Intervention de Jean-Jacques Colombi

Réunion du 9 mai 2016 à 14h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Jean-Jacques Colombi, chef de la division des relations internationales à la direction centrale de la police judiciaire, DCPJ :

Ce sujet sera traité au conseil d'administration d'Europol la semaine prochaine. L'agence sollicite les États membres pour définir un nouveau modèle de fonctionnaires de police mis à disposition : le guest officer. Cela consisterait pour les États membres à « prêter » des spécialistes du trafic de migrants pour permettre à Europol de remédier aux difficultés qu'elle éprouve à prendre en compte ce phénomène. Il faut savoir que l'intromission de l'agence dans la crise des migrants s'est faite à partir d'une incitation politique des États, dont la France. Rob Wainwright, son directeur, a eu quelques doutes, dont il s'est ouvert à moi, car il considérait que cette action relevait davantage du mandat de Frontex. En réalité, il y a un trou dans le dispositif : Frontex a compétence pour traiter du problème migratoire aux frontières extérieures, mais ne couvre pas les mouvements de migrants à l'intérieur de l'Union. Souvenons-nous de la controverse germano-danoise : les Danois avaient fortement reproché aux Allemands de ne pas les avoir avisés de l'arrivée massive de plusieurs milliers de migrants par le Schleswig-Holstein, arrivée qui les avait contraints à fermer les autoroutes et à couper les lignes ferroviaires durant un week-end.

Née d'une unité de lutte contre le trafic de stupéfiants, Europol a vu son mandat s'élargir jusqu'à embrasser tous les champs de la criminalité. Elle est dotée de moyens importants – 100 millions d'euros de budget – car l'Union européenne n'est pas avare : chaque fois qu'elle se voit confier une nouvelle mission, son budget est abondé. Toutefois, elle se heurte à une difficulté : elle doit en quelque sorte être spécialiste de tous les domaines. À l'origine, l'agence était composée avant tout d'analystes criminels, car les États membres voulaient qu'elle s'attache essentiellement à l'analyse criminelle, pour des raisons de propriété de l'information que j'évoquais tout à l'heure. Maintenant, elle a besoin de spécialistes dans tous les champs thématiques. Elle fait appel aux États membres qui, confrontés à une pression criminelle forte, ont des difficultés à se défaire de leurs meilleurs éléments – pour travailler à Europol, non seulement il faut maîtriser la matière qui est votre spécialité, mais aussi être linguiste et être doté de diverses autres compétences. En outre, le statut des guest officers pose le problème des responsabilités de l'État qui met à disposition des personnels soit au bureau de liaison soit au sein de l'agence. Ce type de collaboration représente toutefois une voie d'avenir.

Pour finir, j'aimerais préciser la volumétrie des échanges annuels au sein de la SCCOPOL : en 2015, plus de 450 000 messages entrants ou sortants ont été enregistrés sur l'ensemble des flux, contre 350 000 l'année précédente. Le développement du terrorisme, la crise des migrants, l'explosion de la cybercriminalité font craindre une augmentation encore marquée. Les ajustements des systèmes d'information au niveau européen et au niveau national devront être accompagnés d'une montée en puissance de la SCCOPOL, outil envié par nos partenaires, mais structure contrainte en termes de personnels, lesquels sont obligés de traiter un très fort ratio de messages.

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