Ces dispositions relatives aux consommateurs et aux frais bancaires sont essentielles. Je puis vous assurer que ce sont celles que les Français retiendront – non que les autres aspects du texte soient mineurs, mais parce qu'ils ont un caractère plus technique.
Alors qu'il n'allait pas de soi de donner à ce texte une telle dimension, je l'ai souhaité personnellement. Dans l'approche politique qui est la nôtre, il faut que la loi se traduise par des progrès concrets : ce que nos concitoyens voient des banques, c'est leur agence, leur conseiller, les crédits qu'ils souscrivent, les frais qu'on leur impute. De ce point de vue, le texte introduit des avancées considérables.
La question des frais bancaires a cristallisé de nombreux débats dans les groupes appartenant à la majorité. Je suis prêt, je le répète, à des avancées par rapport au texte initial. Cela dit, les amendements proposés n'atteignent pas le point d'équilibre qui nous permettrait de trancher de manière sereine et éclairée. Je suggère par conséquent que nous nous donnions un peu de temps et abordions le sujet en séance.
On le sait, les frais prélevés par les banques, notamment en cas de fonctionnement irrégulier des comptes – la commission d'intervention s'élève en moyenne à 8 euros par opération –, peuvent vite atteindre des montants insupportables, surtout pour les populations fragiles : entre 100 et 300 euros par mois.
Le projet de loi initial propose de cibler les mesures sur ces populations fragiles. Mais il faut aussi envisager la question sous l'angle opposé : les frais représentent une part importante des revenus des banques.
Que l'État souhaite limiter le poids de ces frais pour les plus fragiles est une évidence : il n'est pas acceptable que le modèle économique de la banque de détail repose sur la fragilité de nos concitoyens. Au-delà, la puissance publique souhaite empêcher que les commissions d'intervention ne représentent des montants trop importants pouvant peser lourdement dans le budget des ménages, comme le montre un dossier récemment publié par le journal Le Monde.
Cependant, ce dossier souligne aussi que les banques pratiquant les frais les plus bas sont, de loin, les banques en ligne, c'est-à-dire les banques sans agences. À titre d'exemple, la banque de détail du Crédit agricole emploie 98 250 personnes dans 9 150 agences pour 26 millions de clients, soit 1 employé pour 264 clients, tandis que Boursorama, la première banque en ligne, emploie 808 employés pour 380 000 clients, soit 1 employé pour 470 clients, et propose des frais très peu élevés. Sachant que les clients de Boursorama sont généralement aisés, que serait la version low cost ?
Je vous invite donc à la sagesse. Je ne voudrais pas qu'en durcissant à l'excès les conditions, nous poussions les banques à multiplier les rejets pour compenser la diminution de leur résultat. Nous devons réfléchir au modèle bancaire que nous voulons promouvoir.
L'élargissement du plafonnement des commissions d'intervention aux classes populaires et aux classes moyennes me paraît être une bonne piste, même si cela représente plusieurs centaines de millions de revenu en moins pour les banques. Gardons-nous cependant d'un certain purisme qui aurait des conséquences non seulement sur l'emploi mais aussi sur nos concitoyens les plus fragiles : ceux-ci seraient les premières victimes des rejets et des restrictions que les banques pourraient multiplier par manière de représailles. Une mesure radicale comme celle qu'a proposée M. Thévenoud peut avoir des effets pervers dans la vie concrète.