Intervention de Bruno Sido

Réunion du 22 février 2017 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Bruno Sido, sénateur, premier vice-président :

Pour aller plus vite, je vais commenter directement une première partie de nos recommandations concernant l'organisation générale de la recherche.

Premièrement, la stratégie nationale de recherche doit, pour s'imposer, bénéficier d'un soutien fort de l'Etat. Aussi, une de nos principales recommandations concerne le rétablissement définitif d'un ministère de plein exercice en charge de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Nous proposons deuxièmement que le Conseil stratégique de la recherche devienne un conseil stratégique plus restreint, qu'il se réunisse régulièrement sous la présidence effective du Premier ministre, en présence des ministres concernés, du Commissaire général aux investissements, des présidents de l'Agence nationale de la recherche (ANR) et du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES).

La stratégie nationale de recherche doit conduire à une réorganisation progressive des efforts autour des défis sociétaux et des programmes d'action pluridisciplinaires. La durée de cinq années de la stratégie, et son renouvellement tous les cinq ans, doit laisser le temps d'une réorganisation par étape. De ce point de vue, elle est un prolongement des Alliances qui organisent la coordination interne de cinq grands domaines de recherche depuis 2009. Elle crée un cadre pour la coordination entre les Alliances et pour la coordination entre les Alliances et d'autres domaines de recherche, comme l'espace, dont les forces scientifiques sont coordonnées par le CNES.

Cette réorganisation progressive va s'appuyer sur les contrats pluriannuels conclus par l'État avec les établissements d'enseignement supérieur et avec les organismes publics de recherche. Elle s'appuie encore sur la programmation des agences de financement public de la recherche et de l'innovation, dont l'Agence nationale de la recherche, le Commissariat général à l'investissement et Bpifrance.

Toutefois, d'après les informations recueillies par l'OPECST lors de la quatrième table ronde de l'audition publique du 8 décembre 2016, les évaluations a posteriori de la stratégie, s'agissant des impacts scientifiques, économiques, sociétaux, ne pourront produire des données qu'à une échéance longue, de quinze à vingt ans. En conséquence, il conviendra de gérer les exercices de révision avec une certaine prudence.

Nous recommandons ainsi, troisièmement, qu'à l'échéance des cinq ans de mise en oeuvre de la SNR, les aménagements et compléments apportés à celle-ci aient soin d'éviter la remise à plat totale de la stratégie scientifique : la recherche, pour se déployer, a besoin de temps long.

A l'inverse, nous soutenons, quatrièmement, l'idée d'Alain Fuchs, formulée devant l'OPECST le 8 décembre dernier, d'une analyse historique des causes profondes du succès remarquable de la France en matière de récompenses internationales au cours de la décennie écoulée (huit prix Nobel, quatre médailles Fields et un prix Turing) afin qu'il en soit tiré les conséquences lors des prochaines révisions de la stratégie nationale de recherche.

En tout état de cause, la réalisation de l'évaluation quantifiée a posteriori des impacts constituera en soi un projet à part entière. M. Mohamed Harfi, expert référent pour l'enseignement supérieur et la recherche à France Stratégie, a donné une définition de ce qu'il faut essayer d'apprécier quantitativement ou, à défaut, qualitativement : « L'évaluation a pour but de mettre en évidence ce qui ne se serait pas passé en l'absence d'action publique ».

Une réflexion a déjà été conduite au sein du Conseil stratégique de la recherche par un groupe de travail piloté par Mme Marion Guillou, et des indicateurs des trois niveaux d'impact sont déjà en cours d'élaboration, avec le concours de certains membres de l'Académie des technologies et d'experts de la Direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI), de l'Observatoire des sciences et des techniques (OST), de l'Institut pour la recherche et l'innovation dans la société (IFRIS), et de l'Association nationale pour la recherche et la technologie (ANRT).

Nous souhaitons ainsi, cinquièmement, que des moyens spécifiques soient dédiés à ces efforts de mesure d'impact, car il est essentiel de disposer d'un retour d'information pour piloter les révisions quinquennales de la stratégie nationale de recherche.

S'agissant de la prochaine stratégie nationale de recherche, nous considérons, sixièmement, qu'il faut qu'elle soit élaborée sur la base d'une consultation plus ouverte à la communauté universitaire et scientifique, aux partenaires sociaux et économiques, aux collectivités territoriales, en particulier aux régions, ainsi qu'au monde associatif et à la société civile.

Enfin, l'existence d'un cadre programmatique, validé au plus haut niveau de l'État, a l'avantage de permettre à toute la communauté de recherche de disposer d'un référentiel commun permettant à chaque équipe de recherche de se situer par rapport aux objectifs définis par la collectivité nationale. C'est un élément de valorisation de la recherche.

Il est donc très important, septièmement, de profiter de la publication du Livre blanc de l'Enseignement supérieur et de la recherche, qui est un excellent document didactique, pour faire mieux connaître dans la communauté scientifique les objectifs de la stratégie nationale de recherche.

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