Intervention de Jacques Lucas

Réunion du 31 janvier 2017 à 14h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l'Ordre des médecins, délégué général aux systèmes d'information en santé :

La question étant éminemment politique, il n'appartient pas au CNOM de se prononcer, sauf pour rappeler l'attachement de l'Ordre à l'équité dans l'accès aux soins et à l'absence de discrimination.

Nous nous retrouvons dans la troisième recommandation de la Cour des comptes qui incite à reconnaître à la CNAMTS le statut d'« opérateur d'importance vitale », mais aussi à la soumettre aux « règles et contrôles périodiques externes de sécurité y afférents », de manière qu'elle ne soit pas juge et partie. C'est dans cette voie que la réflexion doit se poursuivre et, même si notre religion n'est pas entièrement faite, nous nous engageons dans la voie de contrôles a posteriori assortis d'audits extérieurs rendus publics. Cela étant, on ne saurait se satisfaire d'un audit qui ne donnerait lieu qu'à un nouveau rapport courroucé de la Cour des comptes. Il faut prévoir une sanction financière proportionnelle au chiffre d'affaires de l'entreprise fautive, car si l'on s'en tient à une amende de 150 000 euros, les très gros opérateurs, étant donné l'ampleur des bénéfices qu'ils retireront de l'exploitation des données auxquelles ils auront accès, choisiront d'assumer ce risque. Je partage donc le point de vue exprimé devant vous par M. Christian Babusiaux à ce sujet.

Je ne pense pas que le recensement des pratiques individuelles en médecine de ville fondé sur les données extraites du SNIIRAM soit une voie très prospère. On connaît les classements de services hospitaliers faits à partir des données du PMSI et parus dans la presse, qui incitent, par exemple, les patients qui doivent subir une opération chirurgicale liée à une affection thyroïdienne à se rendre pour cela dans une certaine clinique nantaise plutôt qu'ailleurs. Il s'agit d'une appréciation collective sur la qualité d'un service donné ; or, dans un même établissement, les niveaux de compétence selon les services peuvent varier d'« excellent » à « bien », et nous pensons qu'une équipe ne se maintiendra pas si elle compte en son sein un canard très boiteux, car il portera inévitablement atteinte au groupe.

Au Royaume-Uni, on utilise les données de santé pour mesurer la qualité des pratiques professionnelles en redescendant de la structure de regroupement jusqu'à l'individu. Il serait redoutable que nous nous engagions dans cette voie, qui provoquerait appréhensions et révolte – et pourquoi individualiser les praticiens alors qu'on se refuse à individualiser les patients ?

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