Depuis plus de vingt-cinq ans, le dialogue interne dans la gendarmerie a profondément évolué, suite aux différents mouvements de mécontentement des gendarmes. Les évolutions les plus récentes ont vu la création d'un modèle doté d'organes de concertation, de représentation et de participation, lequel doit encore évoluer.
Il s'agit de réfléchir aux nouvelles données des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme du 2 octobre 2014 et des recommandations évoquées dans le rapport Pêcheur relatif au droit d'association des militaires. Ce n'est pas un problème nouveau. Le premier signal fort a été donné par les gendarmes dès le mois d'août 1989. Pour la première fois dans son histoire, la gendarmerie, institution traditionnellement si discrète, laissait éclater au grand jour l'exaspération croissante de ses membres. Un peu plus de dix ans plus tard, en décembre 2001, les gendarmes descendaient dans la rue pour exiger plus de moyens et contraindre le pouvoir politique à répondre à leurs exigences. Ces deux mouvements n'ont pas été les seuls. En 1948, le président de l'UNPRG, M. Cousteix, visitant un escadron de la garde républicaine en province, constata que les gendarmes dormaient sur de la paille dans un gymnase. De retour à Paris, il en fit part à la direction générale de la gendarmerie. Quelques semaines plus tard, des lits pliants étaient livrés, les fameux lits picots en toile qui firent carrière jusqu'en 1975.
Le dialogue social dans la fonction militaire est organisé selon trois modalités, pour lesquelles des instances spécifiques ont été mises en place. La première, la concertation, concerne l'étude conjointe de tous les sujets ayant trait à la condition militaire et a lieu entre le ministre de la Défense et le haut commandement d'une part et les représentants des militaires d'autre part. Elle passe obligatoirement par le CSFM. La deuxième modalité est la participation des militaires à la prise des décisions relatives à la vie courante de leurs unités ; la troisième, la représentation des militaires, qui consiste à la fois à assurer l'expression de leurs préoccupations auprès du commandement et à les conseiller. Dans ces trois domaines, la gendarmerie a toujours été en avance par rapport aux autres armées, du fait de ses actions à caractère civilo-militaire, alors que le métier de militaire est plus soumis à la hiérarchie, au sein de la « grande muette ».
Même si les délais pour la remise du rapport Pêcheur étaient courts, il est flagrant que cette concertation n'a pas été approfondie, en particulier avec les associations historiques, mais aussi avec tous les militaires, pour connaître leur sentiment sur la création des APNM. Avant de légiférer sur ce sujet, l'UNPRG juge opportun d'organiser des sondages sur l'opportunité d'imposer aux militaires des associations strictement composées de militaires d'active et de réservistes opérationnels. Quelles seront leurs compétences en la matière, sachant qu'il existe déjà des CFM et un CSFM, où l'UNPRG est d'ailleurs représentée avec voix délibérative ? En sa qualité d'association représentative historique, créée en 1946, l'UNPRG demande à être invitée à débattre avec les instances nationales afin de donner un avis consultatif sur le travail législatif et réglementaire en cours.
La position de la gendarmerie, depuis son intégration pour emploi au ministère de l'Intérieur, déroge de celle des militaires des autres armées. Dans un souci d'égalité, elle est en effet consultée au même titre que les syndicats de police, par le canal du groupe de liaison du Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG), qui exprime son point de vue, lequel n'est pas forcément celui de l'ensemble des actifs et des retraités.
Le rapport de MM. Le Bris et Mourrut dresse le constat suivant. Le dispositif actuel de concertation ne répond plus tout à fait aux attentes des militaires et du commandement. Les instances nationales sont jugées assez peu représentatives et surtout en manque cruel d'expertise, ce qui conduit les militaires à se détourner du système. Selon les auteurs du rapport, « le régime d'expression collective des intérêts professionnels des militaires paraît en décalage par rapport aux pratiques et aux attentes sociales, y compris celles des militaires ».
Une des conséquences du rattachement de la gendarmerie au ministère de l'Intérieur réside dans le fait que son système de concertation peut désormais être comparé avec celui de la police nationale, plus libéral, avec des syndicats de policiers qui revendiquent, à terme, de représenter les gendarmes et en ont déjà approché certains. Le rapport fait état en Europe, y compris dans les pays latins, d'une tendance au renforcement des organes de concertation institués pour compenser les restrictions prévues à l'exercice des droits syndicaux contraires au statut militaire.
Il s'agit donc, en conclusion, de faire évoluer les structures de concertation au sein des armées et de la gendarmerie. Si, pour les armées, ce sera dans un cadre général, cela se fera pour la gendarmerie dans un cadre particulier car, depuis son rattachement pour emploi au ministère de l'Intérieur, elle est en permanence au contact de policiers, dont les trois quarts appartiennent à des syndicats qui ont l'écoute du ministre de l'Intérieur et sont consultés avant toute réforme.
L'UNPRG n'est pas un syndicat ; c'est une association totalement indépendante de 30 000 adhérents dont 700 d'active et de réservistes, qui possède ses propres locaux ainsi qu'un journal, L'Essor, créé par Jean Cousteix, est implantée sur l'ensemble du territoire national et outre-mer. Elle possède des moyens de communication modernes, site internet, page Facebook. Un actif est un retraité en puissance, ne l'oublions pas.