Intervention de Razzy Hammadi

Séance en hémicycle du 13 février 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRazzy Hammadi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, par cette réforme, nous nous engageons dans la meilleure des voies. Si nous ne sommes bien entendu pas au bout du chemin, à tout le moins nous invitons l'Europe et d'autres pays encore à nous suivre en posant dès aujourd'hui un acte fondateur de ce qu'il convient d'appeler une réforme structurelle.

Hier, certains membres de l'opposition nous ont expliqué que la régulation devait être européenne, globale, que rien ne pouvait être fait sans regarder au-delà de nos frontières. Heureusement, nous ne les avons pas attendus : taxe sur les transactions financières, construction de l'Union bancaire européenne, directive européenne à venir et que nos travaux influenceront. En quelques mois, la gauche a plus obtenu, malgré les incantations, que la droite au cours des dix années précédentes.

Le texte, dont nous allons débattre et que nous allons adopter, représente notre première pierre à l'édifice de la régulation. Pour ma part, je suis heureux que la France montre la direction aux pays qui hésitent, notamment en ce qui concerne la transparence sur les paradis fiscaux. Quand la destinée du monde est en jeu, la France a cette vocation de fixer le cap, en raison des valeurs, des principes, de la soif de démocratie inscrits dans son ADN.

Il s'agit en premier lieu de moraliser le système bancaire, c'est-à-dire de réduire l'aléa moral. Celui qui faute doit payer, celui qui paie décide : à ces maximes d'évidence, il est difficile de ne pas souscrire. Et pourtant aujourd'hui, le système bancaire est ainsi conçu qu'il s'en éloigne beaucoup. C'est celui qui faute qui encaissera les aides. C'est celui qui faute qui verra la puissance publique le soutenir et ses comptes renfloués par l'argent du contribuable, qui lui, naturellement, paye, mais ne décide de rien. Vous signez, en quelque sorte, dans le domaine financier et bancaire, le retour du politique.

Je voudrais aussi saluer la méthode, les échanges que nous avons eus en commission des finances et en commission des affaires économiques, le travail de la rapporteure de la commission des finances et l'oreille attentive que vous avez prêté, monsieur le ministre, à notre volonté de coproduction législative.

Nous parlons donc d'aléa moral sur un sujet immensément complexe et technique, qui ne peut être réduit à des slogans.

Si notre confiance est totale, notre exigence l'est tout autant car une grande part de ce que nous allons discuter ici devra faire l'objet d'un décret. Il ne faudrait pas que la succession d'exceptions vienne rendre la règle inopérante.

Je veux d'abord parler dans le domaine du trading haute fréquence, du quote stuffing, ce bourrage d'ordres inutiles pour ralentir la concurrence ou encore du spoofing, autre nom barbare qui renvoie au fait de gonfler artificiellement un carnet d'ordres, ce qui constitue une véritable manipulation de cours.

Sur ces points-là, monsieur le ministre, je sais que vous veillerez à ce que ces activités ne se retrouvent pas dissimulées, filialisées ou pas, dans la tenue de marché.

Sur les autres sujets, qu'il s'agisse des paradis fiscaux, des frais bancaires, de la mobilité, de l'assurance-crédit, de la gouvernance ou de la haute fréquence, de nombreux points seront discutés ici. Beaucoup l'ont déjà été. Je ne doute pas que nos débats permettront de parvenir à un texte qui n'est pas seulement moral, pas seulement financier ou technique, mais véritablement démocratique et répondant à l'impérieuse nécessité de satisfaire l'intérêt général.

Pour conclure, j'ai entendu dans la discussion générale hier certains propos qui ne peuvent être acceptés dans un débat honnête et transparent.

N'est ce pas Nicolas Sarkozy qui le 23 septembre 2009 déclarait : « Les paradis fiscaux, c'est fini ! ». N'est ce pas Nicolas Sarkozy qui le 23 septembre 2009 disait : « On a convaincu toute l'Europe dont les Anglais. Les dérives bancaires, c'est fini ! ». Hier, lorsque nous parlions de prévision ou de gestion des crises, M. Chartier proposait un très timoré, poétique certes mais inefficace, conseil de régulation des risques systémiques. Aujourd'hui, nous posons des règles claires avec la filialisation ; nous fixons le principe avec la résolution ex ante.

Nous portons ici et maintenant un texte qui ne poursuit pas seulement des objectifs de transparence et de démocratie. Enfin, avec ce texte, les citoyens sauront qui dans cet hémicycle s'est levé et a débattu pour que soit mis fin au sentiment d'impunité et à l'idée que notre exigence face aux banques devrait être aussi poreuse que le sont les frontières. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

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