Intervention de Philippe Léglise-Costa

Réunion du 4 avril 2017 à 11h00
Commission des affaires européennes

Philippe Léglise-Costa, secrétaire général des affaires européennes :

Le Conseil européen a également décidé de mettre en place une revue annuelle des programmes de défense, processus à la fois politique, budgétaire et technique qui permettra aux États membres de coordonner leurs programmations militaires afin de les synchroniser. Le passage de vingt-huit calendriers à un seul permettrait de faire de considérables économies sur le coût de l'acquisition des équipements.

Le Conseil a enfin créé un fonds européen de défense avec un volet recherche et un volet capacitaire.

Le volet recherche comportera un programme spécifique à partir du prochain cadre financier pluriannuel, en 2020. Selon la Commission, il devrait bénéficier d'au moins 500 millions d'euros par an. D'ici à cette date, une action préparatoire permettant de définir ce programme sera dotée d'un budget de 90 millions d'euros.

Le volet capacitaire permettra l'acquisition commune de prototypes et de matériels militaires en série. L'idée nouvelle d'une mutualisation des coûts d'acquisition portée par la France fait aujourd'hui l'objet de discussions très concrètes tant sur le plan budgétaire que sur le plan pratique. Nous souhaitons que de nouveaux moyens soient consacrés à la défense européenne à la fois dans le budget de l'Union et du côté de la Banque européenne d'investissement. Lors du Conseil européen, nous avons demandé que cette dernière adapte ses critères afin qu'elle puisse assurer ces financements.

Ces avancées très significatives montrent que les Européens ont conscience des menaces, et qu'ils comprennent qu'il faut qu'ils s'organisent non seulement en complémentarité avec l'OTAN, mais aussi de façon à pouvoir agir de façon autonome. Le concept d'autonomie stratégique, acté lors du Conseil, induit la possibilité d'accomplir des missions, et de disposer des capacités nécessaires aux armées et d'une industrie compétitive et intégrée. Cela suppose que plusieurs pays fassent enfin de véritables choix. C'est par exemple le cas de la Pologne qui affirme sa volonté de participer à la défense européenne et à l'intégration de l'industrie militaire européenne tout en préférant acheter du matériel à des puissances non européennes.

Sur la question du commerce, les choix de l'administration Trump constituent de nouveaux défis pour l'Europe, même si une prise de conscience européenne avait eu lieu lors de la période précédente. Le Conseil européen du mois de mars a esquissé une stratégie nouvelle consistant à lutter contre le protectionnisme au niveau international, et à profiter du retrait américain lorsque des opportunités se présentent. Cette stratégie doit aussi être mieux identifiée : il faudra dire plus clairement les objectifs de la politique commerciale européenne et expliquer comment cette dernière entend défendre ses intérêts et promouvoir des normes, tout en permettant de penser différemment la mondialisation.

Présenté par M. Mario Monti il y a quelques semaines, le rapport final du Groupe de haut niveau sur les ressources propres propose de repenser le budget européen tant en termes de dépenses que de ressources. Ce document suggère de mettre en place de nouvelles ressources propres en passant par l'impôt sur les sociétés – à condition de parvenir à fixer une assiette commune –, par la TVA, ou par la voie environnementale, climatique ou énergétique. Les discussions seront évidemment très difficiles mais, quoi qu'il arrive, elles auront lieu en raison de la sortie du Royaume-Uni de l'Union. Le cadre financier pluriannuel sera en effet négocié en même temps que le Brexit qui fera perdre au budget européen l'équivalent de la contribution nette britannique, soit 7 à 10 milliards d'euros par an.

Cela créera une pression sur les dépenses, mais aussi sur les priorités nouvelles : sécurité, migrations, compétitivité… Ces évolutions pèseront donc à nouveau sur les politiques classiques de l'Union comme la politique agricole commune ou la politique de cohésion – je qualifie ces politiques de « classiques », ce qui ne signifie pas qu'elles soient datées. L'année 2017 permettra de réfléchir et de préparer l'avenir sur tous ces sujets. Ces choix reviendront bien sûr au Président de la République et au gouvernement issus des élections.

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