l'application des dispositions de la loi ALUR en levant plusieurs obstacles.

La loi ALUR a prévu la création d'une commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières, chargée de faire appliquer ce code de déontologie. Ses modalités de fonctionnement et d'organisation devaient être fixées par un décret dont la rédaction a soulevé d'importantes difficultés. La loi n'avait, en effet, prévu aucune source de financement dédié et les discussions budgétaires interministérielles ont révélé qu'aucun ministère ne souhaitait contribuer aux frais de fonctionnement.

L'article 124 de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté a procédé à la fusion du CNTGI et de la commission de contrôle en une autorité publique dotée de la personnalité morale. Le financement de ce nouveau CNTGI sera assuré par le versement de cotisations forfaitaires acquittées par les professionnels de l'immobilier. Sa capacité d'action est désormais garantie.

J'en viens au fonctionnement des copropriétés, qui a été profondément rénové.

Le premier objectif poursuivi a été la prévention de la dégradation des copropriétés grâce à l'amélioration de la prise de décisions.

Les dispositions visant à faciliter les travaux dans les copropriétés sont désormais opérationnelles. La loi a modifié les conditions de majorité requises pour que l'assemblée générale des copropriétaires décide d'engager certains travaux : mise aux normes, modernisation des ensembles immobiliers, améliorations technologiques, ou encore transition énergétique. Ces nouvelles procédures sont unanimement saluées.

En outre, chaque syndicat de copropriétaires doit désormais constituer un fonds de travaux, mesure réclamée depuis longtemps. Il serait bon que leur création s'accompagne de la mise en oeuvre des nouveaux outils que sont le plan pluriannuel de travaux et le diagnostic technique global de copropriété pour une programmation intelligente.

Les sommes de ces fonds peuvent être placées sur un livret A. Or aujourd'hui, le plafond réglementaire est de 76 500 euros par copropriété, quelle que soit sa taille. Il faudra permettre aux grandes copropriétés de détenir plusieurs livrets A ou bien moduler le plafond, comme le prévoit la loi.

Les informations données au candidat acquéreur, afin qu'il soit pleinement conscient du niveau de charges dont il devra s'acquitter, ont fait débat. Le Parlement a décidé qu'il devrait se voir communiquer les principaux documents relatifs à la copropriété au stade de la promesse de vente et non plus de l'acte authentique de vente. Certains ont souligné que ce changement serait source de lourdeurs, compte tenu du volume des documents à fournir. Ces craintes n'ont plus lieu d'être : l'ordonnance du 27 août 2015 autorise désormais la transmission dématérialisée.

Nous considérons que les difficultés de mise en oeuvre de ces dispositions auraient pu être évitées si une date d'entrée en vigueur différée avait été prévue afin de laisser davantage de temps aux professionnels et aux consommateurs pour s'adapter à la nouvelle législation.

La loi comporte, en outre, plusieurs dispositions destinées à apaiser les relations entre les syndics et les copropriétaires.

Elle a en particulier prévu un contrat type de syndic défini par décret en Conseil d'État fondé sur une forfaitisation des prestations courantes. Défini par le décret du 26 mars 2015, il s'applique aux contrats conclus ou renouvelés depuis le 1er juillet 2015. Sa mise en oeuvre ne fait pas consensus. Les professionnels de l'immobilier estiment que la rédaction retenue par le Gouvernement n'est pas suffisamment claire et que la liste limitative des prestations particulières pouvant donner lieu au versement d'une rémunération spécifique complémentaire est trop courte. Les associations de copropriétaires et de consommateurs se sont en revanche félicitées du contenu de ce décret. D'après elles, ce contrat type sera utile pour comparer les offres des différents syndics et limiter les abus.

Ces mêmes associations dénoncent une hausse des frais des syndics à la suite des réformes décidées par la loi ALUR. Certaines estiment que le prix des forfaits a augmenté en moyenne de plus de 20 %. Certes, la forfaitisation peut conduire les syndics à augmenter le prix des prestations annexes ou des forfaits eux-mêmes mais, en l'absence d'observatoire des pratiques commerciales, on ne peut dire qui a raison. Il semblerait toutefois que certains syndics aient augmenté leurs tarifs depuis 2015.

S'inspirant des travaux du sénateur Daniel Braye, la loi ALUR a créé un nouvel outil d'intervention des pouvoirs publics : les opérations de requalification des copropriétés dégradées (ORCOD). Deux premières opérations ont été lancées, l'une à Clichy-sous-Bois, l'autre à Grigny. Déclarées d'intérêt national, elles sont pilotées par l'établissement public foncier d'Île-de-France (EPFIF). Nous n'avons pas encore assez de recul pour juger des résultats mais nous estimons que les procédures créées par la loi ALUR sont suffisamment souples et fournissent aux opérateurs une boîte à outils qui leur permet d'être plus efficaces.

Je laisse maintenant la parole à M. Daniel Goldberg pour évoquer la prévention des expulsions et la lutte contre l'habitat indigne.

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