Je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, de l'attachement que vous portez à la culture, en particulier à ce pilier de la politique culturelle qu'est le secteur du livre, dont le budget est par conséquent préservé. Nous veillons, d'une part, à ce que la réflexion sur l'évolution du cadre législatif lié à la transition numérique se fasse dans de bonnes conditions, et, de l'autre, à l'efficacité du soutien aux librairies indépendantes. Je participerai demain à la signature d'un nouveau contrat « territoire-lecture » à Chevilly-Larue, et réaffirmerai à cette occasion la nécessité, pour l'État, d'encourager les initiatives des collectivités, la politique du livre étant essentielle, je le répète, à l'aménagement du territoire, qu'il s'agisse de lien social ou d'éducation. Le livre est aussi, souvent, la porte d'entrée à tous les horizons culturels ; c'est pourquoi les bibliothèques et médiathèques sont évidemment des maillons essentiels.
Dès mon entrée en fonction, j'ai installé des groupes de travail, qui réfléchissent à des solutions concrètes sur des sujets tels que l'accès aux marchés publics pour les librairies indépendantes. Un état des lieux de toutes les aides existantes, madame Lagarde, sera donc établi afin d'améliorer leur efficacité : en ce domaine, il faut éviter le saupoudrage. M. Serge Kancel, inspecteur général de l'IGAC, prépare un rapport sur le sujet. Je souhaite aussi que soient analysées les raisons de l'échec de « 1001libraires.com » : les librairies indépendantes doivent se positionner sur le marché de la vente en ligne, car la concurrence du site Amazon est pour elles une menace à court terme, à laquelle il faut répondre avant la réforme de la TVA au niveau européen en 2015.
La fiscalité numérique est l'une des solutions pour la préservation de l'exception culturelle : Pierre Collin et Nicolas Colin, à qui le Gouvernement a confié un rapport, réfléchissent aux moyens de faire contribuer les grandes entreprises de vente en ligne ou les sites agrégateurs de contenus au financement de la création, puisque celle-ci a toujours été financée, en aval, par les réseaux distributeurs.
Quant à la Hadopi, elle doit être en mesure d'assurer sa mission. La dotation initialement prévue se monte à 8 millions d'euros, mais le chiffre de 9 millions vient d'être évoqué dans les discussions. Néanmoins, jusqu'à présent, la Haute autorité ne m'a pas transmis les éléments suffisants pour évaluer ses besoins réels. Quant à son avenir, le Gouvernement s'appuiera sur les conclusions de la mission Lescure, attendues au printemps de 2013, pour en décider. Quoi qu'il en soit, cet organisme doit participer, comme les autres, à l'effort de redressement des finances publiques. Ce défi a d'ailleurs été accepté avec un réel sens des responsabilités par tous les acteurs de la culture, à l'instar du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), qui contribuera à cet effort par un prélèvement sur son fonds de roulement.
J'ai néanmoins veillé à la préservation des missions fondamentales du secteur culturel, notamment dans son lien avec la citoyenneté, ainsi qu'à la valorisation de l'éducation artistique et au renforcement de l'égalité des territoires, la politique culturelle de ces dernières années ayant été marquée, monsieur Riester, par une trop forte concentration des projets à Paris. Loin d'être pénalisés, les crédits déconcentrés sont donc maintenus : 46 % du budget de mon ministère iront aux régions.
Je suis favorable à une TVA réduite pour la presse en ligne, monsieur Françaix. Cette question se pose dans le cadre plus général de la réforme des aides à la presse. Dans le contexte de la transition numérique, parmi les outils qu'il me semble important de pouvoir développer, l'idée de créer un droit voisin pour les éditeurs de presse – baptisé un peu hâtivement « lex Google » –, proposée par des éditeurs français, me paraît extrêmement pertinente ; elle semble se concrétiser en Allemagne, et la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) est en train d'y réfléchir. À travers le soutien au secteur de la presse, il s'agit en effet de préserver une liberté démocratique fondamentale.
Dans cette optique, l'État s'est engagé dans la restructuration de Presstalis. La création d'une société commune permettra non seulement de générer des économies structurelles, mais aussi de réorganiser la filière selon vos souhaits, même si cela ne va évidemment pas sans difficultés.
S'agissant du groupe Hersant média (GHM), le journal Paris-Normandie a été cédé à deux professionnels de la presse ; quant au pôle Champagne-Ardenne-Picardie, il fait l'objet de deux offres de reprise. Il faudra attendre l'audience du 30 octobre prochain devant le tribunal de commerce ; mais je reste vigilante, avec la DGMIC, sur les conséquences de ces réorganisations pour l'ensemble des journaux du groupe. Nous avons notamment fait en sorte que le groupe Rossel, qui s'était proposé avant de se désister, revienne dans le jeu, car il est toujours préférable que les titres soient repris par des professionnels du secteur.
L'efficacité des aides au portage a été évaluée, monsieur Kert. Avec 37,6 millions d'euros, elles sont, en tout état de cause, bien supérieures à ce qu'elles étaient avant les États généraux de la presse – à savoir 8 millions. J'ajoute que les aides sont complémentaires, monsieur Françaix : le portage fidélise les abonnés, La Poste assure la distribution dans les zones les plus reculées, et le soutien à la vente au numéro est évidemment essentiel. Pour ce qui concerne La Poste, nous ferons le bilan en 2015, date d'expiration de l'accord ; d'ici là, je souhaite que les engagements soient respectés.
L'évaluation de l'opération « Mon journal offert » par l'IGAC a révélé un taux d'abonnement assez faible au terme de l'année écoulée. Nous réfléchissons donc à des politiques plus pertinentes pour la jeunesse, comme l'opération « Kiosque au lycée ». Un nouvel appel à projets a aussi été lancé auprès des éditeurs.
Nous n'allons pas rouvrir le débat des chiffres, monsieur Riester. Mais, comme l'observait Michel Ménard, si M. Kert veut donner plus de moyens à l'audiovisuel public, il doit voter l'augmentation de la redevance au-delà de l'indexation !