Intervention de Xavier Breton

Réunion du 8 novembre 2012 à 11h00
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton, rapporteur :

Je tiens tout d'abord à rendre hommage au travail accompli par mon prédécesseur, Gérard Gaudron.

Le second volet du rapport de suivi s'attache à définir les conditions auxquelles doit satisfaire une politique de santé à l'école pour être véritablement opérationnelle, ce à partir des préconisations formulées dans le rapport initial du CEC, rédigé par Martine Pinville et par Gérard Gaudron.

Les conclusions de ce rapport ont convaincu le Gouvernement d'engager, au cours de l'année 2012, une rénovation du statut des professionnels de santé concernés, ce dont nous pouvons nous féliciter. Auparavant, le constat établi par la Cour des comptes avait favorisé une appréciation objective des difficultés dont souffre la médecine scolaire, au premier rang desquelles, précisément, le manque d'attractivité des carrières proposées, qui explique le manque de vocations.

Les chiffres fournis au mois d'août dernier par le ministère de l'Éducation nationale montrent que la baisse du nombre de personnels qualifiés, relevée dans le rapport initial, s'est poursuivie entre 2010 et février 2012. En ce qui concerne les médecins scolaires, les plus touchés, les départs vers d'autres professions ont été en constante augmentation et ont annulé à eux seuls l'effet des recrutements, sans même tenir compte des départs à la retraite, en nombre bien supérieur. Et si l'effectif des infirmiers s'est en revanche accru, il demeure en deçà du nombre souhaité par le Gouvernement, également du fait de l'insuffisance de candidats.

À la suite du rapport du CEC, le Gouvernement a donc engagé à partir du mois de janvier 2012 des discussions pour une rénovation du statut des professionnels de santé du ministère de l'Éducation nationale. Les personnels infirmiers souhaitaient être reclassés dans un corps de fonctionnaire de catégorie A, comme l'avaient été leurs collègues de la fonction publique hospitalière après que le niveau de la licence eut été attribué aux titulaires du diplôme d'État d'infirmier : l'intégration de l'ensemble des corps infirmiers de l'État dans la catégorie A a été décidée par voie de décret le 9 mai 2012.

Pour les médecins scolaires, les discussions ont été plus longues dans la mesure où il fallait définir un dispositif adapté à la diversité des postes à responsabilité proposés en fin de carrière. L'économie générale du nouveau statut, défini par décret le 20 juillet 2012, met l'accent sur le début de carrière afin d'élargir le vivier des médecins susceptibles de rejoindre l'Éducation nationale. Les personnels déjà en poste bénéficient d'un reclassement dans la nouvelle grille indiciaire à l'échelon correspondant à l'indice immédiatement supérieur à leur indice actuel. Cependant, les personnels qui sont parvenus au sommet de la grille indiciaire de leur catégorie voient leurs perspectives salariales s'améliorer à moyen terme, du fait de l'allongement de la carrière et de la création de nouveaux échelons.

L'ensemble de ces mesures a rendu confiance aux personnels en améliorant leurs conditions de travail – nous en avons recueilli des témoignages. Cependant, au-delà de la question immédiate des rémunérations, les intéressés attendent que soit également abordée celle de leurs missions. La profession de médecin scolaire est insuffisamment reconnue, y compris parmi les professionnels de santé, car la politique de santé à l'école à laquelle ils participent est insuffisamment lisible.

En ce qui concerne les corps des professionnels de santé du ministère de l'Éducation nationale, nous souhaitons, comme cela a été indiqué dans le rapport initial, qu'ils aient davantage accès à la mobilité interministérielle et qu'ils soient inclus dans le mouvement de regroupement qui a permis de réduire le nombre des corps de la fonction publique de 700 à 333 au cours de ces cinq dernières années.

Il est d'autre part souhaitable que la politique de santé à l'école s'appuie sur des structures plus visibles, que ce soit au niveau local, à l'échelle régionale ou au niveau interministériel.

Nous recommandons ainsi d'introduire dans les établissements scolaires la notion de « parcours de santé de l'élève », regroupant toutes les actions susceptibles d'être menées, à cette échelle, dans le cadre de la politique de santé à l'école : bilans infirmiers, consultations médicales, avis portés par les psychologues scolaires, adaptations réalisées dans le cadre d'un projet d'accueil individualisé (PAI) ou d'un projet personnalisé de scolarisation (PPS), aides sociales... De même que notre système de santé cherche à s'appuyer sur un parcours de soins diversifié, variable selon la gravité de la pathologie, ce parcours de santé à l'école devrait assurer à l'élève une réponse aux questions de santé qui se posent à lui, adaptée et graduée en fonction de son âge et de ses besoins. Il s'agirait de recentrer la politique de santé à l'école sur la personne de l'élève en mettant l'accent sur les interactions à établir, au niveau de l'établissement, entre les différents éléments de cette politique, au travers des prestations individuelles et collectives prévues par le code de l'éducation.

Nous souhaitons également que la prévention en faveur des enfants et des adolescents soit mieux articulée avec le système de santé local, afin qu'il y ait un lien plus effectif entre les examens de dépistage et l'accès aux soins. Pour ce faire, il convient de renforcer les fonctions d'expertise et de médiation médicales à l'échelle d'un groupe d'établissements scolaires constitué au sein d'un même bassin d'éducation. Les bassins d'éducation devraient ainsi devenir un lieu d'animation et d'évaluation de la politique de santé à l'école, ainsi que de coordination avec les autres acteurs de la prévention. Ils le sont parfois déjà dans certaines zones géographiques mais cette organisation mérite d'être généralisée.

Suivant les recommandations du CEC, le ministère de l'Éducation nationale a relancé la politique éducative de santé à l'échelon des académies, par le biais d'une instruction en date du 2 décembre 2011. Si nous nous félicitons de voir ainsi affirmé le caractère prioritaire de la politique régionale de santé, nous regrettons que les structures de pilotage préconisées dans le rapport du CEC, notamment pour la collecte et le traitement des données épidémiologiques régionales, n'aient pas encore été généralisées.

De même, nous regrettons que les structures de coordination interministérielle ne jouent pas leur rôle au niveau national, ce qui entraîne un découplage entre les orientations de la politique de santé publique et la politique conduite par le ministère de l'Éducation. Cette absence de coordination interministérielle est patente s'agissant de la définition des référentiels à prendre en compte pour les bilans de santé programmés à l'école. Sur ce point, le code de l'éducation doit être mis en conformité avec l'organisation des programmes de prévention sanitaire prévue par la loi de santé publique de 2004. Les acteurs sanitaires que nous avons rencontrés comprennent difficilement pourquoi la loi fixe de manière rigide, pour les visites médicales, des modalités dont la justification sur le plan sanitaire n'est pas toujours évidente aux yeux mêmes de la Haute autorité de santé, plutôt que de s'attacher à déterminer de manière précise les objectifs de santé publique poursuivis et d'identifier ensuite les démarches y contribuant le plus efficacement.

Les politiques de santé en faveur de la jeunesse ont une forte dimension éducative et préventive, et supposent une prise en charge de proximité. Au regard de ces deux critères, l'école a un rôle irremplaçable à jouer. Le rapport d'évaluation rendu public par le CEC en novembre dernier nous a permis de prendre conscience de la crise aiguë que traverse la médecine scolaire. En donnant le coup d'envoi à une réflexion collective sur l'avenir de la politique de santé à l'école, ce travail d'évaluation prolongé par le présent rapport de suivi vise à éclairer le législateur sur les choix qu'il aura à faire, le moment venu.

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