Intervention de Delphine Batho

Réunion du 25 juillet 2012 à 11h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Delphine Batho, ministre de l'écologie, du Développement durable et de l'énergie :

Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de ces nombreuses questions auxquelles je vais essayer de répondre. Je me permettrai de vous apporter des compléments par écrit sur certains points dans les jours qui viennent.

En réponse à Jean-Yves Caullet, je souhaite vous confirmer le souhait du Gouvernement de voir les parlementaires associés aux travaux de la Conférence environnementale. À l'occasion du Grenelle de l'environnement, un consensus était apparu sur la participation des députés et des sénateurs : le Gouvernement s'inscrira dans cette démarche. Il n'est toutefois pas de sa responsabilité de désigner les parlementaires qui siégeront dans chacun des ateliers. Une fois arrêté le nombre de participants à cette Conférence, chaque assemblée pourra donc nommer les élus qu'elle souhaite, selon des modalités qu'il lui appartiendra de définir.

S'agissant de la décentralisation, deux points me paraissent essentiels. D'abord, le débat sur la transition écologique et énergétique devra être vraiment national, et ainsi comporter une dimension territoriale forte. Des débats seront donc organisés dans nos territoires. Ceci est d'autant plus important que les collectivités territoriales, et notamment les régions, mènent de nombreuses actions dans le domaine des énergies renouvelables. Ensuite, la Conférence environnementale sera l'occasion de réfléchir à la place de la décentralisation dans la future loi-cadre relative à la biodiversité. Par ailleurs, comme vous le savez, le Gouvernement souhaite procéder à une réforme territoriale. Cet « acte III » de la décentralisation s'intéressera notamment aux politiques publiques en matière de développement durable.

M. Martial Saddier m'a interrogé sur la réforme du code minier. Le Gouvernement souhaite pouvoir soumettre un projet de texte au Conseil d'État avant la fin de l'année 2012. Un groupe de travail intégrant les cinq collèges du Grenelle sera bientôt constitué et animé par M. Thierry Tuot, président de la dixième sous-section du Conseil d'État et qui fut rapporteur général du Grenelle de l'environnement.

La pollution de l'air, qui est également un enjeu de santé publique, constitue un sujet de préoccupation majeur du ministère de l'Écologie. À ce titre, je me permets de le rappeler, la question du lien entre environnement et santé publique est inscrite à l'ordre du jour de la Conférence environnementale. J'ai également proposé à toutes les municipalités n'ayant pas déposé de projet de zones d'actions prioritaires pour l'air (ZAPA) de travailler sur la question dès le mois de septembre afin d'établir un plan de lutte contre la pollution de l'air.

Concernant les interrogations de Catherine Quéré, la révision générale des politiques publiques a conduit à une réduction du nombre des agents publics chargés de la police de l'environnement. Dans le contexte actuel, bien que le ministère dont j'ai la charge doive contribuer aux efforts annoncés, j'ai affirmé ma volonté de préserver tous les moyens relatifs à la prévention des risques technologiques ou naturels, à la sécurité des biens et des personnes et à la prévention des préjudices écologiques.

S'agissant de la pêche, je recevrai le 1er août prochain M. Claude Roustan, président de la Fédération nationale de la pêche. Ce rendez-vous sera l'occasion de définir les principaux axes d'action à venir. Comme vous le savez, je connais bien les enjeux auxquels sont confrontés les pêcheurs, notamment dans le département des Deux-Sèvres.

J'en viens à présent à la question relative aux déchets nucléaires. Le train auquel il a été fait référence a circulé en France en application, je le rappelle, d'un contrat datant de 2007. Comme vous le savez, la législation française autorise le traitement en France de déchets étrangers, qui doivent en revanche retourner dans le pays d'origine une fois le tri ou le reconditionnement opérés. Ceci explique le passage d'un certain nombre de trains sur notre territoire, dont les trajets ne sont pas divulgués pour des raisons d'ordre public.

En réponse à Alain Gest, M. Frédéric Cuvillier est, à mes côtés, le ministre délégué aux transports, à la mer et à la pêche. Nous rencontrerons bientôt les personnels de Voies navigables de France, ce qui j'espère répond en partie à la question. Au-delà, le Premier ministre a annoncé les orientations du Gouvernement s'agissant du schéma national des infrastructures de transport.

