Je voudrais poser deux principes liminaires, par rapport à cette mission. L'exercice même d'une mission et d'un rapport ne permet pas de reprendre la totalité des politiques agricoles en cours. Parmi les limites les plus lourdes, on a notamment l'horizon politique. Il a été affirmé à plusieurs reprises par les personnes auditionnées que, dans le meilleur des cas, la révision s'effectuerait en 2023. Cela vous donne donc une idée des discussions considérables qu'il y aura avant et surtout de la fragilité politique liée à des calendriers politiques qui peuvent être parfois particulièrement préoccupants.
La deuxième donnée générale que je voudrais rappeler est que nous sommes attachés au principe de subsidiarité. On ne demande pas forcément à l'Europe de remplacer la totalité de la politique nationale. Il y a des sujets européens et d'autres qui relèvent de responsabilités nationales, voire territoriales. Ne demandons pas à la PAC ce qu'elle n'est pas capable de donner sauf si l'on veut centraliser un peu plus à l'échelle de Bruxelles - ce qu'on reproche déjà au niveau national - au risque de complexités et de surrèglementations ! À la fin, on finit par avoir des textes inapplicables en les faisant passer dans des standards qui concerneraient la totalité du territoire européen.
Vous posez des questions dont certaines réponses sont inscrites dans le rapport. Le nombre d'agriculteurs est évoqué et même chiffré, dans le rapport. Ensuite, sur la question de la volatilité, cela a parfaitement été identifié.
Parmi les quelques questions que je retiendrai, nous n'avons pas de remède miracle aux conséquences économiques de l'embargo russe, si ce n'est des mécanismes stabilisateurs. Je voudrais aussi revenir sur des sujets très médiatiques, via une focalisation parfois caricaturale, chacun montant au rideau du nationalisme pour défendre les produits européens face aux méchants extra-européens. S'agissant des négociations avec les États-Unis, le gouvernement français et l'Europe ont été très clairs, c'est non. Concernant le fameux CETA, contrairement à ce que je peux entendre ici ou là, de nombreuses appellations protégées y figurent. Le sujet relève plutôt de l'applicabilité de ces accords, la traçabilité des produits qui transitent par le Canada. Mais le Canada n'est pas, que je sache, un État non recommandable. On est très content aussi d'exporter des produits agricoles vers le Canada et nous sommes, je le rappelle, en termes de balance commerciale, gagnants. S'agissant de la viande bovine, il y a des quotas qui sont très précis et qui ne devraient pas soulever de problèmes majeurs.
Pour ce qui est de l'exception « agriculturelle » il faut être conscient que l'on n'est pas seul en Europe. Quand on écoute les représentants des pays baltes, ou d'autres États membres, il paraît inepte de faire de l'agriculture une exception au même titre que l'exception culturelle, alors que l'on est très largement exportateur dans des quantités de domaine. Le seul signal que l'on donnerait avec une exception agriculturelle, ce serait un signal de repli, avec des rétorsions possibles.
Pour ce qui est de l'amendement, il me paraît très intéressant. Je souscrirais très volontiers à l'amendement qui nous est proposé par notre collègue Brigitte Allain mais je me permettrais simplement de proposer moi-même un amendement. Au considérant où il est écrit : « on rappelle que la PAC doit assurer la souveraineté et la sécurité alimentaire européenne, dans le respect de la souveraineté alimentaire des pays tiers », j'aurais préféré avoir la formule suivante : « rappelle que la PAC doit assurer la souveraineté et la sécurité alimentaire européenne, dans le respect des mêmes attentes émanant des pays tiers ». Il y a des pays tiers qui n'ont aujourd'hui pas de souveraineté alimentaire, dans les faits. Ils n'ont pas cette souveraineté alimentaire et encore moins cette sécurité, j'aurais donc préféré cette formule. Cela me paraît plus respectueux de leurs capacités et en même temps des politiques qu'ils peuvent mener.