Intervention de Jean-Marc Ayrault

Réunion du 17 janvier 2017 à 18h00
Commission des affaires étrangères

Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international :

Je ne savais pas que Donald Trump avait ici un représentant en la personne de Jacques Myard. (Sourires.)

Sérieusement, nous devons faire attention, notamment lors de la négociation avec le Royaume-Uni une fois que sera activée la procédure de l'article 50 du Traité sur l'Union européenne : nous devrons agir dans la clarté et dans la cohésion. L'Europe doit réagir et défendre son projet. Jusqu'à présent, les États-Unis avaient toujours soutenu la construction européenne, avec certes plus ou moins d'enthousiasme. Nous verrons bien si cette attitude va changer.

Il conviendra, dans ce contexte, de voir ce que les Etats-Unis vont faire sur d'autres sujets comme l'Ukraine, le nucléaire iranien, le multilatéralisme des relations commerciales…

Ma position est claire. Le président élu prend ses fonctions le 20 janvier et il viendra sans doute en Europe à l'occasion de la prochaine réunion du G20. Une fois mon homologue, Rex Tillerson, nommé, je prendrai contact avec lui pour discuter. La France est autonome, indépendante, a sa propre vision, mais n'éprouve pas d'hostilité vis-à-vis des États-Unis qui sont un partenaire, un allié et dont nous souhaitons qu'ils jouent leur rôle. Cependant de très nombreuses questions restent posées.

J'évoquerai ensuite le Brexit. La question n'est pas vraiment de savoir s'il sera « dur » ou « mou » mais de connaître la date à laquelle Theresa May va transmettre la notification de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Il faut parallèlement que les 27 se dotent d'un mandat de négociation, sur la base d'une proposition de la Commission, afin d'aborder au mieux les discussions sur les conditions du « divorce ». En effet les questions à résoudre, notamment financières, seront difficiles.

Ensuite, et il ne faudra pas confondre les deux étapes, il s'agira de négocier les relations à venir du Royaume Uni avec l'Union européenne.

Tout cela demandera du temps, de la méthode et, j'y insiste, de la cohésion. Or, en la matière, l'axe franco-allemand sera déterminant. Il faudra éviter de céder à la tentation de négociations parallèles, branche économique par branche économique. L'ambassadeur d'Allemagne m'a bien confirmé, ce matin-même, que son gouvernement indiquait aux industriels allemands de n'en rien faire, sauf à prendre le risque de précipiter la fin de l'Europe. Nous abordons une phase nouvelle de la construction européenne et qui n'est pas sans susciter une inquiétude. En même temps, de cette crise existentielle sans précédent peut naître une nouvelle avancée. La France, en tout cas, restera très vigilante et cherchera à se rendre utile sur des sujets précis plutôt que de se contenter de propos généraux sur ce que devrait être l'Europe pour les vingt ans à venir. Nous devons nous montrer opérationnels, pragmatiques. Donc, encore une fois, je crois à la nécessité d'entretenir la cohésion et la relation franco-allemande.

Votre dernière interrogation, madame la présidente, portait sur l'extraterritorialité des lois américaines. Vous avez fait allusion à ma rencontre avec Pierre Lellouche et Karine Berger – que je remercie pour leur travail, très utile. J'ai demandé aux services du Quai d'Orsay et du Trésor d'accélérer les travaux en la matière.

Un mot, pour finir, sur l'accord-cadre signé avec la République de Maurice, qui semble provoquer de nombreux malentendus. Cet accord bilatéral, négocié par la majorité précédente, porte sur l'île de Tromelin et ne remet pas en cause notre souveraineté mais, pour éviter que le débat ne s'envenime, le Gouvernement a souhaité retirer cette question de l'ordre du jour de l'Assemblée ; il appartiendra donc à la prochaine législature de la traiter.

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