Intervention de Delphine Batho

Réunion du 31 janvier 2017 à 16h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho, rapporteure :

Cette proposition de résolution européenne fait suite au rapport de la mission d'information sur l'offre automobile que nous avons conduite pendant un an, mission à laquelle appartenaient certains membres de votre commission, tel notre collègue Philippe Duron.

La mission d'information a présenté 120 propositions, parmi lesquelles une réforme radicale du système européen de normes et de contrôle régissant l'industrie automobile européenne. Un an et demi après le début de l'affaire Volkswagen, il ne s'est, en effet, pratiquement rien passé en Europe. Le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne ont tout au plus introduit quelques procédures nouvelles de test. Mais, au-delà, l'Europe n'a pas réagi, notamment vis-à-vis des victimes de l'affaire Volkswagen et du logiciel « truqueur » qui sont deux fois plus nombreuses pour la seule France qu'aux États-Unis. Pourtant, en termes de reconnaissance de leur préjudice, leurs droits ne sont pas équivalents à ceux qui ont été reconnus par le groupe Volkswagen aux États-Unis.

En janvier 2016, la Commission européenne a mis sur la table une proposition visant à réformer la réglementation régissant l'homologation et la surveillance des véhicules en circulation. Malgré certaines avancées, cette réforme paraît largement insuffisante au regard des défaillances constatées. On a même pu parler de complicité européenne. Si les constructeurs ont leur part de responsabilité, le système normatif a aussi la sienne. Depuis des années, il était de notoriété publique, non seulement que les résultats des protocoles de test présentaient des écarts très importants avec ceux obtenus dans la réalité, mais aussi que des logiciels truqueurs existaient. Les qualifiant de dispositifs d'invalidation, la réglementation européenne autorisait un certain nombre de dérogations à leur interdiction. Une information judiciaire a été ouverte sur ce sujet à l'encontre du constructeur Renault.

La proposition de résolution européenne reprend les propositions de la mission d'information et a déjà été adoptée par la commission des affaires européennes. Nous l'examinons à un moment important, car la commission d'enquête du Parlement européen sur l'affaire Volkswagen va bientôt rendre son rapport et ses conclusions. Une discussion s'ouvre ainsi sur les réformes qui vont s'engager au niveau européen.

Avec l'affaire Volkswagen, il en va tout d'abord de la santé des citoyens : elle doit être protégée alors que la pollution de l'air est devenue la troisième cause de mortalité en France et qu'elle tue chaque année plus de 500 000 Européens. Or les seuils de référence européens, non seulement ne sont pas toujours respectés dans les États membres, mais demeurent aussi inférieurs aux seuils prescrits par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). C'est l'un des points de la résolution.

Un autre point concerne les techniques d'optimisation, l'interdiction des dérogations en ce qui concerne les dispositifs d'invalidation ainsi que l'obligation d'homologuer les logiciels que l'industrie utilise. Alors que ceux-ci jouent désormais un rôle central dans le système de traitement de la pollution, et que ce rôle sera plus important encore demain avec l'essor du véhicule autonome, ils ne font l'objet d'aucune homologation par la puissance publique.

Enfin, le texte reprend les trois piliers des préconisations du rapport. D'abord, la préparation transparente d'une nouvelle norme Euro 7 « multicritères » intégrant tous les paramètres de pollution et respectant la neutralité technologique, c'est-à-dire s'appliquant avec la même vigueur aux motorisations essence et aux motorisations diesel. Ensuite, il s'agit d'établir une prévisibilité pour l'industrie européenne :les nouvelles normes seraient annoncées cinq ans à l'avance pour encourager la recherche et développement et les adaptations industrielles. Enfin, le point le plus important, eu égard aux débats de la Commission d'enquête du Parlement européen, c'est de plaider pour la création d'une instance indépendante de contrôle au niveau européen, donc une agence européenne de contrôle des véhicules en circulation. De fait, à l'issue de nos travaux, nous avons acquis la conviction qu'il importait, certes, d'améliorer le dispositif d'homologation des véhicules pour qu'il soit plus rigoureux et que les tests soient plus représentatifs des conditions de conduite sur route, mais que le plus vertueux est encore de disposer d'un système de contrôle aléatoire concernant des véhicules en circulation sur route, tel qu'il permette de vérifier que les engagements pris par un constructeur automobile sont respectés.

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