Intervention de Alain Vidalies

Séance en hémicycle du 9 février 2017 à 15h00
Ordonnances relatives à la production d'électricité et aux énergies renouvelables — Présentation

Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission mixte paritaire, mesdames et messieurs les députés, il y a dix-huit mois, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte était promulguée, ouvrant la voie à la stratégie nationale bas-carbone, à la programmation pluriannuelle de l’énergie et à l’accord historique sur le climat obtenu à Paris le 12 décembre 2015.

Dans le cadre de la mise en oeuvre de cette loi, le développement des énergies renouvelables est la principale priorité du Gouvernement pour diversifier notre mix énergétique, réduire nos émissions de gaz à effet de serre, favoriser l’essor des filières de la croissance verte et la création des emplois de demain.

C’est pourquoi, dès le 24 avril dernier, sans attendre la publication de la programmation pluriannuelle de l’énergie – la PPE –, Ségolène Royal avait publié son volet énergies renouvelables. C’était un document très attendu par les filières des énergies renouvelables. L’ambition est considérable : par exemple, plus que tripler la puissance photovoltaïque installée, plus que doubler la puissance éolienne terrestre installée et accroître de plus de 50 % la production de chaleur renouvelable.

Grâce à cette ambition résolue, une dynamique est à l’oeuvre. Depuis 2014, la puissance éolienne et solaire installée a augmenté de 25 % : les énergies renouvelables électriques produisent désormais, à la pointe de midi, l’équivalent de six réacteurs nucléaires et contribuent à la sécurité de l’alimentation. L’éolien a progressé de 45 % en 2016.

Les projets de chaleur renouvelable et de récupération aidés par le fonds chaleur ont augmenté de près de 30 %. Au total, le fonds chaleur a ainsi permis d’accompagner près de 4 000 opérations d’investissement, pour un montant total de 1,4 milliard d’euros.

Ces résultats se traduisent en termes de créations d’emplois et de croissance verte. Au 31 décembre 2015, la filière éolienne comptait près de 15 000 emplois sur le territoire français et 800 sociétés actives dans le secteur. En 2015, la croissance du nombre d’emplois éoliens a atteint 15,6 % par rapport à 2014, avec près de 2 000 créations d’emplois supplémentaires. Par rapport à 2013, le nombre d’emplois éoliens a crû de 33,3 %, avec 3 620 emplois supplémentaires.

Pour prolonger cette dynamique, l’ordonnance relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, que ratifie l’article 1er du présent projet de loi, permet une meilleure intégration des énergies renouvelables au marché et au système électriques, et prévoit la mise en oeuvre de nouvelles procédures de mise en concurrence, plus adaptées au stade de maturité de certaines énergies renouvelables.

En particulier, cette ordonnance supprime la priorité d’appel pour les installations de production d’électricité à partir de charbon, contradictoire avec la priorité qui doit être donnée à la production à partir d’énergies renouvelables. Elle introduit une priorité d’appel pour les installations produisant de l’électricité à partir d’énergies renouvelables dans les zones non interconnectées, comme c’était déjà le cas en métropole continentale. Elle ouvre la possibilité de recourir à d’autres procédures de mise en concurrence que l’appel d’offres, comme la procédure de dialogue concurrentiel, qui tire les leçons des premiers appels d’offre éolien en mer ; cela permettra désormais de faire évoluer les projets au fil de la procédure et de réduire ainsi les délais – une telle procédure est d’ailleurs en cours dans le cadre de l’appel d’offres éolien en mer lancé au large de Dunkerque, et une autre s’appliquera pour les appels d’offres au large d’Oléron.

L’article 1er du projet de loi ratifie également l’ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité, qui permet de doter la France d’un cadre légal facilitant le développement de l’autoconsommation. Celui-ci est en effet un objectif vertueux pour les énergies renouvelables, les réseaux d’électricité et les factures énergétiques.

Le Gouvernement a ainsi lancé un appel d’offres, l’été dernier, pour le développement de l’autoconsommation dans les secteurs industriels, tertiaires et agricoles. Ségolène Royal a rendu publique la liste des soixante-douze premiers lauréats de cet appel d’offres, qui a rencontré un très grand succès, témoignant de l’ambition des territoires, des citoyens et des acteurs économiques d’évoluer vers un système énergétique plus décentralisé.

L’ordonnance définit les opérations d’autoconsommation, en reconnaissant notamment l’autoconsommation collective. Elle contraint les gestionnaires de réseau à faciliter les opérations d’autoconsommation. Elle prévoit l’établissement par la Commission de régulation de l’énergie d’une tarification d’usage du réseau adaptée aux installations en autoconsommation, afin de tenir compte des réductions de coût d’utilisation des réseaux que celles-ci peuvent entraîner – nous sommes attachés à ce que les tarifs d’usage des réseaux intègrent dès à présent ce nouvel usage qu’est l’autoconsommation, pour en favoriser le développement. L’ordonnance simplifie également les procédures pour les installations de petite taille pratiquant de l’autoconsommation partielle.

Pour aller plus loin dans l’accompagnement de l’autoconsommation, a été introduit, à l’issue des lectures à l’Assemblée nationale et au Sénat, un dispositif d’exonération de taxes – de la contribution au service public de l’électricité et des taxes locales sur la consommation d’électricité – pour l’électricité autoconsommée, à l’article 1er bis A.

