L'actualité, depuis les premières révélations du Dieselgate aux États-Unis en septembre 2015 avec le groupe Volkswagen, jusqu'à ses derniers retentissements avec le groupe Fiat-Chrysler, nous a révélé l'ampleur des carences de la régulation et du contrôle des normes de l'industrie automobile à l'échelle européenne. Rappelons la systématisation des pratiques de fraude à la réglementation que ce scandale a mis en avant. Ces pratiques s'appuient sur des logiciels truqueurs capables de fausser les résultats des tests sur les émissions de CO2 et de NOx. Cette fraude caractérisée, non seulement ruine la confiance qui doit exister entre les constructeurs et les consommateurs, mais elle remet aussi en cause tout le processus de normes et les règlements européens mis en place sur les émissions des véhicules à moteurs à combustion depuis 1992 avec Euro 1.
Ce scandale n'aurait pas eu cette portée considérable si nous ne connaissions pas l'impact de la pollution atmosphérique sur la santé publique, aujourd'hui, elle est une cause avérée de mortalité prématurée, notamment pour les personnes vulnérables. Avec 48 000 décès annuels dus aux particules fines, nous ne sommes plus face uniquement à un scandale économique, mais clairement à un enjeu sanitaire d'envergure.
Notre rapporteure a eu raison de rappeler qu'il est anormal qu'aucune réparation aux victimes ne soit prévue en Europe. On ne peut donc que se féliciter, à la suite de cette onde de choc, de la mise en place rapide par notre Assemblée de la mission d'information sur l'offre automobile française, qui s'est faite dans une approche riche, complexe et passionnante. Il ne s'agissait pas seulement de dénoncer ou de sanctionner les constructeurs, mais surtout de permettre au secteur automobile, qui emploie dans notre pays plus de 440 000 personnes, de s'adapter aux mutations technologiques et industrielles liées à la transition énergétique.
Ayant participé à cette mission, je tiens à rendre hommage à notre présidente et à notre rapporteure pour la qualité et le sérieux des travaux. Nos conclusions ont été guidées par la volonté de faire de ce Dieselgate une opportunité de réformer en profondeur le système actuel, depuis la simplification des normes et leur plus grande visibilité jusqu'aux systèmes permettant l'efficacité de leur contrôle et la sanction de leurs violations.
C'est donc bien à l'échelle européenne que devra nécessairement se jouer demain une action globale et cohérente, sans laquelle échouera inévitablement notre volonté politique de lutter contre cette fraude industrielle qui semble s'être érigée en système. Trop de dérogations ont affaibli la mise en oeuvre des normes Euro.
Notre ambition doit poursuivre trois objectifs majeurs : reconquérir la confiance des consommateurs et des parties prenantes, protéger la santé des personnes exposées aux émissions et permettre aux constructeurs de s'adapter à la nécessaire décarbonation de la mobilité.
La résolution reprend plusieurs des 120 propositions du rapport Batho, parmi les plus importantes. Il convient, non seulement de fixer une norme unique Euro 7 et une réglementation claire, permettant une comparaison effective entre les véhicules, mais aussi de mettre en place un système de contrôle cohérent au plan européen. Il s'agit également d'instituer des tests en utilisation réelle des véhicules (Real Driving Emissions ou RDE) et de créer les bonnes conditions pour contrôler ces tests de façon aléatoire.
Enfin, il importe de revoir le cadre de réception des véhicules à moteur, aujourd'hui trop complaisant pour les constructeurs.
La proposition de notre rapporteure de créer une agence européenne indépendante en charge de la surveillance du marché et du contrôle de conformité va ainsi dans le bon sens : elle apportera à la Commission européenne des outils dont elle manque aujourd'hui cruellement, et elle seule aura la capacité, par la démonstration de son action préventive et punitive, de redonner confiance aux Européens sur la capacité communautaire à agir.
Mais l'intelligence du rapport de la mission d'information et de cette résolution aujourd'hui, c'est de s'inscrire dans un processus de mutation de l'industrie automobile en misant sur sa capacité d'innovation. Dans le cadre de l'élaboration d'une norme Euro 7, le principe de neutralité technologique et la « règle des cinq ans » devraient permettre aux industriels de s'adapter et de trouver les moyens d'une décarbonation efficace des automobiles.
C'est un soutien plein et entier que le groupe socialiste, écologiste et républicain (SER) apporte à ce texte, qui enverra les bons signaux à Bruxelles sur notre ambition et notre détermination à enclencher une action collective forte, pour ainsi prévenir, autant que faire se peut, ces pratiques industrielles frauduleuses et inacceptables.