Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 13 février 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion générale

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Ce n'est pas un tic de langage. C'est l'amour de ce que nous faisons et aussi la volonté de changer les choses.

Cet amendement est le fruit d'un accord entre les groupes de la majorité et le Gouvernement. Il est ambitieux – nous serons les premiers au monde à exiger une telle liste – et, en même temps, il est maîtrisé.

Je me tourne vers Dominique Potier, dont l'intervention était pleine de coeur et dont on sentait qu'il était vraiment pris aux tripes par le sujet ; je sais que c'est un militant. Je lui demande de comprendre qu'il s'agit d'un premier pas. Il est difficile, aujourd'hui, ici et maintenant, d'aller plus loin. C'est aussi la méthode, qu'évoquait hier Laurent Baumel, ce réformisme qui consiste à procéder pas à pas. En l'occurrence, je pense vraiment que le travail accompli avec les écologistes, avec les socialistes, permet d'engranger de premiers résultats, marque une première étape. Il reviendra ensuite, c'est vrai, à l'histoire de franchir les suivantes. Je ne pense pas que l'on tranche une fois pour toutes, et que l'on s'arrêtera là. Il faut expérimenter, il faut faire ; c'est vrai, nous serons les premiers et, c'est également vrai, ce n'est pas sans risques. Il faut donc maîtriser les risques pour notre système bancaire.

Je me tourne donc vers vous, monsieur le député Potier. Nous avons eu l'occasion d'avoir des échanges personnels sur le sujet et je connais votre engagement, mais je crois qu'il faut que nous réfléchissions collectivement à ce qu'est notre intérêt. En l'occurrence, il est de capitaliser sur ce qui a été voté par la commission des finances plutôt que de susciter davantage de débats et, éventuellement, de remous.

J'ai entendu l'opposition demander, pour sa part, que nous revenions sur ces progrès. Je prends acte de cette position, à regret. Au fond, l'opposition semble rejeter la transparence, ce que je n'approuve nullement ; je pense que la majorité a eu raison de faire cette avancée en ce sens.

S'agissant des frais bancaires, j'ai eu l'occasion de dire en commission que je considérais que cette question n'était pas moins essentielle que la question systémique. S'il est une chose que je revendique, y compris dans le discours que nous avons pu tenir pendant la campagne, c'est la prise en compte du consommateur, de l'usager, dans le texte. On aurait pu se contenter d'un texte de structure, d'un texte de résolution, dont l'objet serait le comportement des banques, mais j'ai voulu que la question des frais bancaires soit traitée, car je veux que le système bancaire se remette au service de ses clients, notamment des populations les plus fragiles. J'ai dit que le projet comportait un certain nombre d'avancées, j'ai ouvert la voie à un dialogue entre le Gouvernement et Parlement sur la question d'un plus large champ d'application du plafonnement des commissions d'intervention. C'est un vrai acquis pour les Français. Je sais que la discussion aura lieu ici aussi mais, je le répète, il faut que nous gardions en tête l'intérêt d'un système bancaire dont la présence humaine est forte dans chacun des territoires de France dont nous sommes – je dis « nous » car j'en suis aussi – les élus. Il faudra que les parlementaires agissent avec volonté, avec sérénité et, en même temps, avec la sagesse qui s'impose. Le Parlement trouvera en tout cas en moi, sur ce sujet, un interlocuteur attentif. Je pense en particulier à M. Paul mais aussi à d'autres, qui ont des propositions à faire.

Je termine par un certain nombre de réponses et de remarques.

Éric Alauzet a évoqué la question de la mise à contribution des créanciers seniors. C'est l'un de mes objectifs dans la négociation en cours au niveau européen. Je ne pense pas, pour ma part, qu'il serait raisonnable d'appliquer cela de façon unilatérale. Il faut plutôt considérer qu'un mandat nous est donné.

