Intervention de Laurent Michel

Réunion du 24 mars 2016 à 10h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Laurent Michel, directeur général de l'énergie et du climat, DGEC :

Je commencerai par dresser un panorama des actions financées par les programmes d'investissements d'avenir.

Les investissements d'avenir dans le domaine de la transition écologique sont portés par plusieurs outils ciblés sur différentes thématiques. Un premier bloc, dans le PIA 1, le « nucléaire de demain », a financé des recherches et la construction d'outils de recherche dans deux domaines : d'une part, les réacteurs de quatrième génération ASTRID et le réacteur de recherche Jules Horowitz ainsi que des actions sur la valorisation des déchets par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), et, d'autre part, la sûreté nucléaire, pilotée par l'Agence nationale de la recherche (ANR).

Il y a ensuite, dans le PIA 1 et le PIA 2, un volet autour de la transition énergétique et écologique, au sens large, jusqu'à des actions dans les domaines de l'eau et de la biodiversité, avec plusieurs outils complémentaires. Le premier outil, ce sont les démonstrateurs, avec deux programmes, « démonstrateurs de la transition énergétique et écologique » et « véhicule routier et mobilité du futur ». Au moment de passer du prototype à la commercialisation, on a besoin de démonstrateurs industriels, qui sont souvent portés par un ensemble de deux ou trois entreprises – dont une entreprise pilote – et des laboratoires. L'opérateur en est l'ADEME, qui apporte un soutien en subventions et en avances remboursables pouvant déboucher sur des fonds propres. La BPI gère par ailleurs deux outils spécifiques d'apports de fonds propres : d'une part, le Fonds écotechnologies, doté des crédits apportés sur l'enveloppe ADEME et dédié notamment aux PME innovantes dans le domaine de la transition écologique, et, d'autre part, un outil plus générique, les programmes industriels d'avenir (PIAVE), pour les sujets non couverts par l'ADEME. Ce sont nos collègues du CGDD qui suivent ces PIAVE.

Un autre outil relatif à la transition énergétique est la structuration pérenne de la collaboration public-privé autour des instituts de la transition énergétique (ITE), au nombre de dix, plus deux, après un petit taux de chute, certains ITE n'ayant pu être constitués. Cet outil vise à créer des consortiums sous forme de sociétés communes entre des entreprises et des organismes publics de recherche. L'État leur accorde une dotation non consommable, à hauteur de 80 %, et une subvention. Ce sont des consortiums thématiques, sur les matériaux biosourcés, la chimie verte, le photovoltaïque, le véhicule électrique et communiquant… L'opérateur en est l'ANR.

Il y a ensuite un volet autour des territoires, de l'habitat durable et des villes, avec, d'une part, un programme intitulé « projets territoriaux intégrés », opéré par la CDC et suivi par la DGALN, autour de prêts bonifiés, et un programme « ville de demain », également opéré par la CDC. Par ailleurs, le PIA a également financé les actions de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) en vue de la rénovation thermique des logements des ménages en situation de précarité.

Pour les programmes « démonstrateurs de la transition énergétique et écologique » et « mobilité du futur », suivis par la DGEC, l'enveloppe globale est de 3 milliards d'euros, engagés à hauteur de 1,6 milliard, avec une prévision de 2,3 milliards fin 2016 et 2,6 milliards à la mi-2017. Pour les ITE, 800 millions sur 875 sont engagés.

La mise en oeuvre s'opère selon une approche interministérielle se concluant par des décisions du Premier ministre sur la base des propositions qui lui sont présentées par le Commissaire général aux investissements (CGI). Pour chacune des actions que j'ai citées, un comité de pilotage réunit notre ministère et les ministères de l'économie, du logement, de l'enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que l'opérateur, à savoir l'ANR pour les ITE et l'ADEME pour les démonstrateurs. D'autres ministères peuvent être associés, par exemple le ministère de l'agriculture sur les questions d'agriculture éco-efficiente. Ces comités de pilotage proposent les lancements d'appels à projets et les décisions de présélection et d'instruction. Ils s'appuient sur des groupes de travail.

Nous avons industrialisé le procès, accéléré le lancement des programmes et l'instruction des dossiers ; ainsi, vingt appels à projets courent chaque année sur les démonstrateurs aujourd'hui. Nous prévoyons deux ou trois dates de dépôt sur l'année, afin d'éviter que ceux qui ne sont pas tout à fait prêts présentent un mauvais projet. Les délais d'instruction sont passés à moins de trois mois et la décision du Premier ministre intervient en moins de deux mois, ce qui est peu compte tenu de la complexité de projets qui engagent parfois plusieurs millions d'euros et plusieurs entreprises.

S'agissant des démonstrateurs, nous avons, entre le PIA 1 et le PIA 2, élargi les filières, en introduisant la gestion et l'ingénierie de l'eau ou encore le génie écologique et la biodiversité. Nous avons par ailleurs décidé de cibler l'interaction entre transition numérique et transition énergétique, avec un appel à projets Green Tech, annoncé par Mme Royal et M. Macron, qui sera lancé début avril.

Nous nous sommes rendu compte qu'il existait un double besoin. S'il reste nécessaire de financer des projets de consortiums d'entreprises à plusieurs millions d'euros, nous avons aussi besoin d'amorçage auprès des PME – y compris pour préparer de gros projets – et c'est pourquoi plusieurs appels à projets « initiatives PME » ont été lancés sur le stockage de l'énergie, les réseaux intelligents, les énergies renouvelables, et bientôt sur l'économie circulaire et l'écoconception. Nous apportons jusqu'à 200 000 euros de subventions pour un projet d'amorçage. C'est la nouveauté majeure de l'année 2015.

S'agissant des ITE, nous nous sommes rendu compte que le concept de départ – des consortiums thématiques publics-privés dans la longue durée – était très ambitieux et conduisait à quelques difficultés, et nous avons donc introduit plus de souplesse. Ainsi, dans les énergies marines et le sous-sol, les deux ITE ne sont pas aujourd'hui constitués directement sous forme de consortiums ; nous les accompagnons avec un appel à projets qui leur permet de monter en puissance.

L'apport de financements publics vise à pallier les carences de l'investissement privé, qui peuvent être qualifiées de défaillances de marché. En la matière la situation est stable, voire se dégrade un peu parfois. Il se peut que la conjoncture déprimée dans le secteur énergétique rende les décisions d'investissement plus difficiles qu'il y a deux ou trois ans. Pour les fermes pilotes d'éoliennes, voire les fermes commerciales, le besoin de fonds propres est manifeste mais les entreprises hésitent à le couvrir. Cela conduit l'État à co-investir, par exemple dans les fermes commerciales d'éolien marin. Nous participons à la prise de risque, tout en ayant un objectif de retour sur investissement.

Le suivi se fait sur la base des objectifs définis – effet de levier, amélioration des délais d'instruction… – mais aussi projet par projet, en particulier pour les plus gros d'entre eux. Ainsi, la dizaine d'ITE financés font chacun l'objet d'un suivi par des chargés de mission de l'ANR et des ministères, avec une revue annuelle des objectifs et, depuis cette année, une revue triennale permettant de s'assurer que ces organismes franchissent correctement les jalons de pérennisation et de structuration des campus publics-privés. Nous pouvons vous envoyer nos batteries d'indicateurs par écrit.

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