Monsieur le ministre, nous savons, l'un et l'autre, que nous ne sommes pas d'accord sur certains points, et nous ne le serons toujours pas après mon intervention. Il n'y a pas, d'un côté, le camp de la paix et, de l'autre, le camp de la guerre. Tout le monde veut la paix, mais les façons d'y parvenir peuvent être différentes. En tout état de cause, il serait temps pour nous, Français, de nous demander si nous n'avons pas commis des erreurs. Nous avons eu 250 morts sur notre sol et, comme je l'ai dit tout à l'heure lors des questions au Gouvernement, on n'a qu'un seul mot à la bouche : « Colonisation ».
Je peux vous dire, pour avoir parlé avec de nombreux membres de son administration, que Trump compte bien transférer l'ambassade américaine à Jérusalem. Il n'y a là rien d'extraordinaire, du reste : Jérusalem est la capitale du peuple juif depuis 2 000 ans, la capitale de l'État d'Israël. Vous estimez qu'il s'agit d'une provocation, mais ne pensez-vous pas que les Israéliens ou les amis d'Israël peuvent également voir comme une provocation le fait que la France se soit abstenue, après avoir voté contre, sur la résolution de l'UNESCO ?
Noëlle Lenoir, ancien membre du Conseil constitutionnel, ancienne ministre des affaires européennes et ancienne déontologue de l'Assemblée nationale, n'estime-t-elle pas, dans une tribune que je vous invite à lire, que la conférence de Paris va attiser la haine ? Je suis profondément convaincu que vous vous trompez. Bien entendu, des concessions seront nécessaires : Israël devra quitter une partie des territoires. Mais qui peut imaginer qu'il se retirera de Jérusalem-Est ? Cela n'arrivera jamais !
Je sais que nos positions sur la Syrie sont globalement proches, car je suis beaucoup plus sceptique que certains de mes collègues Républicains sur l'attitude à adopter vis-à-vis de Bachar el-Assad qui, selon moi, ne fait pas partie de la solution. Mais je me souviens d'Alain Juppé, ministre des affaires étrangères, m'assurant, après en avoir parlé avec notre ancien ambassadeur à Damas, qu'il n'y avait pas de massacres en Syrie. Depuis, la situation a évolué…
J'ai, hélas ! le sentiment que, pour les Israéliens, nos votes nous ont mis hors-jeu. Beaucoup d'entre eux pensent, en effet, que le Gouvernement, notamment le Quai d'Orsay sont hostiles à Israël. Je sais que tel n'est pas le cas ; je suis certain, madame la présidente, monsieur le ministre, que vous êtes des amis d'Israël. Mais j'estime que la solution que vous prônez, et que prône la gauche en général, n'est pas la bonne. C'est mon droit et, en lisant la tribune de Noëlle Lenoir ce matin, je me suis dit que d'autres personnes sensées partageaient peut-être mon avis.
Il ne s'agit pas d'une guerre de territoires. Tous les premiers ministres israéliens, notamment socialistes, qui ont essayé – Barak, Olmert, Rabin, Peres – se sont trompés. En face, on ne veut pas d'un État à côté d'Israël ; on revendique le droit au retour et on refuse de céder sur Jérusalem. Or, ce n'est pas favoriser une résolution du conflit que d'être ainsi arc-bouté sur ses positions. Les uns et les autres doivent s'asseoir à la table des négociations et faire des concessions. Israël devra certainement se retirer de certains territoires, mais il ne sortira jamais de Jérusalem.
Quant à Trump, je l'apprécie, même si je désapprouve notamment son attitude vis-à-vis des femmes. Quoi qu'il en soit, il a été élu par la majorité des Américains et nous devons respecter notre allié, même s'il sort du moule.