Je remercie M. Thierry Robert pour le soutien de son groupe, qui a déposé de nombreux amendements. Nous aurons l'occasion, bien sûr, d'y revenir pendant la discussion des articles, mais nous avons déjà pu constater un point de divergence entre le point de vue qu'il a exprimé et le mien, sur la tenue de marché. Je n'accepte pas l'idée, injuste à mon sens, qu'il s'agirait uniquement d'une activité spéculative. L'approche retenue par la rapporteure et par M. Baumel, qui consiste à définir strictement ce qu'est la tenue de marché et, ensuite, à donner au ministre que je suis la capacité de définir des plafonds pour telle ou telle situation, est à la fois la plus ferme et à la plus souple. Je crois franchement que c'est une bonne démarche et, si j'ai noté que vous ne faisiez pas du traitement de cette question une condition du soutien de votre groupe, j'espère quand même vous convaincre du bien-fondé de cette approche.

J'ai noté que Nicolas Sansu, qui a fait un gros travail sur ce projet de loi, trouve que c'est un texte précurseur ; je tiens à le remercier. Je tiens aussi à le rassurer à propos de la tenue de marché et des interrogations qu'elle suscite chez lui. Je le sais soucieux d'avancer, avec son groupe, sur l'interdiction précise d'un certain nombre d'activités de tenue de marché. Ces préoccupations ont déjà été prises en compte et nous aurons peut-être à en rediscuter. Cela dit, l'écoutant hier intervenir contre la motion de rejet préalable et déclarer qu'il considérait que ce texte était précurseur, je me prenais à rêver qu'il l'approuverait. Mais il revient à chacun de se déterminer.

Je salue le travail mené par Laurent Baumel et Clotilde Valter, un travail d'animation du groupe majoritaire, d'abord, et une implication sans failles grâce à laquelle – je le leur dis – ce texte est devenu meilleur. Je ne puis évidemment que me réjouir de l'analyse faite par Laurent Baumel de la démarche que j'ai tenté de suivre, une vraie démarche réformiste, une démarche de dialogue avec le Parlement. Nous avons employé le terme de « coproduction ». C'est très simple : le Gouvernement propose un texte, mais des ouvertures doivent être possibles et le rôle du Gouvernement me semble d'être, mesdames et messieurs les députés, à votre écoute. C'est ainsi que nous avons à la fois pu améliorer le texte et répondre à certaines critiques trop faciles dont il était l'objet. Nous disposons maintenant d'un texte réformiste, en ce sens qu'il représente vraiment une avancée, un changement et qu'il témoigne aussi du souci de l'efficacité économique et du financement de l'économie française. D'ailleurs, l'amendement que vous avez déposé sur la tenue de marché, monsieur Baumel, est tout à fait décisif. Il permet une avancée essentielle.

Merci, monsieur Eckert, pour votre soutien précieux et aussi pour l'amendement que vous avez déposé, qui concerne les emprunts toxiques. J'espère que nous parviendrons, dans la discussion ou dans le courant de la vie de ce texte, à trouver une formulation satisfaisante pour tous. En tout cas, l'inspiration que vous avez donnée est tout à fait essentielle.

J'exprime ma gratitude à Pierre-Alain Muet. Je sais que, dans une autre vie, il a contribué à former le rapporteur général. En l'écoutant, j'ai tout à coup été saisi par cette magie de la pédagogie, du verbe et de l'histoire. Il fallait faire ces rappels, qui étaient utiles et qui ont impressionné sur tous les bancs. Cher Pierre-Alain, vous êtes notre maître à tous, je le sais, vous le savez, et, hier, vous l'avez vraiment démontré hier.

Je remercie Christian Paul et Guillaume Bachelay pour leurs interventions. Je les rejoins sur l'essentiel. C'est une loi technique, naturellement, mais c'est aussi une loi politique et une loi démocratique. Pardon, je corrige : c'est d'abord une loi politique et une loi démocratique. Ce n'est pas un outil de communication.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion