Intervention de André Aurengo

Réunion du 23 février 2017 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

André Aurengo, membre de l'Académie des technologies et de l'Académie nationale de médecine :

J'ai trouvé que, d'une façon générale, les deux rapports dont on a parlé aujourd'hui étaient d'une extrêmement bonne qualité. Il y a peut-être des détails à corriger, mais dans l'ensemble, la qualité est très bonne pour les raisons suivantes.

Tout d'abord, en ce qui concerne le rapport de l'ANSES, il s'agit d'une expertise collective. Rappelons que l'expertise collective est le degré le plus élevé de preuve que l'on peut avoir sur un sujet médical ou extra-médical. Elle fait suite à une saisine de la Direction générale de la santé qui est très claire, très factuelle. Pour avoir une bonne réponse, il faut une bonne question, et c'est le cas. L'expertise a été organisée d'une manière extrêmement professionnelle en ce qui concerne le choix des experts, les domaines couverts par les différents experts, la méthodologie, l'accord avec les normes existantes quant à la qualité de l'expertise, l'analyse des liens d'intérêt. Le rendu a été clair, sans langue de bois, dans un délai raisonnable, accompagné d'un résumé fidèle d'une quinzaine de pages pouvant être lu rapidement.

Ce rendu se doit d'aborder les aspects techniques. Je voudrais faire une première remarque au sujet des mesures. Nous sommes dans un domaine où les mesures sont extrêmement délicates. Comme il a été rappelé par les intervenants précédents, le champ électromagnétique n'est pas vraiment formé dans cette zone, c'est-à-dire qu'on n'est pas loin de l'émetteur par rapport à la longueur d'ondes utilisée. Il est donc important d'avoir des éléments comparables. Cela, je pense que l'ANFr le fait bien, avec premièrement l'édiction de normes. C'est très important qu'un juge de paix donne des protocoles et qu'il puisse éventuellement les affiner.

L'état des lieux comprend également l'analyse sociologique de la controverse, de sa naissance, de son mode de diffusion et de cristallisation. Il rappelle la situation à l'étranger, en Europe et aux États-Unis, où est née la controverse ainsi que le déploiement de ces compteurs dans le cadre de la loi et des normes en vigueur, en affirmant l'absence d'effets avérés sur la santé.

Les conclusions du rapport de l'ANSES sont très factuelles. L'ANSES ne met pas en évidence d'effets sanitaires avérés et la probabilité qu'on les mette en évidence est faible.

Je voudrais faire une seconde remarque par rapport à la formulation de type « il est peu probable qu'il y ait tel effet », ou « très improbable ». Je rappelle qu'il est impossible de prouver par un raisonnement déductif que quelque chose n'existe pas. Par contre, vous pouvez avoir une probabilité que quelque chose existe. C'est d'ailleurs de cette manière que le Centre international de recherche sur le cancer travaille. Le CIRC a classé des centaines de substances chimiques dans la catégorie « agent cancérogène » ou « agent probablement cancérogène ». La catégorie « agent non cancérogène » n'existe pas dans cette classification. Par contre, il existe une catégorie « probablement non cancérogène ». La clause de prudence l'impose.

Ce rapport s'élargit à une vision multidimensionnelle. Il ne s'est pas focalisé uniquement sur le compteur Linky ou sur les compteurs utilisés pour le gaz et l'électricité. Il aborde également les questions de vie privée, de sécurité et l'aspect intrusif.

Enfin, il propose des pistes très intéressantes quant aux études qu'il faudrait conduire, aux surveillances qu'il faudrait mettre en place, notamment des études dites « de provocation » pour les personnes qui se disent hypersensibles à ces courants porteurs en ligne. Il s'agirait de mettre ces patients face à un dispositif qui émet ou qui n'émet pas, afin de vérifier s'ils sont véritablement hypersensibles. Cela donnerait une assise rationnelle à la prise en charge médicale rigoureuse de ces personnes qui peuvent effectivement être dans un état de souffrance, de handicap.

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