Intervention de Pascal Popelin

Réunion du 6 février 2013 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Popelin, rapporteur :

À entendre l'opposition, nous manquerions au respect du principe constitutionnel de l'égalité du suffrage. Ce n'est pourtant ni le Gouvernement ni le rapporteur qui a inventé la marge de 20 % admise par la jurisprudence, dont le Conseil constitutionnel comme le Conseil d'État déduisent que le découpage des circonscriptions électorales doit reposer sur « des bases essentiellement démographiques ».

Le Conseil constitutionnel a appliqué cette marge de 20 % à plusieurs reprises : en 1986 et en 2009 à propos des circonscriptions législatives (décisions n° 86-208 DC du 2 juillet 1986 et n° 2008-573 DC du 8 janvier 2009) ; à propos de l'Assemblée de la Nouvelle-Calédonie, qui était alors un territoire d'outre-mer (décision n° 85-196 DC du 8 août 1985) ; en 2010, à propos de la répartition des conseillers territoriaux par département au sein de chaque région (décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010). C'est d'ailleurs parce que le législateur s'était écarté des 20 % dans six départements que le tableau des effectifs des conseillers territoriaux a été censuré en décembre 2010.

En outre, lorsque le Conseil constitutionnel évoque l'utilisation de cette marge, c'est en y voyant un assouplissement, qui doit rester une exception par rapport à ce que serait un redécoupage purement démographique. En 2009, à propos des circonscriptions législatives, il a considéré que l'écart de 20 % était un « écart maximum » et que les possibilités de l'utiliser devaient « être réservées à des cas exceptionnels et dûment justifiés » : « il ne pourra y être recouru que dans une mesure limitée et en s'appuyant, au cas par cas, sur des impératifs précis d'intérêt général ; [...] leur mise en oeuvre devra être strictement proportionnée au but poursuivi ; [...] toute autre interprétation serait contraire à la Constitution ».

La rédaction de mon amendement CL 361 s'inspire en partie d'une rédaction adoptée au Sénat mentionnant la démographie, l'aménagement du territoire et le nombre de communes. Nous remplaçons le mot « démographie » – puisqu'un découpage est, par définition, fondée sur la démographie – par la notion de répartition de la population sur le territoire. Nous retenons l'aménagement du territoire, qui représente un autre objectif d'intérêt général. Nous supprimons en revanche le nombre de communes. Ce critère est trop précis, comme la densité de population par exemple. Quant à la notion de bassin de vie, elle est au contraire trop vague.

La commission « Guéna » ne saurait émettre d'avis sur le redécoupage, puisque la Constitution ne lui confère pas cette mission. Au reste, le Conseil d'État comme les conseils généraux donneront leur avis. Le premier pourra en outre être saisi de recours pour excès de pouvoir quand paraîtront les décrets modifiant la délimitation des cantons.

Sur le fond, une commission nationale de ce type se justifie quand il faut harmoniser les découpages sur l'ensemble du territoire, afin d'assurer l'égalité du suffrage au plan national. En revanche, il n'y a pas lieu de procéder à des comparaisons entre départements pour élire quatre-vingt-dix-huit conseils départementaux différents. D'ailleurs, vous n'aviez pas créé de commission dédiée quand vous avez voté la loi du 16 décembre 2010 créant les conseillers territoriaux.

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