Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 21h30
Harcèlement sexuel — Article 3, amendement 23

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement :

Non, mais je pense que vous allez voir où je veux en venir.

Aujourd'hui, le code du travail donne aux délégués du personnel – je ne vous l'apprends pas – le droit d'engager une procédure d'alerte pour assurer, dans l'entreprise, la protection effective des droits des personnes, auxquels l'employeur pourrait porter atteinte.

Ce droit d'alerte est propre aux délégués du personnel, conçus comme des représentants du personnel de proximité, dont la mission spécifique est de présenter à l'employeur les réclamations des salariés. Ils disposent d'un certain nombre de moyens pour remplir cette mission, par exemple le pouvoir de saisir le bureau de jugement du conseil de prud'hommes.

Vous envisagez de donner aux représentants du personnel les prérogatives jusqu'alors spécifiques des délégués du personnel, mais c'est beaucoup plus compliqué qu'il n'y paraît. La catégorie des « représentants du personnel » est extrêmement large. Elle inclut aussi bien les délégués du personnel que les membres du comité d'entreprise, les membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et les délégués syndicaux. Or le code du travail dote chacune des instances représentatives du personnel de prérogatives propres, définies en fonction de leur capacité à agir, et des moyens appropriés, par exemple un crédit d'heures pour remplir leur mission.

Mine de rien, votre proposition remettrait tout de même en cause l'équilibre assez subtil qui caractérise l'actuelle répartition des rôles des instances représentatives du personnel. Cela pose, à mon sens, une difficulté de fond, d'abord parce que cela crée un vrai risque de confusion dans un domaine assez sensible pour les organisations syndicales, attachées au partage des compétences des IRP, ensuite parce que cela ouvre tout un nouveau champ de compétences aux représentants autres que les délégués du personnel dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail, en leur donnant le pouvoir de saisir le bureau de jugement du conseil de prud'hommes.

Vous le constatez, votre amendement ébranlerait beaucoup de choses.

Par ailleurs, comme l'a rapidement indiqué Pascale Crozon, après la conférence sociale organisée il y a quelques semaines par le Gouvernement, les partenaires sociaux nous ont confirmé leur volonté de mener des négociations sur le rôle des IRP. Légiférer maintenant sur ce sujet ne serait donc pas très opportun. L'intervention d'une loi ne serait pas particulièrement bienvenue à l'heure où nous avons décidé de laisser place à la négociation.

Cela étant, j'entends bien ce que vous me dites. Je vous rappelle d'ailleurs que les délégués du personnel sont les représentants du personnel que l'on a le plus de chances de trouver dans le plus grand nombre d'entreprises. Le seuil au-delà duquel les entreprises doivent compter un délégué du personnel est effectivement de onze salariés seulement. Le délégué du personnel est donc la représentation de proximité la plus fréquente qui soit, celle qui, du coup, nous paraît la plus sécurisante pour ces sujets.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)

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