Intervention de élisabeth Ayrault

Réunion du 8 février 2017 à 9h30
Commission des affaires économiques

élisabeth Ayrault, présidente de la Compagnie nationale du Rhône :

Je suis passionnée par la mobilité électrique, sans en être une grande spécialiste.

La CNR est un aménageur des territoires, premier producteur français d'énergie 100 % renouvelable, basée notamment sur la production hydroélectrique du Rhône. Nous produisons 25 % de l'hydroélectricité française et nous complétons nos activités par un développement important en photovoltaïque et éolien. Si nous sommes engagés depuis de nombreuses années dans le développement de la mobilité électrique, c'est d'abord parce que nous pensons que l'accroissement de la part d'énergies renouvelables dans le mix énergétique programmé dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ne se fera qu'à condition que le développement des usages de ces énergies renouvelables le permette. Si nous souhaitons que la transition énergétique aboutisse, il faut mettre à la disposition des populations les technologies leur permettant de s'impliquer dans ce processus.

La mobilité électrique est intéressante en ce sens, car elle permet le transfert d'une consommation énergétique carbonée vers une consommation électrique d'origine renouvelable. J'espère que l'implication de la CNR permettra de faciliter ce transfert.

La CNR travaille aussi sur l'hydrogène durable qui, conditionné en cartouches, devrait permettre de prolonger l'autonomie des véhicules électriques. Le fleuve que gère la CNR produit de l'énergie nuit et jour, et tout l'intérêt est d'en transformer la part non consommée pour l'utiliser plus tard. L'eau et l'énergie verte permettent de créer de l'hydrogène durable à cette fin.

D'un point de vue technique, cette mobilité durable est également intéressante pour les relations entre les producteurs d'électricité renouvelable et les gestionnaires de réseaux de distribution. Le pilotage électronique de la recharge (smart charging), qui passe par un travail sur les réseaux électriques intelligents (smart grids) et l'agrégation de la production, permet une véritable synergie entre les énergies renouvelables et la mobilité durable.

En qualité de producteur d'énergie renouvelable, la CNR se positionne comme un agrégateur de production et de consommation diffuses et pourrait, grâce à son propre parc de production d'énergie renouvelable, lisser les effets de l'intermittence dans son portefeuille.

Nous nous positionnons comme opérateur de recharge et de mobilité, et nous aimerions pouvoir proposer aux utilisateurs de véhicules électriques un service de recharge en électricité verte certifiée, capable de valoriser la flexibilité induite par les batteries au bénéfice de l'utilisateur du véhicule, du gestionnaire de réseau et du producteur de parcs d'énergies renouvelables. Dans cette logique la CNR a entrepris un certain nombre de partenariats de coconstruction parmi lesquels on peut citer Move In Pure, qui fournit de l'énergie verte à Bolloré sur le Grand Lyon, ainsi qu'à d'autres opérateurs.

Dans le cadre des missions d'intérêt général que la CNR remplit depuis quelques années, nous cofinançons la réalisation d'une voie cyclable qui relie le Lac Léman à la mer Méditerranée, dont les derniers 20 % restent à réaliser. Dans le même esprit, nous avons décidé d'accompagner l'implantation de bornes de recharge le long du Rhône. Vingt-sept stations ont été construites, chacune comportant deux bornes de recharge. Enfin, nous sommes très impliqués dans le projet « HyWay », station multi-énergie – électrique, gaz naturel vert et hydrogène – installée dans le port Édouard Herriot à Lyon. Nous avons pour ambition de sortir cette station du port pour la rendre accessible au public.

Nous nous investissons également dans un projet qui comporte un volet agriculture et un volet écotourisme, auxquels nous avons ajouté un volet énergie : nous proposons de rendre l'île de Marie-Galante autonome en énergie à l'horizon 2020. Dans le cadre de cette autonomie, nous avons proposé de transformer le parc automobile de l'île et de mettre en place un réseau d'infrastructures de recharge pour véhicules électriques intégré à la centrale virtuelle de production et consommation à partir d'énergies renouvelables.

Nous aimerions discuter d'ajustements qui faciliteraient notre volonté de développer la mobilité durable. Le Livre vert sur les infrastructures de recharge de véhicules électriques spécifie que le développement de ces points de recharge doit reposer à 10 % sur les points publics, et à 90 % sur les points privés. Mais le financement alloué au public est plus important. Les enveloppes devraient être rééquilibrées.

Nous pensons que le développement amènera à installer des bornes de recharge ultrarapides sur le domaine public et des bornes de recharge d'usage très différent sur la partie privée. Aujourd'hui, un copropriétaire qui sollicite l'installation d'un point de charge dans une copropriété ne peut pas se la voir refuser, mais la copropriété n'a pas l'obligation de supporter l'infrastructure commune ; il appartient au seul copropriétaire de supporter le coût de la base technique, qui est trop élevé. C'est pourquoi de nombreux projets n'aboutissent pas. Il faut trouver un système permettant de financer ou d'avancer les fonds pour qu'un ou deux copropriétaires puissent se lancer. Le programme Advenir pourrait comporter un volet spécifique.

Aujourd'hui, il n'est pas obligatoire d'installer un dispositif de comptage de l'énergie délivrée sur les points de charge. C'est dommage, car c'est la meilleure façon de valoriser l'énergie délivrée. La mise en place d'un compteur représente à peine 20 euros sur le coût d'une borne qui en vaut quelques milliers. Il me semble que ce sujet devrait être abordé aujourd'hui pour éviter d'avoir à intervenir plus tard sur les infrastructures existantes, ce qui serait beaucoup plus cher.

Nous souhaitons pouvoir faire un lien entre l'énergie verte et la consommation sur les bornes. Nous regrettons l'absence d'une synergie explicite entre mobilité électrique et électricité d'origine renouvelable.

Enfin, afin de permettre le développement des points de recharge rapides et ultrarapides sans infliger de choc au réseau électrique, il faut mettre en place un système de stockage tampon pour lequel des financements doivent être trouvés.

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