Intervention de Marie Castelli

Réunion du 8 février 2017 à 9h30
Commission des affaires économiques

Marie Castelli, secrétaire générale de l'Avere-France :

L'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique, Avere-France, est l'association professionnelle qui représente la filière de la mobilité électrique en France. Permettez-moi de commencer par évoquer les grands enjeux de ce secteur avant de vous présenter le programme « Advenir » de certificats d'économie d'énergie que nous pilotons pour financer les bornes de recharge privées.

Il existe deux types d'infrastructures de recharge, aux enjeux très différents : les premières, publiques ou privées, sont accessibles au public tandis que les secondes sont installées sur le domaine privé. La recharge est effectuée à 90 % dans le parc privé et à 10 % dans le parc accessible au public. Autrement dit, le grand enjeu de développement de la mobilité électrique concerne la recharge privée.

Parmi les infrastructures de recharge accessibles au public, distinguons entre les infrastructures privées et publiques. Trois opérateurs privés d'envergure nationale viennent de vous présenter leurs avancées, mais de nombreuses enseignes commerciales privées – supermarchés et concessions automobiles – investissent aussi dans les infrastructures de recharge. Ces acteurs du secteur privé éprouvent de grandes difficultés à bâtir un modèle économique du service de recharge, car il est impossible de le financer grâce aux seuls revenus de l'exploitation, à moins d'afficher des tarifs rédhibitoires pour les utilisateurs.

L'enjeu du financement est également présent dans le secteur public de la recharge, autrement dit les bornes installées par les collectivités territoriales, soit plus de 30 % du réseau des 16 000 points de charge accessibles au public en France. Autrement dit, les collectivités sont le premier opérateur public de bornes ouvertes au public. Là encore, le modèle économique d'exploitation de ces bornes pose problème, les financements apportés par le CGI ne concernant que l'investissement initial dans l'infrastructure. En outre, le déploiement du dispositif du CGI par l'ADEME se heurte à des problèmes de délais dus au fait que les collectivités doivent répondre dans le cadre de groupements, d'où la succession de plusieurs phases distinctes : concertation, décision, lancement de l'appel d'offres, raccordement – parfois assez long – avec Enedis, fourniture des infrastructures de recharge par les fabricants. En 2017, ce marché explose et, de ce fait, les fabricants, qui sont souvent des PME, ont du mal à suivre le rythme des commandes. Les retards sont donc dus à ces facteurs et non à l'échec des projets. Nombreuses sont les collectivités avec lesquelles nous travaillons qui souhaitent l'allongement des délais d'autorisation de déploiement des projets par l'ADEME, car tous les projets financés au titre de la première phase doivent être déployés avant la fin de l'année, ce qui sera très difficile dans certains cas.

Par ailleurs, le CGI a ouvert en octobre une enveloppe de 10 millions d'euros, pilotée par l'ADEME, pour un deuxième cycle de projets dont les dossiers doivent être déposés au 31 mars. À cette date, les collectivités devront donc avoir répondu à un appel rendu public en octobre, d'où des délais extrêmement tendus. À ma connaissance, aucune collectivité n'a encore déposé de dossier, non par manque d'intérêt mais par manque de temps pour réaliser les projets.

J'en viens à l'enjeu principal que constituent les infrastructures de recharge privées, au domicile ou au travail. Rappelons d'emblée que dix millions de foyers en France n'ont pas de stationnement ; autrement dit, l'infrastructure de recharge accessible au public est souvent la source principale de recharge pour les personnes qui n'alimentent leur véhicule qu'en voirie. En matière de recharge privée, il faut distinguer entre le domicile et le lieu de travail. La recharge à domicile ne pose guère de problèmes : le marché du véhicule électrique concerne d'ailleurs avant tout l'habitat pavillonnaire en milieu péri-urbain et rural. En revanche, la mise en oeuvre du droit à la prise dans l'habitat collectif est difficile, car elle se heurte à l'opposition des syndics de copropriété. De ce point de vue, la loi n'est pas appliquée et certains copropriétaires ne peuvent pas jouir de leurs droits parce que les syndics refusent de gérer ce dossier pour eux, ce qui est une forme d'abus de pouvoir. Il existe, en outre, un problème d'investissement ; c'est là qu'intervient le programme de certificats d'économie d'énergie « Advenir », que nous pilotons, qui permet de financer 50 % de l'installation d'un point de charge pour un propriétaire ou un locataire en logement collectif.

Autre secteur : la recharge sur le lieu de travail. Les flottes d'entreprise constituent un immense marché de véhicules neufs et, par conséquent, potentiellement de véhicules électriques ; s'y ajoute l'accès aux points de charge des salariés une fois arrivés sur leur lieu de travail. Le programme « Advenir » apporte 40 % du financement de ces infrastructures. Cependant, le statut juridique de l'électricité fournie aux salariés demeure flou, notamment sa qualification d'avantage en nature : aucun régime précis n'est applicable à ce calcul, d'où le choix de certaines entreprises de ne pas offrir d'électricité aux salariés ou de la leur faire payer parce qu'elles ne savent pas quantifier ce type d'avantage.

Pour conclure, on évoque souvent les infrastructures de recharge des voitures, mais la mobilité électrique dépasse ce seul cadre et concerne également les deux-roues qui, en ville, sont à l'origine de la moitié des émissions de composés organiques volatils, et pour lesquels les infrastructures de recharge sont aujourd'hui presque inexistantes.

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