Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 14 février 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Article 18, amendement 249

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Il faut bien qu'il arrive une fois que je ne sois pas d'accord avec la commission des finances ! Il me semble en effet utile de réfléchir un peu plus avant.

Vous proposez, monsieur le député, d'inscrire dans la loi qu'à l'issue du délai de huit jours accordé pour l'examen de l'équivalence des garanties il y a approbation tacite du contrat d'assurance délégué par le prêteur. Cette idée peut tout à fait se défendre.

Cependant, le choix d'une acceptation tacite du contrat d'assurance passé le délai de huit jours doit quand même être bien soupesé. Les deux contractants doivent avoir pleinement conscience des engagements pris, ce que ne permet pas, à mon sens, une acceptation tacite. C'est source d'incertitudes inutiles et d'un flou juridique de nature à rendre plus complexes les relations et l'échange d'informations entre le prêteur, l'assureur délégué et l'emprunteur, à qui il incombe, au final, la charge d'avertir les uns et les autres.

Que se passe-t-il, par exemple, si la banque refuse un contrat délégué dans les huit jours mais que l'emprunteur n'a pas transmis l'information à l'assureur délégué ? L'emprunteur peut déjà avoir signé le contrat d'assurance qu'il propose au banquier ; c'est une pratique qui existe, elle est loin d'être rare. L'emprunteur se trouverait alors automatiquement engagé par le contrat d'assurance en cas d'absence de réponse du banquier dans le délai de huit jours et pourrait être débité de la prime d'assurance déléguée dès le neuvième jour puisque le contrat est alors réputé acquis.

Que se passe-t-il par ailleurs si la banque fait une nouvelle proposition d'assurance à l'emprunteur en réponse à son contrat délégué ? Faudra-t-il une étape supplémentaire de refus formel de la banque, de transmission de ce refus par l'emprunteur à l'assureur délégué et de reprise des négociations entre la banque et l'emprunteur ?

Ces quelques questions – dues à l'imagination d'une administration performante ! – témoignent d'une réelle complexité juridique. L'introduction dans la loi d'une acceptation tacite entraînerait donc des risques contentieux. Or il me semble que l'emprunteur ne doit pas être pris en otage dans la concurrence auxquels se livrent le banquier et l'assureur délégué.

Il est important de plafonner, par la loi, le délai laissé au prêteur pour procéder à l'examen de l'équivalence des garanties, mais il me semble que la sanction du non-respect des délais doit relever du contrôle des autorités compétentes et du juge.

Bref, l'idée me paraît bonne, mais elle me paraît comporter un certain nombre d'effets pervers. Je souhaiterais donc que cet amendement soit retiré, quitte à ce que nous y revenions ultérieurement, en l'expertisant davantage. Il y a, à ce stade, trop d'incertitudes.

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