Intervention de Philippe Nauche

Séance en hémicycle du 25 juillet 2012 à 15h00
Traité france-afghanistan d'amitié et de coopération — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Nauche :

L'intervention en Afghanistan, décidée par le président Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin, avait au départ un objectif clair : lutter contre Al Qaida à la suite des attentats du 11 septembre 2001.

En 2001, cette décision avait été prise dans le cadre des Nations unies, afin de chasser les talibans, de lutter contre le terrorisme et de permettre à l'Afghanistan de retrouver sa souveraineté.

Depuis 1922, la France a toujours été aux côtés du peuple afghan, même dans les moments les plus difficiles de son histoire. Ces quatre-vingt-dix années d'amitié entre nos deux pays vont désormais se poursuivre par la ratification de ce traité d'amitié et de coopération, qui prend toute son importance en créant de nouvelles étapes qui s'inscriront dans l'avenir de l'Afghanistan, mais aussi dans l'avenir commun de nos deux pays.

En effet, la signature, le 27 janvier 2012, du traité d'amitié et de coopération pour une durée de vingt ans entre les deux pays illustre le bien-fondé de nos relations historiques. Le contenu de ce traité a d'ailleurs fait l'objet de développements particuliers, mettant ainsi en lumière les huit grands domaines de coopération – défense et sécurité, relations économiques et investissements, coopération technique et culturelle, développement agricole et rural, ou encore développement institutionnel – entre l'Afghanistan et la France.

Je voudrais d'abord, comme nombre d'autres collègues, rendre ici hommage aux quatre-vingt-sept soldats français qui ont payé un prix fort pour défendre ce pays. J'adresse mes pensées à leurs familles et à leurs camarades. Je pense plus particulièrement au major Miloche, à son régiment – le 126e régiment d'infanterie de Brive – et à sa famille. Lui aussi a donné sa vie, comme quatre-vingt-six autres de ses camarades ; c'était en octobre 2010, pendant la mission des « Bisons de Brive » en Surobi.

Cette guerre longue – trop longue – a aussi, malheureusement, endeuillé des milliers de familles afghanes et causé trop de victimes parmi les civils.

Les finalités de la mission de la France en Afghanistan se sont peu à peu transformées. En effet, elles auront finalement été doubles. Comme l'a dit le président François Hollande, cette mission aura consisté à la fois à lutter « contre le fanatisme et la haine aveugle » et à « aider fraternellement un peuple à retrouver le chemin de sa souveraineté ».

Nous devons désormais passer d'une logique de soutien militaire au soutien à la construction d'un État assis sur des valeurs universelles et sur l'aspiration des peuples à la paix.

Le retrait des principales unités combattantes fin 2012, décidé par François Hollande, n'est pas un abandon. L'enjeu est désormais de prévoir la présence de la France différemment, utilement, avec, d'un côté, les activités de coopération militaire qui doivent rester, et surtout, de l'autre, ce qui doit prendre maintenant toute sa place, c'est-à-dire les relations économiques et culturelles. Il faut faire en sorte que nos deux pays puissent, conformément à leur histoire, continuer à permettre le développement de la démocratie et de l'économie, mais aussi d'une culture commune qui puisse nous rassembler autour de valeurs que nous partageons.

Le présent traité, signé le 27 janvier 2012 par l'ancien Président de la République, offre un nouveau cadre juridique à la coopération franco-afghane pour les vingt prochaines années. Il marque l'évolution du soutien français à l'Afghanistan d'une dominante militaire à une dominante civile.

En effet, ce traité vise plus globalement, une fois la phase de transition terminée – d'ici à la fin 2014 – à accroître la coopération civile, notamment dans les secteurs de l'agriculture, de l'éducation, de la santé, de l'archéologie et des échanges culturels, ainsi qu'à encourager les échanges économiques bilatéraux.

Néanmoins, les questions de sécurité et de défense demeurent importantes. La mise en oeuvre des projets et actions contenus dans le traité est prévue par des programmes correspondants, arrêtés d'un commun accord pour chaque période de cinq ans.

Lors de la réunion du 27 juin 2012 du Conseil de sécurité de l'ONU, le représentant de la France a rappelé que, conformément au plan de transition de ses zones d'opérations et au cadre défini par l'Alliance au sommet de Chicago, elle achèverait ses missions de combat à la fin 2012 pour se concentrer sur ses actions de formation des forces afghanes de sécurité.

Concernant plus spécifiquement les dispositions relatives à la coopération de sécurité et de défense définies à l'article 3 du traité, précisons qu'aucune clause d'assistance ou d'engagement automatiques en matière de défense n'est prévue.

Ce traité, en revanche, établit une coopération en matière de sécurité et de défense – dont l'étude d'impact précise qu'elle sera « adaptée à l'évolution de la situation sécuritaire en Afghanistan » – qui comporte six volets. Elle s'organisera notamment autour d'actions de formation et de conseil conduites par la partie française, qui apportera également son soutien à la création d'une gendarmerie nationale afghane.

L'opération Épidote est composée de plusieurs détachements d'instruction opérationnelle travaillant chacun au profit d'une école militaire afghane dans un domaine précis. Le nombre des personnels en Afghanistan sous mandat Épidote est de 126. Ce volume est appelé à décroître progressivement jusqu'à l'horizon 2014. La question de la pérennité de cette structure au-delà de 2014 sera abordée ultérieurement entre alliés de la Force internationale d'assistance et de sécurité pour savoir à quel niveau il convient de la maintenir.

En complément de la pérennité de ces actions de formation, les unités qui ont été formées par la France pourront bénéficier d'un soutien ponctuel au moyen de détachements d'instruction opérationnelle, à la requête de la partie afghane lors des réunions d'états-majors annuelles. À ces deux éléments peuvent s'ajouter notamment les 88 militaires déployés au sein de l'hôpital militaire de Kaia, majoritairement au profit des Afghans.

Enfin, en matière de sécurité intérieure afghane, la coopération française se traduira par l'ouverture d'un poste de coopérant gendarme, qui deviendra conseiller en chef de la police nationale afghane. Seront également assurées les missions de coopération et de conseil auprès de policiers afghans dans différents domaines comme l'appui à la police judiciaire – dans la lutte contre les stupéfiants, le laboratoire de police scientifique ou encore la brigade des mineurs –, la création d'un service de protection des personnalités, la lutte contre la fraude documentaire, la protection civile, la logistique, le renseignement ou l'antiterrorisme.

Il n'y aura pas, de la part de la France, qu'une présence symbolique. Nous resterons en Afghanistan, de façon différente par rapport au passé, tout en accomplissant notre nouvelle mission. Pour nous, parlementaires, le suivi actif de la mise en oeuvre de ce traité sera l'une des priorités, car il faudra regarder ce qui se fera concrètement et s'assurer de la sécurité de nos coopérants, tout en ayant à l'esprit les difficultés qu'il y aura à passer du traité aux actes.

Je conclurai en citant les propos de François Hollande, tenus sur la base avancée de Nijrab le 25 mai dernier : « Le temps de la souveraineté afghane est venu. » Passons donc avec fierté le relais à nos amis afghans. Le groupe socialiste, républicain et citoyen approuvera ce traité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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