Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 21h30
Harcèlement sexuel — Après l'article 1er, amendement 28

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

En vous écoutant, monsieur le député, je pensais à des faits différents qui ont suivi des logiques analogues. Pendant très longtemps, face aux violences conjugales, on a laissé les femmes complètement démunies. Les bureaux d'aide aux victimes n'existaient pas et les policiers n'avaient pas reçu de formation suffisante pour faire face à ces situations.

La victime, qui subissait les violences conjugales, devait se débrouiller pour quitter l'appartement – alors qu'elle pouvait être dépendante économiquement –, et pour faire entendre sa cause et la faire prendre en charge etc. Heureusement, nous avons changé les choses.

La logique à l'oeuvre est à peu près la même. Aujourd'hui, dans le cas de violences conjugales, c'est celui qui frappe qui doit s'en aller et se débrouiller. Concernant ce qui se passe dans l'entreprise, je préfère que ce soit le harceleur qui soit mis en difficulté et en situation soit de cesser, soit de trouver un emploi ailleurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Nous cherchons à protéger la victime en la traitant comme sujet de droit, non en la maternant, mais en l'armant juridiquement de façon qu'elle puisse faire valoir ses droits et faire respecter son intégrité. Notre logique est totalement différente : nous devons faire en sorte que la victime puisse agir, mais en aucune manière contribuer à créer un effet psychologique qui l'entraînerait à penser que sa situation est insupportable, mais qu'elle finirait bien par s'en aller un jour et, ce jour-là, le harceleur verrait bien. Non, il ne verra pas grand-chose parce que la victime n'aura pas les éléments pour démontrer quoi que ce soit.

Nous créons les conditions psychologiques pour que la victime soit incitée à agir rapidement et nous faisons, je l'avoue sans état d'âme, peser un peu d'insécurité sur les harceleurs.

(L'amendement n° 28 n'est pas adopté.)

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