Je vous prie, madame la députée, de bien vouloir excuser Michel Sapin, qui est retenu ailleurs et m’a prié de vous transmettre sa réponse.
Votre question est précise et j’essaierai d’y répondre précisément. Les articles L. 1611-7 et L. 1611-7-1 du code général des collectivités territoriales fixent les conditions dans lesquelles les collectivités peuvent confier à des tiers, par convention de mandat, respectivement le paiement de certaines de leurs dépenses et l’encaissement de certaines de leurs recettes. Les modalités d’application de ces dispositions sont fixées par la partie réglementaire du même code, précisément aux articles D. 1611-16 à D. 1611-32-9.
Cette dérogation au principe de la compétence exclusive des comptables publics à manier les deniers publics ne peut s’envisager que dans un champ circonscrit. C’est pourquoi les cas dans lesquels des recettes publiques peuvent être encaissées par un mandataire doivent correspondre à des situations où l’institution d’une régie de recettes serait particulièrement inadaptée en raison, par exemple, du nombre d’organismes qui seraient susceptibles d’intervenir pour une même prestation ou du nombre de points de collecte à mettre en place.
Pour autant, cette dérogation ne se justifie que dans l’hypothèse où les fonds en cause sont des deniers publics.
À cet égard, le Conseil d’État a rappelé, par ses deux arrêts « Société Prest’action » de 2009 et 2010 qu’une convention permettant à un tiers autre que le comptable public d’encaisser des recettes publiques ou de payer des dépenses publiques était possible, à condition d’être explicitement autorisée par une loi ; surtout, il a circonscrit la notion de recettes publiques.
Les conclusions du rapporteur public sont éclairantes : « si le contrat a pour objet de faire exécuter une recette, c’est-à-dire de percevoir le produit d’une créance existante, alors une disposition d’habilitation est nécessaire. Si en revanche le contrat a pour objet de faire naître une recette par l’action du cocontractant, alors la disposition n’est pas nécessaire car le produit perçu n’est pas destiné ou affecté à un organisme public autrement que par le truchement du contrat ».
Au cas particulier, il s’agissait de commercialisation d’espaces publicitaires dans les bulletins municipaux d’information mais cette jurisprudence vaut plus généralement pour les marchés de services puisque dans ce cadre la recette naît généralement de l’action du contractant ; elle ne lui est pas préalable. À ce titre, l’application de la jurisprudence du Conseil d’État conduit à regarder les recettes qu’il encaisse comme des recettes privées.
Dès lors, dans les contrats portant sur les services de transport tels que celui que vous mentionnez ou encore les services de restauration, c’est seulement au moment où les recettes sont versées par le contractant et encaissées par le comptable assignataire du pouvoir adjudicateur qu’elles sont qualifiées de deniers publics. Par conséquent, un marché de service peut valablement confier le soin aux employés du contractant d’encaisser le prix du service auprès de l’usager sans avoir la qualité de régisseur de recettes.
Cette analyse est reprise dans l’instruction d’application des dispositions du CGCT que j’ai citées, en cours de publication par la direction générale des finances publiques et qui a fait l’objet d’un avis favorable de la Cour des comptes.