Intervention de Jean-Pierre Maggi

Séance en hémicycle du 16 février 2017 à 9h30
Réforme de la prescription en matière pénale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Maggi :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur – cher Alain –, nous arrivons aujourd’hui à la fin du processus parlementaire pour la proposition de loi de notre collègue Alain Tourret portant réforme de la prescription en matière pénale : il nous revient d’entériner définitivement ce texte.

Fruit d’un travail approfondi et de grande qualité réalisé depuis mai 2015 par le garde des sceaux, Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des lois de notre assemblée, par notre rapporteur et par collègue Georges Fenech, ce texte a ensuite été voté en première lecture par notre assemblée à l’occasion de la journée du groupe RRDP, le 10 mars 2016.

Ainsi ce texte transpartisan a-t-il fait l’objet d’un consensus politique important. Preuve en est son adoption à l’unanimité dans notre hémicycle, en commission des lois puis en séance publique mardi 14 février, à l’occasion d’une semaine en principe réservée au Gouvernement.

La belle cohésion que nous avons connue mardi dernier est d’autant plus remarquable que l’étape précédente, celle de la commission mixte paritaire, s’était soldée par un échec, en raison de l’insertion par le Sénat d’un allongement du délai de la prescription en matière de presse.

Ainsi, nos collègues sénateurs souhaitaient que les infractions de presse commises sur internet soient prescrites au bout d’un an, contre trois mois pour les mêmes infractions commises sur un support papier. Cette disposition a été supprimée à bon escient par notre assemblée : un support de publication différent ne peut justifier à lui seul l’allongement du délai de prescription.

Je tiens à souligner que, si tout le monde reconnaît aujourd’hui la nécessité de cette réforme, les oppositions ont été nombreuses. Ainsi, malgré l’esprit de dialogue et de consensus dont le rapporteur a su faire preuve, le Sénat voulait d’ailleurs repousser la discussion parlementaire de ce texte, lequel est en navette entre les deux chambres depuis mars 2016.

Mais revenons-en au texte. Il est prévu de reporter le point de départ de la prescription de l’action publique pour les infractions occultes et dissimulées. Dans ce cas, le délai de prescription « court à compter du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique », étant précisé que ce délai ne peut excéder, à compter du jour où l’infraction a été commise, douze années révolues pour les délits et trente années révolues pour les crimes.

Par ailleurs, l’action de la justice en droit pénal se voit grevée par deux formes de prescriptions. Le point de départ du délai de prescription, pour l’action publique est fixé au jour de la commission de l’infraction. Pour la peine, la prescription court à compter de la date de la décision de condamnation définitive.

Or aujourd’hui, si les délais étaient fixés, pour l’action publique, à un an pour les contraventions, trois ans pour les délits et cinq ans pour les crimes et, en matière de prescription de la peine, à trois ans pour les peines contraventionnelles, cinq ans pour les peines délictuelles et dix ans pour les peines criminelles, de nombreuses dérogations et exceptions législatives et jurisprudentielles existaient. Une réforme d’ampleur semblait opportune.

Il est ainsi prévu que l’action publique se prescrive par vingt ans pour les crimes, six ans pour les délits et un an pour les contraventions.

La prescription des peines criminelles est maintenue à vingt ans, celle des peines délictuelles est portée à six ans, tandis que celle des peines contraventionnelles est maintenue à un an. Pour l’action de l’administration des douanes, l’article 3 prévoit en matière de contraventions et de délits douaniers un délai de prescription de trois ans.

L’article 4 précise que l’adoption de la loi ne peut avoir pour effet de prescrire des infractions qui, au moment de son entrée en vigueur, auraient valablement donné lieu à la mise en mouvement ou à l’exercice de l’action publique : cette proposition de loi n’a donc vocation à s’appliquer qu’aux infractions qui seront découvertes après sa promulgation.

Ce texte est bienvenu car l’enchevêtrement des conditions et règles dérogatoires en matière de prescription était, de l’avis de nombreux experts, de nature à affecter la sécurité juridique et l’exigence d’accessibilité du droit.

Aussi, pour toutes ces raisons, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, particulièrement fier d’avoir réussi à mener à bien une réforme pénale aussi importante au cours de cette législature, après celle relative à la révision des condamnations pénales devenues définitives, votera cet excellent texte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion