Intervention de Pascale Got

Séance en hémicycle du 31 janvier 2017 à 15h00
Adaptation des territoires littoraux au changement climatique — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Got, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Madame la présidente, madame la ministre, chère Chantal Berthelot, chers collègues, permettez-moi, à l’occasion de cette deuxième lecture par notre assemblée, d’être très directe et d’aller droit au but. Chers collègues, je vous demande d’arrêter le kidnapping de cette proposition de loi sur le recul du trait de côte !

Je m’adresse à tous ceux qui se sont égarés, à tous ceux qui voudraient prendre, ce soir, le chemin de la déraison emprunté par certains sénateurs pour détricoter la loi Littoral : vous vous trompez de texte ! Ce texte parle du changement climatique, de la progression de l’érosion, du recul du trait de côte, de la nécessité de protéger nos écosystèmes, d’aider à la gestion des zones soumises à l’érosion côtière, de développer des stratégies de relocalisation.

En polluant cette proposition de loi par des amendements hors sujet, vous mépriseriez les objectifs de ce texte ; vous mépriseriez le travail que nous avons réalisé avec Chantal Berthelot comme de celui accompli par les membres du Comité stratégique national du suivi de l’évolution du trait de côte, auxquels j’associe les élus de terrain, les associations environnementales et les scientifiques ; vous mépriseriez l’impatience des élus de disposer des outils adéquats pour mettre en place leur stratégie locale de repli ; vous mépriseriez enfin, et tout simplement, les conséquences qu’une telle attitude pourrait entraîner pour les biens et les personnes.

Chers collègues, pour toutes ces raisons, vous avez devant vous une rapporteure en colère qui en appelle à votre responsabilité de législateur pour empêcher ceux qui, après plusieurs tentatives infructueuses, tentent in extremis, à quelques jours de la fin de la législature, de faire aboutir leurs velléités d’opposition contre la loi Littoral.

Votre responsabilité, c’est de rester dans le cadre du texte et rien que dans le cadre du texte. Il vous honorerait de reconnaître les avancées et les innovations de cette proposition de loi telle qu’elle a été pensée, travaillée et votée en première lecture à l’Assemblée nationale et en commission du développement durable en deuxième lecture.

Est-il nécessaire d’en rappeler les objectifs ? Je crois que oui : anticiper le recul du trait de côte ; mieux protéger les écosystèmes ; faciliter l’approbation des plans de prévention des risques littoraux ; maintenir l’activité sur le littoral ; mieux informer ; développer la culture du risque. C’est cela et uniquement cela que nous avons souhaité faire !

Faut-il rappeler les avancées permises par ce texte ? À nouveau, je le crois. Ces avancées, ce sont la reconnaissance juridique du recul du trait de côte ; la reconnaissance d’une stratégie nationale et de stratégies régionales et locales de gestion du trait de côte ; leur articulation avec les différents documents d’urbanisme – SCoT, PLU, carte communale – ; l’adaptation des plans de prévention des risques au phénomène de l’érosion et à sa temporalité. Avec ce texte, l’érosion trouve le même statut que la submersion et l’inondation ; le triptyque que nous avons tant attendu est enfin posé. Là encore, c’est cela que nous avons souhaité faire, et uniquement cela !

Dois-je vous rappeler les innovations dont ce texte est porteur ? Je le crois, une fois de plus ! Je citerai d’abord la création de deux nouveaux zonages facultatifs. La zone de mobilité du trait de côte – ZMTC –, tout d’abord, destinée à protéger les écosystèmes et à garantir la qualité et à la cohérence des ouvrages de protection, répond à une demande forte des territoires ultramarins, mais trouvera aussi son sens sur les littoraux métropolitains. Quant à la zone d’activité résiliente et temporaire – ZART –, elle tend à faciliter les opérations d’aménagement pour risque de recul du trait de côte, en s’adaptant à la temporalité et à la résilience si particulières de l’érosion. Il suffit de dire, pour mieux vous convaincre, qu’il s’agit d’éviter des situations du type Xynthia et les erreurs commises lors de la gestion des conséquences de cette tempête.

Autre innovation, la création d’un bail réel immobilier littoral – BRILi – pour faciliter la gestion de biens pour les collectivités, l’État ou les personnes privées, tout en prenant en considération les intérêts des uns et des autres. La spécificité de ce bail immobilier est de maintenir l’attractivité des littoraux tout en organisant et en finançant la destruction des biens. Cet outil permettra d’éviter des situations comme celle que connaît l’immeuble Le Signal, mais aussi certaines conséquences de tempêtes telles que Xynthia. Encore une fois, c’est cela, et uniquement cela, que nous avons souhaité faire !

Je ne peux pas conclure mon propos sans évoquer l’aspect financier. Un montage spécifique a été créé pour accompagner les opérations d’aménagements liées à l’érosion et résoudre plus spécifiquement le problème de l’indemnisation des copropriétaires du Signal à Soulac-sur-Mer – exemple même du défaut d’anticipation ! C’est cela que nous avons souhaité faire, et uniquement cela !

Telle est, mes chers collègues, l’essence du texte adopté par la commission du développement durable. Où est la loi Littoral dans cette proposition de loi ? Nulle part, sauf lorsqu’il s’agira, après mise en place et respect du processus de zonage, de faciliter la relocalisation. Je l’ai précisé dans un amendement voté en commission, peut-être plus restrictif que celui proposé par le Gouvernement au Sénat, mais qui n’a pas pour autant satisfait les sénateurs.

Je vous remercie, madame la ministre ainsi que l’ensemble de vos services, pour l’écoute et la considération dont vous avez fait preuve afin de résoudre des situations inappropriées. Vous aurez à coeur, vous l’avez dit, de reformuler vos propositions par des amendements, montrant à nouveau votre sens de l’écoute là où je dois dire que pour ma part, je me suis refermée en commission.

Pour conclure, je vous demande chers collègues – notamment à ceux qui ne sont pas confrontés aux problèmes d’érosion ni responsables de stratégie locale de relocalisation – de ne pas compromettre ni retarder l’adoption de ce texte. Je le répète : voter cette proposition de loi, c’est voter pour un projet protecteur, solidaire et responsable.

Ce texte protège notre littoral au bénéfice des générations futures. Les élus de terrain, initiateurs de stratégies face à l’érosion, l’attendent impatiemment. Les copropriétaires de l’immeuble Le Signal l’attendent également. Je ne crois pas pouvoir être plus explicite, plus volontaire ni plus respectueuse. Soyez aussi respectueux, faites preuve de solidarité à leur égard !

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