Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Réunion du 22 février 2017 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Yvonne Le Dain, députée, vice-présidente :

Quand on parle de recherche, on parle fondamentalement d'inconnu et d'avenir. Aussi, vaudrait-il mieux que les responsables de la recherche n'aient pas l'impression de pouvoir tout prédire à l'avance. La France subit déjà les conséquences d'une stratégie conçue en dépit du bon sens dans le domaine de l'industrie, dont les responsables ont jugé bon, dans les années quatre-vingt-dix et deux mille, de nous dessaisir à bas prix de toutes nos ressources minières, ainsi que de nos groupes métallurgiques de l'aluminium ou de l'acier. Nous avons ainsi revendu des mines dont nous étions propriétaires en Amérique latine, en Asie, en Afrique ; ce mouvement, certes, n'a pas concerné les mines d'uranium, mais il a englobé l'exploitation des terres rares. La haute administration, celle des cadres « A plus », expliquait à l'époque que l'industrie minière appartenait au passé, que les temps étaient à la « nouvelle économie » dématérialisée, qui est devenue bientôt l'économie de l'Internet, avant de se transformer aujourd'hui en « uberisation » proliférante. On s'est tellement projeté vingt ans plus tard qu'on en a perdu contact avec la réalité, et avec la vraie nature des besoins futurs. On voyait les mines comme une ressource facilement substituable, semblable au pétrole. Or, toute l'industrie des semi-conducteurs, abandonnée également par la France, s'appuie sur une industrie minière performante. Entretemps, la science et, en particulier, la physique fondamentale, a progressé, mettant à jour des possibilités technologiques, notamment dans les nouveaux matériaux, qui vont rendre stratégique la maîtrise des filières métallurgiques.

Il faudrait rappeler quelque part que la science, ça ne se décrète pas. L'invention, ça ne se décrète pas.

En tant que géologue, j'ai été particulièrement affectée par l'abandon des mines. Mais le fait qu'on ait laissé ensuite s'installer des micro-barrages dans les endroits où il y avait des mines, provoquant une pollution des zones inondées, certains jardins à proximité devenant inutilisables, montre qu'il n'y a eu aucune gestion des impacts, car cela n'était pas dans l'air du temps. Or les scientifiques ne sont jamais dans l'air du temps ; ils sont soit en retard, pour les plus les mauvais, soit en avance, pour les meilleurs d'entre eux.

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