Ségolène Royal souhaite vous remercier pour les améliorations apportées à la rédaction initiale. Il en résulte un texte équilibré et consensuel, comme en témoignent les conclusions de la commission mixte paritaire. Ségolène Royal tient à saluer, à cet égard, le travail d’approfondissement, d’écoute et de recherche d’équilibres conduit par vos rapporteurs, qui doit désormais permettre une promulgation rapide de la loi, pour que les améliorations qu’elle apporte entrent en vigueur sans délai.

Au-delà de la ratification des ordonnances, la mise en application de la loi relative à la transition énergétique, avec la publication des textes réglementaires – conduite tambour battant puisque plus de 95 % des décrets ont été adoptés ou des appels d’offres passés –, a en effet permis d’identifier des dispositions complémentaires de nature à accélérer et à simplifier la transition énergétique et la croissance verte. C’est le sens des autres articles du projet de loi.

L’article 2 prévoit d’interdire le cumul de la valorisation des garanties d’origine de l’électricité renouvelable avec le bénéfice d’un dispositif de soutien, comme le tarif d’achat ou le complément de rémunération. L’objectif est de garantir que l’électricité aidée par des dispositifs de soutien nationaux, financés par tous les consommateurs, revienne bien à l’ensemble de ces derniers, sans que les fournisseurs puissent bénéficier d’une double rémunération indue. Maintenir ce principe de non-cumul est également nécessaire pour sécuriser juridiquement les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables dont le Gouvernement a obtenu la validation par la Commission européenne le 12 décembre dernier.

Ce dispositif a fait l’objet de débats importants à l’Assemblée nationale. Vous avez prévu que les garanties d’origine issues des installations de production d’énergies renouvelables bénéficiant d’un dispositif de soutien soient mises aux enchères par l’État. Le Sénat a contribué à améliorer le dispositif en prévoyant la possibilité d’un allotissement par filière et par zone géographique. L’objectif est que le décret d’application de ce dispositif équilibré soit publié dans les meilleurs délais, après une concertation avec l’ensemble des parties prenantes.

L’article 3 met en place une réduction des coûts de raccordement au réseau électrique pour les producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable, dite « réfaction tarifaire ». En effet, le coût du raccordement se révèle parfois un obstacle dirimant pour les projets des producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable. Tel est le cas, notamment en milieu rural, pour les installations de petite ou moyenne puissance, dont l’éloignement par rapport au réseau nécessite parfois une extension significative afin d’évacuer l’électricité produite.

Ce dispositif a pu susciter l’inquiétude de certaines entreprises locales de distribution de petite taille, craignant qu’en cas de réfaction importante due au raccordement d’installations d’énergie renouvelable de très grande taille, le dispositif ne pèse sur leur trésorerie. Nous avons tenu à rassurer, en précisant que l’objectif de la réfaction est bien de favoriser le développement des énergies renouvelables en milieu rural, là ou les coûts de raccordement sont souvent plus élevés qu’en milieu urbain ou périurbain : c’est une mesure d’équité. Je pense en particulier aux agriculteurs qui s’engagent dans des projets de méthanisation ou de photovoltaïque : les coûts plus importants de raccordement peuvent actuellement les défavoriser dans les appels d’offres. Ce seront donc les installations de petite taille qui bénéficieront du taux maximal de réfaction, fixé à 40 % ; il sera différencié pour les installations plus grandes.

L’article 3 clarifie les modalités de prise en charge des indemnités en cas de retard de raccordement des parcs éoliens en mer. Cette visibilité était indispensable pour mener à bien les procédures administratives des appels d’offres et accélérer la mise en service des parcs éoliens en mer.

L’article 4 propose de confier aux gestionnaires des réseaux la coordination des opérations associées à la modification de la nature du gaz qu’ils acheminent. Cette clarification des responsabilités lors des opérations de modification de la nature du gaz acheminé dans des réseaux est tout particulièrement nécessaire pour préparer la prochaine conversion des réseaux de transport et de distribution de gaz à bas pouvoir calorifique situés dans le nord de la France, en lien avec la baisse de la production du champ néerlandais de Groningue.

Pour les consommateurs dont les appareils et équipements peuvent être réglés ou adaptés au changement de la nature du gaz naturel, l’ensemble des coûts associés seront donc pris en charge par le gestionnaire de réseau de distribution et répercutés dans les tarifs d’utilisation du réseau.

Toutefois, certains appareils, très anciens ou ne respectant pas les normes européennes, faute de pouvoir être adaptés ou réglés, devront être remplacés. Cela concerne moins de 5 % des appareils actuellement en fonctionnement. Une attention particulière doit être portée aux ménages en situation de précarité qui devront supporter le coût du remplacement de ces appareils très anciens : il sera nécessaire de les accompagner financièrement. Le projet de loi prévoit donc que le Gouvernement remette un rapport proposant des solutions pour accompagner ces ménages en situation précaire, et nous souhaitons que ses conclusions puissent être mises en oeuvre dans un délai compatible avec les opérations de conversion.

En conclusion, je souhaite souligner combien le travail parlementaire a permis d’améliorer le projet du Gouvernement. De nombreuses dispositions ont été adoptées pour clarifier et améliorer la lisibilité du texte législatif, et la CMP a pu être conclusive. Cela conforte Ségolène Royal dans son attachement à la co-construction.

Désormais, le Gouvernement souhaite que le texte puisse rapidement avancer sur le chemin de son entrée en vigueur, afin que soit tiré tout le parti de ses dispositions pour accélérer encore davantage la mise en oeuvre de la transition énergétique et de la croissance verte en France.

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