Concernant la fiscalité écologique, qui a fait l'objet de nombreuses questions dont celle de Philippe Plisson, il s'agit bien évidemment d'un sujet dont se saisira la Conférence environnementale. À mon sens, deux grandes réflexions devront être menées. D'abord, une réflexion stratégique de long terme. La France est selon moi en retard sur ses partenaires en la matière alors que la fiscalité est un levier majeur en vue de la création de logiques de production et de consommation vertueuses. Ensuite, il s'agira de déterminer des mesures pouvant être mises en oeuvre dès le projet de loi de finances pour 2013. L'objectif est bien de conjuguer fiscalité et justice sociale afin de s'assurer de l'assentiment des citoyens. Si les taxes écologiques doivent exister, il faut à tout prix éviter que le terme écologie soit synonyme de taxation.

Je tiens à saluer l'engagement reconnu de Geneviève Gaillard en faveur de la biodiversité. À ce sujet, je me permets de rappeler qu'à son initiative, un remarquable festival sur le sujet a été créé à Niort. La loi-cadre sur la biodiversité traitera bien évidemment la question de l'artificialisation des sols et des politiques de reconquête de la biodiversité. Cette loi-cadre sera élaborée de manière interministérielle puisque d'autres ministres sont concernés par le sujet : Mme Cécile Duflot, ministre de l'Égalité des territoires et du logement et M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la forêt. Je tiens à souligner l'existence d'initiatives intéressantes dans nos régions, comme celle dans le Rhône, qui visent la préservation des espaces naturels et agricoles périurbains. La Conférence environnementale sera également l'occasion de définir un calendrier précis pour l'élaboration de cette loi.

À ce stade de nos échanges, je souhaite souligner une difficulté à laquelle j'ai été confrontée lors de ma prise de fonction. J'ai en effet hérité d'une situation juridique compliquée concernant les orientations nationales relatives à la Trame verte et bleue. Certains décrets ne sont pas conformes à la loi votée, notamment s'agissant de la composition du comité national. Si un consensus politique était apparu sur la présence de parlementaires, celle-ci n'était pas prévue par la loi. Conformément au second alinéa de l'article 37 de la Constitution, j'ai donc saisi le Conseil constitutionnel afin d'entamer une procédure de délégalisation des articles visés afin de pouvoir les modifier ensuite par décret.

Le Marais poitevin, qui constitue la deuxième zone humide de France et un espace d'une richesse exceptionnelle, puisque chacun connaît les charmes de la « Venise verte », est également un territoire d'intérêt national. Le Gouvernement souhaite soutenir le projet de classement au Patrimoine mondial de l'Unesco. Le Gouvernement espère également que le projet de création d'un parc naturel régional aboutira bientôt, mais il m'est impossible de m'engager sur un calendrier précis. Par ailleurs, suite à la création de l'établissement public du Marais poitevin, le Gouvernement devra confirmer ses engagements au travers du programme 162 « Interventions territoriales de l'État » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.

S'agissant du parc naturel sur les zones humides, évoqué par Jean-Marie Sermier, nous en saurons plus au mois d'octobre.

Je rappelle que les biocarburants, dont a parlé Alain Gest, ont été prévus par une directive européenne de 2009. Des études de l'ADEME et de l'INRA montrent cependant les problèmes qu'ils soulèvent, comme les changements d'affectation des sols, diminuant ainsi les surfaces consacrées aux cultures vivrières. C'est une question que nous examinons avec attention, en tenant compte d'une part de la qualité des biocarburants actuels, d'autre part des perspectives offertes par les biocarburants de nouvelle génération.

