En ce sens, nous avons, je tiens à le dire, une vraie convergence avec les auteurs de la proposition de résolution. Nous sommes en revanche plus circonspects quant à la méthode qu’ils ont choisie, vous ne m’en voudrez pas, cher Marc Dolez, de le relever.
Nous sommes en effet sceptiques sur la portée d’une proposition de résolution européenne qui permet seulement à l’Assemblée nationale d’émettre un avis. Votre résolution prévoit en effet, monsieur le rapporteur, que le Parlement soit consulté. Seulement consulté ! Nous considérons, pour notre part, qu’il ne doit pas se contenter de donner son avis mais qu’il doit donner son feu vert, et ce avant la mise en application provisoire de l’accord.
Toute alternative nous affaiblirait et, ce faisant, affaiblirait la voix de la France, dans un contexte international marqué par une défiance et une hostilité sans précédent de nos partenaires américains à l’égard de l’Europe.
Il est évident qu’une proposition de résolution européenne n’est pas à la hauteur de la situation. Notre groupe demande par conséquent qu’avant la fin de la session, le 22 février prochain, l’Assemblée nationale se prononce par un vote sur l’adoption de ce traité. En outre, il estime que la question du CETA soulève trois problématiques majeures qui ne sont malheureusement pas abordées dans la proposition de résolution.
En premier lieu, le texte passe sous silence l’indispensable harmonisation des règles économiques, fiscales, sociales et environnementales au sein de l’Union européenne. Signer un accord économique et commercial avec un pays tel que le Canada alors même que ces règles n’ont pas été harmonisées au sein de l’Union européenne nous conduira inévitablement à fragiliser plus encore les secteurs d’activité qui, en France, sont déjà exposés à la concurrence européenne. Dans l’attente de cette véritable et nécessaire harmonisation, nous considérons que le savoir-faire agricole européen et français doit être préservé. Les exigences que nous nous sommes fixées en termes de qualité comme de traçabilité de la production justifient que l’agriculture fasse figure d’exception.
Par ailleurs, mes chers collègues, il existe une exception culturelle, à laquelle nous sommes tous très attachés : nous considérons, par conséquent, que la culture n’est pas un bien comme un autre et qu’elle doit être protégée des périls auxquelles une mondialisation sauvage l’exposerait.
Les députés du groupe UDI considèrent que notre alimentation n’est pas non plus un bien comme un autre, compte tenu de ses effets en matière de santé, de préservation de l’environnement ou de protection de la biodiversité. Elle est en outre liée à notre agriculture, nom du lien immuable qui unit l’homme à la terre, qui façonne nos paysages et qui fait battre le coeur de la ruralité.
Enfin, nous considérons que cette proposition de résolution aborde, et c’est malheureux, la question des relations économiques et commerciales de l’Union européenne par le petit bout de la lorgnette.
En effet, dans la perspective des négociations en vue d’un traité avec le Japon ainsi qu’avec nos partenaires de la zone Mercosur, il était nécessaire que toute la méthode de négociation des accords de libre-échange avec nos partenaires économiques et commerciaux soit révisée.
À cet égard, nous sommes favorables à une consultation en amont des parlements nationaux comme de la société civile, afin qu’une feuille de route claire soit adoptée par chaque État membre, ces feuilles de routes constituant la base du mandat donné à la Commission européenne.
Pour chacune des négociations, il est nécessaire de constituer une délégation de parlementaires – députés et sénateurs issus de toutes les formations politiques – de manière à ce que la représentation nationale puisse, à chaque point d’étape, être associée à l’avancement des discussions.
Mes chers collègues, cette proposition de résolution soulève un vrai débat indispensable à notre démocratie. Mais malheureusement, elle n’apporte pas de réponses à la hauteur des enjeux. Aussi, et pour toutes les raisons que j’ai évoquées, nous ne pouvons la soutenir.
En revanche, monsieur le secrétaire d’État, notre assemblée s’honorerait à obtenir du Gouvernement un engagement à ce qu’un débat suivi d’un vote soit organisé dans cet hémicycle avant l’adoption du CETA. J’invite aujourd’hui chaque groupe parlementaire à se prononcer en faveur d’un tel débat. Donnons véritablement à notre assemblée les moyens de se déterminer sur la question essentielle de l’adoption de ce traité.
Je sais que la recherche de ce consensus est ambitieuse mais j’espère que vous y apporterez, les uns comme les autres, votre soutien. J’espère en outre que le Gouvernement apportera, pour une fois, une réponse tout à fait claire à cette proposition.