Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 25 juillet 2012 à 15h00
Traité france-afghanistan d'amitié et de coopération — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

… ou à celui de voir se reconstituer une situation de guerre civile durable ressemblant étrangement à celle qui a précédé l'invasion des alliés occidentaux. Les acteurs ne sont pas exactement les mêmes, la plupart sont morts, mais on retrouve parfois les mêmes noms à la tête de différentes factions. Dans un tel contexte, les dispositions de ce traité peuvent paraître quelque peu irréelles.

Sur le fond, il s'agit d'oeuvrer au développement sous diverses formes et de former les forces armées et la police de ce pays.

En matière de développement, sans être pessimiste, on peut imaginer un effondrement de la contribution globale de l'Occident, directement ou indirectement, ou à tout le moins une diminution drastique. Or on ne voit pas comment ce pays pourra rapidement retrouver une autre voie de développement. On peut penser aux mines, celles de lapis-lazuli sont magnifiques, et le sol afghan recèlerait des réserves d'hydrocarbures et d'autres ressources. Mais, malgré l'implication actuelle de nombreux pays et l'aide internationale, il est clair qu'une telle évolution ne sera ni simple ni rapide.

La production d'opium n'est même plus une solution puisque les seigneurs de la guerre afghans ont déjà constaté l'effondrement des cours de cette denrée imputable à la croissance effrénée de la production afghane. Ils en ont tiré les conséquences en contingentant la production, ce qui explique son léger repli.

Pour ce qui est de la formation des forces afghanes, je suppose que nous n'avons pas pour projet de leur apprendre l'art de la guerre qu'ils pratiquent depuis près de trois mille ans avec à leur actif le fait d'avoir combattu durablement, et avec succès, contre Alexandre le grand, Gengis Khan et leurs descendants respectifs, les Britanniques, les Soviétiques et, entre-temps, quelques autres dont les Iraniens, les Moghols de l'Inde et même les Bengalis !

Quant à leur apprendre le droit universel, les procédures juridiques et ce qui va avec, c'est un projet louable, mais il faut le relativiser puisque les autorités que je viens de citer s'y sont essayées pendant quelques siècles, chacune avec les péripéties et l'échec final que l'on connaît. Jusqu'à plus ample informé, le seul code juridique qui s'applique véritablement dans les zones tribales pachtounes en Afghanistan et dans les FATA – les zones théoriquement administrées par le gouvernement central du Pakistan –, reste ce que l'on appelle le pashtounwalli, c'est-à-dire l'équivalent local du bushido japonais.

Michel Vauzelle a, dans son excellent rapport, évidemment pointé et analysé toutes les difficultés que je vous ai brièvement exposées. Il l'a fait avec un esprit plus subtil et une présentation plus nuancée que la mienne – ce qui n'est d'ailleurs pas très difficile. (Sourires.) Néanmoins, sa conclusion est d'une clarté limpide : nous ne pourrons poursuivre l'action de coopération envisagée par ce traité que si la sécurité de nos coopérants est assurée. C'est la raison pour laquelle il demande, ce que l'on ne saurait trop approuver, que la représentation nationale, en particulier votre commission des affaires étrangères continuent à suivre cette affaire de près dans la durée.

Suivant et faisant siennes les conclusions du rapport, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera en faveur de la ratification. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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