La question sur l'eau posée par Michel Lesage est pour moi d'une importance majeure, et elle mérite que des travaux approfondis y soient consacrés, tant au sein du Gouvernement qu'au Parlement. La France a pris l'engagement que les deux tiers de ses masses d'eau aient une bonne qualité écologique en 2015 mais je doute que cet objectif soit atteint. C'est donc une question à traiter en urgence. De même, je compte travailler de manière prioritaire sur les énergies renouvelables, question évoquée par Serge Bardy. Mon collègue Arnaud Montebourg et moi-même avons demandé, pour le 13 septembre prochain, un rapport sur les filières amont, principalement solaire et photovoltaïque. Cette question sera à l'ordre du jour de la prochaine conférence environnementale. Nous avons la volonté de mettre en oeuvre des stratégies de développement qui soient créatrices d'emplois, d'amorcer la transition énergétique et de donner aux entreprises, notamment industrielles, un cadre législatif stable leur permettant d'avoir une vision de long terme. Enfin, quitte à me répéter, je réaffirme l'opposition du Gouvernement à la fracturation hydraulique pour extraire du gaz de schiste.

Mme Laurence Abeille a posé deux grandes questions : s'agissant des ondes liées aux antennes des fournisseurs d'accès à la téléphonie mobile, je recevrai très prochainement les représentants des associations, et ce point sera en outre à l'ordre du jour de la conférence environnementale. Quant à l'épandage par voie aérienne, je rappelle que la règle reste l'interdiction, mais que l'arrêté du 31 mai 2011, signé par Mme Nathalie Kosciusko-Morizet et M. Bruno Lemaire, qui étaient respectivement ministre chargée de l'écologie et ministre de l'agriculture, a prévu quelques exceptions. Mon collègue Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, et moi-même sommes opposés à ce système dérogatoire.

Je suis bien informée du problème posé par les animaux nuisibles. Son origine provient du fait que les arrêtés préfectoraux ont été remplacés par un arrêté national, ce qui oblige les services de l'État à rechercher une cohérence qui ne reflète pas toujours certaines réalités territoriales. Les préfets font remonter au ministère les doléances de nombreuses personnes. Avant de prendre une décision, je vais préalablement demander à mes services de bien les analyser.

Quant aux retenues d'eau de substitution, évoquées par Olivier Marleix, le projet de décret supprimant les enquêtes publiques ne me paraît pas acceptable. Il faut réintroduire la concertation dans ce domaine. Pour le reste, cette question de la gestion quantitative de l'eau doit être revue mais il convient de garder à l'esprit qu'il y a de grandes disparités sur notre territoire. Les retenues ne constituent pas obligatoirement la réponse structurelle au manque d'eau.

Sur l'énergie éolienne, Philippe Plisson a raison de relever que nous sommes loin des espoirs suscités par le Grenelle de l'environnement. Nous avons été confrontés à des freins réglementaires comme à des problèmes d'acceptabilité locale. Je considère néanmoins qu'il s'agit d'une énergie compétitive, que nous devons soutenir.

Mon collègue Frédéric Cuvillier pourra vous répondre plus précisément que moi sur l'ensemble des questions relatives à la pêche, mais sachez qu'il discute actuellement avec la Commission européenne sur la pêche en eau profonde. Quant à la Trame verte et bleue – évoquée par Jean-Jacques Cottel – j'y vois une occasion de régénérer les haies et d'associer les chasseurs à ce projet, mais plus encore d'avoir une vision globale sur la valorisation de la biomasse, qui pourrait ainsi être utilisée par les communes limitrophes de la trame pour leurs bâtiments à usage collectif, grâce à des chaufferies à bois.

Une question m'a été posée sur les nouveaux polluants présents dans l'eau potable : nous n'avons pas pour l'heure une évaluation claire de la situation. Le Xème programme des agences de l'eau doit permettre à ces dernières de renforcer leurs actions contre de tels polluants. En réponse à Chantal Berthelot, je précise que parmi les personnes qui assisteront M. Thierry Tuot dans sa mission, se trouvera Mme Laure Duthilleul, qui connaît bien les questions liées au code minier en outre-mer.

Je poursuis avec l'outre-mer, en indiquant à Gabriel Serville qu'une réunion interministérielle à laquelle j'ai participé s'est tenue lundi dernier pour réaffirmer l'autorité de l'État en Guyane. Je rappelle qu'il y a eu crime… Deux soldats Français ont en effet perdu la vie. J'ai pour ma part reçu le directeur du parc amazonien pour l'assurer que tout sera mis en oeuvre pour protéger ses personnels. Le ministre chargé de l'outre-mer mettra en oeuvre les décisions du Gouvernement.

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